Le processus de négociation entre le gouvernement turc et le chef du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) Abdullah Ocalan a connu des développements importants au terme du mois.
Le 9 juillet, pour la première fois depuis 25 ans, Ocalan a pu adresser un message vidéo à ses partisans pour leur confirmer que l'insurrection armée contre l'Etat turc était-terminée et qu'il fallait désormais déposer les armes et passer à un combat politique pacifique "C'est une transition volontaire de la phase de la lutte armée à la phase politique démocratique et légale Cela ne doit pas être considéré comme une perte mais comme un gain historique » a-t-il encore ajouté (New York Times, 9 juillet)
Deux jours plus tard, le 11 juillet, dans une cérémonie soigneusement préparée, une trentaine de guérilleros du PKK, dont 4 commandants, sont descendus de la grotte historique de Jassana, à environ 50 km de Suleimanieh, pour déposer leurs armes dans un vaste vasque et les brûler.
« Nous espérons que cette démarche apportera la paix et la liberté. Notre peuple a plus que jamais besoin d'une vie pacifique, libre, équitable et démocratique" a déclaré la commandante Bessê Hozat devant quelque 300 invités venant du Kurdistan et de Turquie, dont des élus du parti DEM et des représentants des partis et du Gouvernement du Kurdistan irakien. Au cours de cette cérémonie d'environ 30 minutes, où Bessê Hozat a pris la parole en kurde et son collègue en turc pour l'audience turque, les combattants kurdes ont regagné les montagnes proches. Aucun plan d'amnistie politique ou de réintégration à la société civile ne semble avoir été envisagé. L'armée turque continue, d'ailleurs, malgré le processus en cours, à bombarder les maquis et a poursuivi ses opérations de ratissage des repaires et caches suspectés du PKK.
Le 7 juillet, au cours de l'une de ces opérations dans une grotte qui aurait servi d'hôpital aux combattants du PKK, 12 soldats turcs ont péri à la suite d'une intoxication au méthane (AFP. 7 juillet).
Le début symbolique du désarmement du PKK a été largement médiatisé en Turquie, au Kurdistan et la presse internationale y a consacré une large place. Ankara a salué "un tournant irréversible vers une Turquie sans terrorisme ».
Le président Barzani du Kurdistan irakien, le premier ministre irakien al-Soudani ont également salué une avancée vers la paix dans la région et le début d'une « nouvelle phase ». Intervenants le 12 juillet devant les membres de son parti le président Erdogan s’est voulu rassurant : « La Turquie a gagné, 86 millions de citoyens ont gagné » Il n’a cependant rien annoncé de concret, si ce n’est la création d’une commission parlementaire pour encadrer le processus en cours. Il a aussi tracé les contours d'une nouvelle alliance informelle entre le bloc au pouvoir, constitué de son parti AKP et du parti ultranationaliste MHP, et le parti pro kurde légal, le DEM, alors qu'il a lancé : "Nous-AKP, MHP et DEM- avons pris la décision d'avancer ensemble tous les trois sur ce chemin. Nous marcherons en faisant des pas les uns vers les autres. Si Dieu le veut, nous construirons ensemble, main dans la main, le siècle de la Turquie" Cette nouvelle stratégie, si elle réussit, devrait permettre à Erdogan de rester au pouvoir en marginalisant la principale formation de l'opposition, le Parti républicain du peuple (CHP) en la privant du soutien indispensable du parti pro kurde DEM, soutien qui lui avait permis de l'emporter dans les élections municipales dans les principales métropoles turques dont Istanbul et Ankara. Le CHP est devenu l'ennemi à abattre, du moins à discréditer et à affaiblir pour le pouvoir turc.
Ainsi, le 1er juillet le maire d’Izmir, troisième grande ville du pays et bastion de l'opposition au président Erdogan, ainsi que 109 membres de la municipalité appartenant au CHP ont été arrêtés pour corruption et irrégularités, des accusations rejetées par le parti. Au total 157 mandats d'arrêt ont été émis, rapportent les médias turcs. Pour Murat Bakan, vice-président du CHP, ces arrestations "survenues à l'aube, découlent d'un choix politique clair ». Nous sommes confrontés à un processus similaire à celui d'Istanbul" où le 19 mars à l'aube le maire d'Istanbul Ekrem Imamoglu et plusieurs dizaines de ses élus municipaux ont été arrêtés et incarcères. Le 5 juillet, trois autres maires appartenant au CHP ont été arrêtés et incarcérés. Il s'agit des maires d'Adana, quatrième grande ville du pays, d'Antalya et d'Adiyaman. Un nombre croissant d'enquêtes vise les élus du Parti républicain du peuple qui subit une pression croissante du gouvernement actuel (Le Monde, 5 juillet).
