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Chroniques de Marc Kravetz France-Culture
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I  N  T  E  R  N  A  T  I  O  N  A L    C  O   N  F  E  R  E  N  C  E

Democratisation of the Middle East

Problems & Perspectives

19-20 November 2005
Organized by : Kurdish Institute of Paris in partnership with Kurdistan Minister of Culture
Iraqi Kurdistan Regional Government, Erbil - Kurdistan

sponsored by the French Ministry of Foreign Afffairs




Diaspora kurde en France

Par Akil MARCEAU (*)

D’installation relativement récente en France, la communauté kurde, estimée à 150 000 personnes, résidant essentiellement dans les grandes villes et capitales régionales françaises ; hormis Paris et région parisienne, on les trouve également dans les grandes villes telles que Marseille, Lyon et Strasbourg…etc. La première vague d’immigration kurde remonte aux années 1970 provenant essentiellement du Kurdistan de Turquie et liée au besoin de la main d’œuvre de la France de l’époque.

Donc, si les Kurdes ont choisi de s’installer dans les grandes agglomérations ceci s’explique par des raisons de recherches d’emplois, car le gros de la communauté, précisons-le est constituée de travailleurs. A cette première vague d’immigration kurde va s’ajouter d’autres vagues liées aux événements politiques, à l’instabilité de la région du Moyen-Orient, et surtout à des coups d’état militaires qui ont ponctué l’histoire contemporaine turque . L’arrivée massive des réfugiés politiques à la suite des coups d’état intervenus en Turquie et plus particulièrement le dernier, en 1980, l’accueil collectif, pour la première fois, des dizaines de familles kurdes irakiennes installées dans les camps de réfugiés en Turquie à la suite des opérations d’Anfal, à l’initiative de la Fondation de Mme. Mitterrand France-Libertés, va jouer un rôle kurdifiant au sein de la communauté. Mais, aussi, à côté de la communauté de travailleurs, il y a un nombre important d’étudiants kurdes issus soit de la deuxième génération ou venus directement du Kurdistan pour pouvoir fréquenter les universités et les centres de recherche s’est installé également dans les grandes villes faisant de cette communauté une communauté essentiellement citadine. C’est, nous pensons, une des caractéristiques de la communauté kurde, en France, si on la compare avec les autres communautés issues du monde musulman et notamment celles des pays maghrébins (Algérie, Maroc et Tunisie) dont une grande partie s’est installée dans le monde rural français travaillant dans l’agriculture. Une autre caractéristique de la communauté kurde que l’on peut citer est que c’est une communauté politisée, organisée et mobilisée autour des événements liés à leur pays d’origine. En raison de ces des différents facteurs qu’on vient de citer, la communauté kurde est structurée autour des centres culturels, touchant les domaines aussi variés que la culture, l’histoire, la langue, le folklore etc. mais aussi autour des représentations politiques kurdes installées en France.

Si on reste dans le domaine de la comparaison, la diaspora kurde en France se différencie, par rapport aux autres diasporas kurdes en Europe occidentale, par une vision élitiste de la question kurde grâce à une élite kurde qui a pu se constituer au cours de la courte histoire de cette diaspora mais aussi grâce à des raisons propres à la société d’accueil et la vision élitiste française. Ce mouvement élitiste déclenché durant les années 1960 après l’installation du prince Kamuran Bedir Kahan, issu de la grande dynastie princière des Bedir Khan. Installé d’abord en exil, en Syrie et au Liban sous le Mandat français, avec d’autres membres de sa famille et notamment son frère le prince Djeladet Bedir Khan, à la suite de l’instauration de la république turque. Les frères Bédir Khan s’étaient donnés aux activités culturelles (publication de livres, travail sur la langue et la latinisation de la langue kurde…etc.). Après la fin du Mandat français sur la Syrie, Kamuran Bedir Khan s’installe en France, où il avait noué des contacts. Il enseigne la langue et la civilisation kurdes à l’Institut des langues et civilisations orientales (INALCO). Mais, en parallèle, de ses activités sur la langue et la culture kurdes, il est aussi à l’origine des bulletins d’informations sur la question kurde afin de sensibiliser l’opinion publique française sur cette question. Ce travail va se poursuivre et s’élargir notamment avec la création de l’Institut kurde de Paris, en 1983.

A l’initiative de plusieurs intellectuels kurdes, d’horizons divers, installés en Europe mais également des intellectuels kurdes issus des communautés kurdes dans les différents pays de l’ex Union soviétique ainsi que des spécialistes occidentaux du monde kurde ,l'Institut Kurde a été fondé, qui est un organisme culturel indépendant, non politique et laïc.