La répression vise aussi les journalistes et les organes de presse tant soit peu suspectés d'opposition. Le Monde du 1er juillet rapporte qu'un dessin de presse controversé a conduit à l'arrestation de son auteur et d'un rédacteur en chef du magazine satirique "Leman" Le dessin incriminé représenterait le prophète Mahomet. Des dizaines de manifestants en colère ont voulu s'en prendre à des employés de Leman, provoquant des échauffourées avec la police. Dans son édition du 7 juillet, le Monde publie une enquête fort documentée de son correspondant Nicolas Boursier sous le titre "En Turquie, la répression sans fin des principaux organes d'opposition au pouvoir." "Maires du Parti républicain du peuple, journalistes, voix critiques, les vagues de arrestations se multiplient pour faire taire toute opposition au pouvoir de l'AKP" souligne le journaliste. Le quotidien français, dans son édition du 15 juillet alerte sur "la hausse vertigineuse de la population carcérale en Turquie, qui "témoigne de la crispation autoritaire du pouvoir ». Il relève que "le nombre de personnes emprisonnées est passé de 55.000 en 2001, avant l'arrivée au pouvoir de l'AKP, à plus de 410.000 aujourd'hui, avec une accélération des arrestations ces derniers mois. Malgré ces menaces lourdes, il se trouve encore des citoyens pour contester publiquement les choix et lois arbitraires du pouvoir. Ainsi, les courageux défenseurs de l'environnement dénoncent l'adoption, le 19 juillet, de la loi "super pillage" pour accélérer les projets miniers et énergétiques des oligarques turcs votée par la majorité parlementaire de la coalition au pouvoir. Cette loi lève la plupart des contraintes environnementales sur l'exploitation des ressources du sous- sol. La loi ouvre les terres agricoles, dont les oliveraies et les sites forestiers à l'exploitation minière et supprime les protocoles d'évaluation d'impacts environnementaux exigés jusqu'ici (le Monde, 21 juillet).
Il y a aussi ce courageux et talentueux écrivain, Ahmet Altan, 75 ans, qui après avoir passé 5 ans dans les geôles turques sous l'accusation ubuesque d'envoi de « messages subliminaux lors d'une émission de télévision" continue d'écrire même si, « être écrivain en Turquie est dangereux » (le Figaro, 22 juillet)
Le caractère de plus en plus autoritaire et liberticide du régime turc ne semble guère troubler ses relations avec ses alliés occidentaux. Nul ne se risque à le critiquer publiquement, encore moins à le sanctionner. Le 24 juillet, l'Allemagne a décidé de lever son veto à la livraison d'Eurofighter » à la Turquie. L'accord prévoit la livraison de 40 de ces avions de combat fabriqués par un consortium regroupant l'Allemagne, le Royaume-Uni; l'Italie et l'Espagne. Berlin espère ainsi armer Ankara afin de défendre le flanc sud-est de L'OTAN, supposément contre la Russie (Le Monde, 24 Juillet). Alors que la Turquie refuse d'appliquer les sanctions occidentales contre la Russie et entretient un commerce florissant avec celle-ci, alors qu'elle est accusée de servir de plaque-tournante pour le détournement de ces sanctions, les dirigeants occidentaux semblent croire, par routine, qu’un cas de conflit entre L'OTAN et la Russie, la Turquie va se ranger à leurs côtés !
Depuis début juillet, des groupes armés officiellement « non identifiés » mais selon toute vraisemblance affiliés aux milices chiites pro-iraniennes Hashdi Chaabi, lancent quasi quotidiennement des drones armés contre les champs pétrolifères du Kurdistan. Les 15 et 16 juillet ces drones ont frappé les champs de Tawke, de Peshkhabour et d’Ain Sifni après des attaques similaires contre les sites production de Khurmala et de Sarsaug.
Les attaques ont provoqué des dégâts matériels importants et forcé les compagnies pétrolières à arrêter leurs opérations.
Selon le ministère des Ressources naturelles du Kurdistan la production pétrolière a chuté de moitié tombant à 140.000 à 150.000 barils par jour Les compagnies étrangères comme DNO et Gulf Keystone ont, par précaution, évacué leurs personnels.
Pour les autorités kurdes, qui ont pu établir que les drones étaient lancés à partir de la localité Dibis, dans la province de Kirkouk sous administration du gouvernement fédéral, les auteurs de ces attaques sont des éléments de Hashdi Chaabi (Milices populaires). Ces milices chiites intégrées à l’armée irakienne et payées par elle mais sous le contrôle effectif des Gardiens de la révolution iranienne. Le 16 juillet, dans un communiqué, le ministère de Ressources naturelles du Kurdistan a appelé "le gouvernement fédéral irakien et la communauté internationale à agir rapidement pour protéger la vie des employés civils la sécurité énergétique et pour empêcher de nouvelles attaques contre le secteur énergétique du Kurdistan" (Rudaw, 16 juillet) à la suite du Gouvernement régional du Kurdistan, le Parlement irakien et la présidence de la république ont également condamné ces "incidents" les qualifiant d' « assaut » flagrant contre la sécurité nationale et la stabilité du pays".
De son côté, le gouvernement de Bagdad a jugé "inacceptable" l'incrimination des Hashdi Chaabi. L'armée irakienne a lancé une vaste opération d'inspection dans les provinces de Ninive et Salahaddin, voisines du Kurdistan ; mais pas dans celle de Kirkouk d'où ont été lancés ces drones.
Les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont condamné ces attaques, avertissant qu'elles menacent la stabilité économique de l'Irak et ont exigé que Bagdad protège les infrastructures énergétiques et les investisseurs étrangers.
Le 22 juillet, le Secrétaire d'État américain Marco Rubio a appelé le Premier ministre irakien Mohammad al-Soudani pour que Bagdad assume la responsabilité pour les attaques de drones, garantisse le paiement régulier des salaires du Kurdistan et ouvre enfin l'oléoduc Irak-Turquie. Il a également demandé au Premier ministre irakien de résoudre la crise budgétaire du Kurdistan et l'a mis en garde contre le projet de loi controversé visant à institutionnaliser les Hashdi al-Chaabi (PMF) comme une entité permanente, ce qui finirait par faire de l'Irak un protectorat de l'Iran.
Les attaques de drones interviennent après la conclusion récente d'accords entre le Kurdistan avec les compagnies américaines pour l'extension de l'exploitation des champs pétroliers et gaziers du Kurdistan. Ces accords qualifiés d'historiques par leur ampleur ont été contestés par Bagdad mais la Cour fédérale suprême a tranché la dispute en faveur du Gouvernement du Kurdistan. Très mécontent, l'Iran fait donc intervenir les milices à sa botte pour déstabiliser l'économie du Kurdistan et faire fuir les investisseurs occidentaux notamment américains qui à leur tour sollicitent leur gouvernement pour protéger leurs intérêts.
La question est donc devenue internationale, une nouvelle pomme de discorde entre Washington et Téhéran susceptible de perturber aussi les relations irako-américaines.
Au milieu de ces troubles, les négociations entre Bagdad et Erbil sur le pétrole et le budget du Kurdistan se sont poursuivies.
Le 22 juillet, le Conseil des ministres irakiens a approuvé un nouvel accord et s'est engagé à reprendre le paiement des salaires des employés et fonctionnaires du Kurdistan ; après près de trois mois de gel. Le Gouvernement régional du Kurdistan a, dès le 23 juillet, affirmé avoir rempli toutes ses obligations, à savoir le transfert des recettes non pétrolières, la transmission des listes de paie de ses fonctionnaires et employés et la coopération avec la société gouvernementale SOMO pour l'exportation de son pétrole.
Il a, à nouveau, exhorté Bagdad à honorer de son côté ses engagements en soulignant que le paiement des salaires est un droit légal el constitutionnel des salariés de secteur public du Kurdistan (Rudaw, 23 juillet) Finalement, le 24 juillet le gouvernement de Bagdad a transféré à Erbil une somme de 975 milliards de dinars irakiens (environ 737 millions de dollars américains) pour le paiement de salaires du mois de mai. Le versement des salaires de juin et juillet reste encore incertain. Dans les négociations avec Bagdad les Kurdes ont présenté un front uni.