Il a pour vocation d'entretenir la communauté kurde dans la connaissance de sa langue, de son histoire et de son patrimoine culturel, de contribuer à l'intégration des immigrés kurdes d'Europe dans leurs sociétés d'accueil et de faire connaître au public étranger les Kurdes, leur culture, leur pays et leur situation actuelle.

Grâce aux bourses d’études attribuées par l’Institut kurde depuis sa création, ceci a permis aux étudiants kurdes venus des différentes parties Kurdistan qui n’étaient pas en mesure de le faire dans leurs pays d’origine de poursuivre des études universitaires et de faire des recherches spécialisées sur l’histoire, la sociologie, la littérature et la langue kurdes. Un grand nombre de ces étudiants sont aujourd’hui des enseignants et des académiciens en France mais également dans les universités kurdes ou des cadres dans l’administration kurde. Ainsi armés d’outils académiques et d’une rigueur universitaire acquis en Europe, en parallèle de l’acquisition d’une culture générale et de moyens d’informations accessibles, ils sont en mesure d’informer et de mobiliser l’opinion publique française et européenne, se basant sur des modes de communication accessibles et compréhensifs par un public européen. A des moments cruciaux de l’histoire récente kurde, la diaspora forte de sa propre dynamique interne a su mobiliser, prendre des initiatives et avancer des idées. Au lendemain des bombardements à l’arme chimique d’Halabja, de l’assassinat du leader kurde Abdul Rahaman Ghassemlou au lieu de se replier dans une position défaitiste, l’initiative a été prise par l’Institut kurde de Paris d’organiser une conférence internationale sur la question kurde à Paris, en 1989. A un moment où le drame kurde semblait sombrer dans l’oubli, des dirigeants politiques et des intellectuels provenant de toutes les parties du Kurdistan ; par delà les clivages et divergences s’étaient réunis et ont montré qu’ils étaient capables de débattre d’une question qui les concernait tous. La présence de nombreuses personnalités étrangères montrait qu’ils étaient capables de briser le mur du silence qui entourait le drame kurde depuis plusieurs décennies, qu’il était enfin temps de sortir la question kurde de son ghetto proche-oriental et l’internationaliser. Cette initiative a été suivie par une autre conférence internationale organisée par l’Institut kurde Paris, cette fois à Washington, en 1991. Toujours, dans le souci d’internationaliser la question kurde et d’attirer l’attention de l’opinion publique, des pétitions et des appels souvent parrainés et signés par des organisations internationales et personnalités respectées de renommée internationale, y compris de prix nobles de la paix, ont été publiées dans les grands journaux occidentaux, dont le dernier sur la question kurde en Turquie désormais connu sous le nom de « l’Appel de Paris » servant de base commune à l’ensemble des courants kurdes présents sur l’échiquier politique en Turquie.

Sans faire la sociologie de la diaspora kurde, mais le brassage dans les sociétés d’accueil des Kurdes issus des différentes régions et différentes parties du Kurdistan a donné un relief particulier au rôle de la diaspora. La vision et l’attente de la société d’accueil peut aussi contribuer à l’évolution de la diaspora dans son rapport à la kurdicité. Quand un kurde demande à un autre Kurde d’où il vient la réponse peut être Kermanshahi, Dersemi, ou Badini…etc. Mais quand la même question touchant à son identité lui est posée par un Français, par exemple, la réponse pour se définir sera kurde. Les liens facilités par l’exil et renforcés par celui-ci, ont permis aux Kurdes de surmonter les barrières d’ordre dialectique et de se familiariser avec d’autres éléments culturels que les leurs ont contribué à construire un socle culturel commun à tous. Ce brassage peut contribuer, influencer et avoir un impact sur le nationalisme kurde qui souvent était teinté de régionalisme. De plus, l’existence des chaînes de télévision kurdes au Kurdistan retransmises par satellite ont permis à la diaspora non seulement de suivre l’actualité kurde, parfois en direct, mais également de se rapprocher de cette « réalité » encore plus et de synchroniser les idées et les projets. On peut citer également un autre élément permettant au désenclavement non seulement du Kurdistan mais également de la diaspora lui permettant de « se ressourcer » : les lignes directes aériennes, entre le l’Europe et le pays kurde.

Pour conclure, je dirais que l’identité diasporique est une identité extrêmement mobile et dynamique ; une identité qui peut influencer et être à son tour influencée par les événements se déroulant dans le pays d’origine, se rapprocher ou s’éloigner du pays d’origine en fonction des circonstances et selon que celui-ci est une source de fierté ou la renvoyant aux images de misère et de répression relatées par la première génération. En tout état de cause, la diaspora peut jouer un rôle majeur et déterminant dans l’histoire du pays d’origine, elle est à la fois l’image et la répréhension non-officielle de celui-ci dans les pays d’accueil.

(*) Vice-président du Département des Droits de l'Homme de l'Institut kurde de Paris