Cependant les deux principaux partis politiques kurdes, le PDK et l’UPK n’ont toujours pas réussi à se mettre d'accord pour la formation d'une nouvelle coalition gouvernementale : Le 14 juillet, le président du Parti démocratique du Kurdistan (PDK) Massoud Barzani, a accueilli le chef de l'Union patriotique du Kurdistan (l’UPK) Bafel Talabani à Erbil pour des négociations de "haut niveau".
Les deux partis qui gouvernent déjà ensemble le Kurdistan, ont échangé des propositions de partage du pouvoir sans parvenir à conclure un accord final.
L'UPK, qui est sortie affaiblie des élections parlementaires d'octobre 2024, refuse un partage de postes gouvernementaux en fonction des scores électoraux respectifs. Elle revendique des ministères "influents" comme le ministère de l'Intérieur ou la direction du Conseil de sécurité du Kurdistan, Le PDK continuera d'assumer les postes de président et du Premier ministre du Kurdistan accompagnés de vice-présidents issus de l'UPK.
En attendant, le gouvernement actuel continue de gérer les affaires courantes ; notamment la sécurité de la région, la coopération avec la coalition internationale contre Daech, le développement des infrastructures. Le processus d’unification des forces de peshmergas, avec le soutien logistique des Alliés, entrerait dans sa phase cruciale et devrait aboutir d'ici à la fin de l'année selon les informations de Rudaw. (1er juillet)
Certains projets marquent des avancées notables, malgré les incertitudes du contexte économique et financier. Ainsi, Selon une dépêche d'AFP (9 juillet) un tiers du Kurdistan irakien bénéficié désormais de l'électricité en continu, c'est-à-dire 24h/24, un luxe en Irak. En 2024, le gouvernement avait lancé le "projet Ronaki (Lumière) pour fournir de l'électricité en continu partout au Kurdistan. La première tranche de ce projet a été ainsi menée à bien.
En juillet, le Kurdistan a également commémoré le 42ème anniversaire de l'Anfal des Barzanis, de l'opération d'arrestation, de déportation et de l'extermination de quelque 8000 hommes et adolescents de la Vallée de Barzan par le régime de Saddam Hussein. Le Kurdistan se prépare aussi à commémorer début août le 12e anniversaire du génocide de yézidis par Daech.
Plus de sept mois après la chute de la dynastie des al- Assad, la Syrie reste toujours un pays fracturé où les tensions entre les minorités et le nouveau régime islamiste sunnite restent très vives. Ce nouveau régime, soutenu par la Turquie et adoubé par les pétro-monarchies sunnites du Golfe, veut s'imposer par la force, instaurer une République arabe syrienne centralisée autoritaire et islamiste sans tenir compte de la diversité religieuse, linguistique, ethnique et culturelle du pays.
Cette logique du primat de la force sur le dialogue et la recherche des compromis pour élaborer un véritable Contrat social a conduit, en mars dernier, à des affrontements violents en pays alaouite qui ont fait plus de 1700 morts.
Traumatisée, discriminées, persécutée la communauté alaouite nourrit un fort sentiment de rejet envers le nouveau régime.
Dans cette poudrière qu'est la Syrie des incidents au départ mineurs peuvent rapidement dégénérer en affrontements intercommunautaires. C'est ce qui est arrivé en pays druze où le 13 juillet des accrochages ont opposé des bédouins arabes sunnites en quête de razzias aux milices locales druzes d'autoprotection dans la ville à majorité druze de Souweida, située dans le sud-ouest de la Syrie. En deux jours, ils ont fait 37 morts, selon un bilan établi par l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Le gouvernement de Damas a dépêché sur place des « forces de sécurité » composées pour l'essentiel des milices islamistes voire djihadistes sunnites qui considèrent les druzes, tout comme des alaouites et les yézidis, comme des hérétiques, voire des mécréants. Sans surprise, ces forces ont pris le parti des tribus bédouines sunnites et ensemble elles ont commencé à massacrer des druzes Le bilan s'est rapidement alourdi à plusieurs centaines de morts, pour la plupart des civils Druzes, y compris de nombreux femmes et enfants.
Le 15 juillet, Israël, qui compte une importante communauté druze sur son territoire, s'est posé en défenseur des Druzes et a lancé des attaques aériennes contre des cibles militaires syriennes, Le soir même, le gouvernement syrien a déclaré un « cessez-le-feu total » après avoir convenu « un accord avec les notables de la ville »
Selon le quotidien le Monde, les chefs spirituels druzes auraient accepté l'entrée des forces gouvernementales à Souweida, appelant les milices druzes à ne pas résister" et à leur remettre leurs armes. Mais l'influent cheikh Hikmat al-Hijri a par la suite appelé dans un communiqué séparé à "'faire face à la campagne barbare "accusant Damas d'avoir failli à ses engagements en continuant de bombarder la ville (le Monde, 15 juillet)
Les combats ont continué de plus belle. Le 16 juillet l'aviation israélienne a bombardé des cibles militaires syriennes à Damas, y compris aux abords du Palais présidentiel, ainsi qu'à Souweida "pour protéger les Druzes". Le ministre de la défense israélien a mis en garde la Syrie contre des "coups douloureux".
L'avertissement israélien, doublé du bombardement du quartier-général du commandement de l'armée syrienne n'a pas tardé à produire son effet : le gouvernement a accepté de transférer le contrôle de la ville de Souweida aux "factions" druzes. Le président par intérim al-Charaa a justifié cette décision pour "éviter une guerre ouverte avec l'entité israélienne (le Monde, 17 juillet) La diplomatie américaine s'est mobilisée pour empêcher une extension de ce conflit et finalement, après une semaine de troubles et d'affrontements sanglants, un cessez-le-feu annoncé le 17 juillet s'est concrétisé le 20 juillet sur le terrain, le jour où par l'entremise de Washington, une "trêve" a été conclue entre Israël et la Syrie.
L'envoyé spécial américain pour la Syrie. qui a joué un rôle important dans cette médiation, l'ambassadeur Thomas Barrack a appelé les groupes armés impliqués dans ces affrontements, y compris les milices druzes et les tributs bédouines à "déposer les armes". De son côté, le président par intérim al Charaa, dans une déclaration télévisée s'est réjoui du retour au calme dans la région "en dépit des circonstances difficiles. (The New York Times, 20 juillet)".
Selon un décompte provisoire de l'OSDH, publié le 19 juillet, cette semaine sanglante a fait "plus de 1200 morts", pour la plupart des druzes. Si les combats ont provisoirement cessé, le calme n'est pas revenu, en tout cas pas dans les esprits. Dans un reportage publié dans son édition du 25 juillet, le Monde constate que « après les tueries de Druzes » Souweida reste « barricadée dans son rejet du pouvoir syrien : Sa reporter, Hélène Sallon, relate que "de très nombreux civils ont été exécutés" dans cette ville, "une hécatombe qui renforce les tentations séparatistes au sein de la minorité druze ».
Lors du massacre des alaouites, le régime syrien avait promis d'enquêter sur les auteurs des exactions et des exécutions sommaires et de les traduire en justice. Une commission d'enquête, dans son rapport rendu public le 22 juillet, a confirmé les noms de 1426 personnes tuées, pour la plupart des civils, dont 90 femmes mais aussi 238 membres des forces de sécurité: La commission a identifié 298 "suspects" impliqués dans les exactions contre la communauté alaouite mais à ce jour aucun d'entre eux n'a été poursuivi et traduit en justice: D'après l'Observatoire syrien des droits de L'homme (OSDH), les forces gouvernementales, appuyées par des groupes paramilitaires, ont commis des massacres et des "exécutions sommaires" faisant près de 1700 morts parmi les civils alaouites "Des ONG font état de massacres à caractère confessionnal dans lesquelles des familles entières out péri, y compris des femmes, des enfants et des personnes âgées.
Certains combattants se sont filmés en train d'exécuter des civils à bout portant, après les avoir mutilés et battus, rapporte le Monde du 22 juillet.
Cette situation de quasi-guerre civile ébranle la confiance dans les paroles et les engagements du régime syrien. La promesse maintes fois affirmée du président par intérim de « protéger toutes les minorités syriennes » s'avère creuse destinée à rassurer les occidentaux. Après les épreuves douloureuses des derniers mois ni les alaouites, ni les Druzes, ni les chrétiens du pays n'y accordent le moindre crédit. Les Kurdes, poussés par les Américains, se prêtent, sans conviction, au jeu du dialogue avec Damas, à défaut de véritables négociations sur le projet d'une Syrie décentralisée, laïque, démocratique à bâtir ensemble, avec la participation de toutes les composantes de la société.
Le 13 juillet, au soir du début des affrontements avec les Druzes, l'administration kurde a, dans un communiqué, plaidé à nouveau pour "un système démocratique pluraliste, la justice sociale, l'égalité des sexes et une Constitution garantissant les droits de toutes les composantes de la société ». « Les Syriens souffrent depuis des décennies d'un système centralisé qui monopolise le pouvoir et les richesses, réprime la volonté locale et a plongé le pays dans des crises successives "affirme l'administration kurde. » Aujourd'hui, nous aspirons à être des partenaires à part entière dans la construction d'une nouvelle Syrie décentralisée qui accueille tous ses citoyens et garantit leurs droits à égalité ». Plaidoyer, nourri d'expériences et innovant qui malheureusement ne trouve guère d'échos auprès des occidentaux pressés de normaliser leurs relations avec les nouveaux dirigeants syriens.
Ainsi, le président américain a décidé par un décret du 1er juillet, de mettre fin aux sanctions visant la Syrie, dont certaines datant de 1979, ne maintenant que celles prises contre Bachar al Assad, Washington évoque les mesures positives prises par les nouvelles autorités syriennes et dans la foulée révoque le statut « d'organisation terroriste étrangère » du HTC, milice islamiste fondée et dirigée par al Charaa.
L'Autriche va plus vite encore en besogne et considère désormais la Syrie comme un pays stable et sûr où elle commence à expulser des réfugiés syriens (Le Monde 3 juillet).
La France tente, de son côté, de jouer un rôle et propose sa médiation entre Damas et les Kurdes. À l'initiative du président Macron une rencontre devait avoir lieu à Paris entre le général kurde Mazloum Abdi et le président syrien par intérim at-Charaa. Mais, visiblement sous la pression d’Erdogan, qui ne veut pas d'interférence française en Syrie, al-Charaa a renoncé ou déplacement.
Finalement, c'est son ministre des Affaires Étrangères Assad al-Chabani qui a été reçu le 24 juillet au Quai d'Orsay en compagnie de l'envoyé spécial américain l'ambassadeur Thomas Barrack par le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot A l'issue de leur entretien, il a été convenu que Paris accueillerait « dans les plus brefs délais un nouveau cycle de consultations entre le gouvernement syrien et les Forces démocratiques syriennes concernant la mise en œuvre intégrale de l'accord du 10 mars" (France 24, 25 juillet). Le 26 juillet, le président Macron s'est entretenu par téléphone avec son homologue syrien. « J'ai parlé au président syrien de l'urgence de trouver une solution politique avec les acteurs locaux, dans un cadre national de gouvernance et de sécurité a déclaré le chef de l'Etat français. Il estime qu'il était "impératif d'éviter que des épisodes de violence ne se répètent en Syrie" appelant à poursuivre les responsables des exactions des derniers jours. "Le récentes violences en Syrie rappellent l'extrême fragilité de la transition. Les populations civiles doivent être protégées" a écrit sur X le président français qui demande un "dialogue apaisé" localement pour "permettre de répondre à l'objectif d'unification de la Syrie dans le respect des droits de tous les citoyens (le Figaro, 26 juillet).
L'union européenne ayant, dans le sillage de la décision américaine, levé sans conditions les sanctions contre la Syrie la France n'a guère de moyens d'influer sur le cours des événements et sur l'évolution du processus politique en Syrie à l'en croire les observateurs de la politique syrienne.
Une dictature semble remplacer une autre à telle enseigne que d'après une enquête de l’agence Reuters du 25 juillet c'est le frère du président al-Charaa qui est actuellement en charge de refaçonner secrètement l'économie syrienne dans les intérêts de son clan à l'instar du clan al-Assad qui avait fait main basse sur l'économie du pays pendant des décennies.
Selon le Bureau des droits de l'homme de Nations unies six cent douze hommes et femmes ont été pendus au cours du premier semestre 2025, soit deux fois plus qu'à la même période en 2024. Selon L'ONU, les procédures judiciaires se déroulent souvent à huis clos et ne respectent pas les normes d'un procès équitable.
"Les informations selon lesquelles plusieurs centaines d'exécution ont eu lieu en Iran depuis le début de l'année soulignent à quel point la situation est devenue profondément inquiétante ainsi que la nécessité urgente d'un moratoire immédiat sur l'application de la peine de mort dans le pays" a déclaré Volker Türk, le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, le 28 juillet à Genève Pour lui, "il est alarmant de voir des rapports expliquant qu'il y a au moins 48 personnes actuellement dans le couloir de la mort, dont 12 sont considérées comme étant en danger imminent d'exécution" Si plus de 40% des suppliciés de cette année ont été condamnés pour des délits liés à la drogue, les autres, c'est-à-dire la majorité, ont été jugés sur la base d'accusations vagues telles que "inimitié envers Dieu" et "corruption sur Terre, qui sont souvent utilisées par les autorités pour faire taire les dissidents. Au lieu d'accélérer les exécutions j'exhorte l'Iran a rejoindre le mouvement mondial pour l'abolition de la peine capitale, en commençant par un moratoire sur toutes les exécutions" a insisté le haut-commissaire de L'ONU. Celui-ci a par ailleurs souligné que le régime iranien examinait un projet de loi sur l'espionnage qui redéfinirait "la collaboration avec des États « hostiles » (passible de la peine de mort) en l'élargissant à des actes tels que la communication en ligne, la collaboration avec des médias étrangers et « l'alignement idéologique". "Ce projet de loi élargit dangereusement le champ d'application de la peine capitale pour espionnage et j'appelle à son annulation » a déclaré Volker Türk (Le Monde, 28 juillet).
Réagissant à ces déclarations de la part des Nations unies, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Esmaeil Baghaei a déclaré à la presse que "la peine capitale est prévue par la législation iranienne pour un éventail de crimes les plus graves. L’Iran « s'efforce d'en limiter l'usage aux seuls crimes les plus graves » a-t-il ajouté avec aplomb.
L'appel du haut-commissaire de L'ONU est intervenu peu de temps après la mort de deux prisonniers politiques iraniens, Mehdi Hassani 48 ans, et Behrouz Ehsani, 69 ans, pendus le 25 juillet. Arrêtés en 2022, ils étaient accusés de "rébellion armée", "inimitié envers Dieu " et "corruption sur Terre" en lien avec leur appartenance supposée à l'organisation des Moudjahidin du peuple. En janvier dernier, au terme d'un procès" qu'a duré cinq minutes et au cours duquel ils n'ont pas été autorisés à se défendre, privés d'avocat, ils avaient été condamnés à mort (le Monde, 30 juillet).
Même cette "justice" expéditive paraît superflue aux yeux de l'aile radicale du régime. Proche de Gardiens de la révolution, l'agence Fars-News a, dans un éditorial publié le 9 juin, appelé à exécuter massivement les prisonniers politiques désignés comme des "ennemis de l'État" invoquant le précédent des massacres d'opposants politiques en 1988 perpétrés à la suite d'une fatwa émise par le Guide suprême de l'époque. L’ayatollah Khomeyni, "Dans les conditions actuelles, des mercenaires iraniens et ressortissants étrangers ont permis les meurtres de centaines de citoyens, femmes enfants et civils, en transmettant des renseignements à l'ennemi sioniste et en introduisant des armes clandestinement dans le pays. Ils méritent d'être exécutés à la manière de 1988". Ces fanatiques considèrent que cette année-là la République Islamique a écrit un "chapitre brillant de l'histoire de sa lutte contre le terrorisme" en exécutant sommairement entre 2800 et 5000 détenus politiques de gauche, royalistes ou proches des Moudjahidin du peuple, en moins de trois semaines.
Très affaibli par la guerre des 12 jours, discrédité et humilié, le régime iranien tente malgré tout de faire bonne figure vis-à-vis monde extérieur tout en lançant une répression massive et féroce contre les « ennemis de l'intérieur » pour terroriser la population (New York Times, 4 Juillet) Sur le plan diplomatique l'Iran a, le 2 juillet, suspendu sa coopération avec l'Agence Internationale de l'énergie atomique (AIEA) dont les inspecteurs ont dû quitter le pays le 4 juillet. il ne veut plus de surveillance et de vérification de ses sites nucléaires par L'AIEA. Dans une interview accordée à la chaine américaine FOX News le 21 juillet, son ministre des Affaires étrangères Abbas Araghchi affirme que « l'Iran ne renoncera pas à l'enrichissement d'uranium, car c'est une question de fierté nationale » Ce programme d'enrichissement est temporairement à l'arrêt parce que les dommages causés par les bombardements israélo-américains sont "graves et sérieux" ajoute-t-il.
L'Iran rejettera toute négociation avec Washington si les Américains exigent un abandon de son programme d'enrichissement d'uranium avait déjà averti le 14 juillet, le conseiller spécial de l'ayatollah Khamenei, Ali Akbar Velayeti, cité par l'agence Irna (le Figaro, 14 juillet).
Le 23 juillet, dans une rare rencontre avec la presse à New-York le vice-ministre iranien de Affaires étrangères Kazem Gharibadadi a affirmé que l'Iran pourrait se retirer du traité de non-prolifération si les pays européens réimposaient des sanctions (New York Times). Deux jours plus tard, le 25 juillet, une délégation iranienne a rencontré à Istanbul des émissaires français, allemands et britanniques. Cette réunion qui a duré plusieurs heures au consulat iranien a Istanbul ont permis une discussion « franche et approfondie » selon la partie iranienne. Les Européens ont appelé l'Iran à respecter ses engagements découlant de l'accord de 2015 et à assurer le retour des inspecteurs de l'ALEA. En l'absence de solution négociée les Européens pourraient déclencher le mécanisme de rétablissement des sanctions (Le Monde, The New York Times, 25 Juillet).
Cette reprise de contacts risque de s'avérer comme un énième exercice diplomatique formel en attendant une éventuelle négociation entre Washington et Téhéran.
Entre-temps, le régime iranien continue sa politique de prise en otage des ressortissants occidentaux ayant eu l'imprudence de se rendre en Iran : Le Monde du 2 Juillet rapporte "une nouvelle vague d'arrestations de ressortissants européens "accusés de coopération avec Israël. Le dernier en date de ces supposés « espions », est un jeune Français, Lennart Monterios, âgé de 18 ans, qui faisait une randonnée en vélo. Deux autres Français, Cécile Kohler, professeur de lettres de 40 ans et son compagnon, Jacques Paris, 72, ans arrêtés le 7 mai 2022 au cours d'un voyage touristique en Iran, détenus depuis plus de 3 ans dans la sinistre prison d'Evin de Téhéran, encourent la peine de mort. Le franco-allemand Monterios préparait depuis fin 2023 "un voyage à vélo d'un an pour découvrir le monde, à travers l'Europe et l'Asie" après le bac et avant d'entreprendre des études supérieures. Ce passionné de sport, notamment d'escalade et de vélo avait sollicité une plateforme de financement participatif pour réaliser son projet. "J'aime beaucoup lire et voyager à travers les livres, et maintenant je souhaite voyager à travers le monde à vélo". "Un rêve de jeunesse brisé par la dure réalité de la théocratie iranienne. (Le Monde, 6 juillet)
D'autres étrangers suspectés d'espionnage : les malheureux réfugiés afghans qui ont fui le régime des Talibans et qui survivaient tant bien que mal dans les bidonvilles des villes iraniennes.
Depuis le 1er juin, près de 450.000 d'entre eux ont été expulsés manu militari vers l'Afghanistan. Fin mai, Téhéran avait donné "jusqu'au 6 juillet" aux "4 millions d'Afghans illégaux" pour quitter son territoire. Selon l'Organisation internationale pour les migrations, entre le 1er juin et le 5 juillet 449218 Afghans out quitté l'Iran pour leur pays d'origine.
Pour l'année 2025, ce nombre s'élève à 906 326 personnes. L'ONU a averti que le flux de populations pourrait déstabiliser davantage l'Afghanistan, déjà confronté à une grande pauvreté et à un taux de chômage élevé (Le Monde, 7 juillet)
La répression contre « les ennemis de l'intérieur » ne connaît pas de répit. Voici un résumé des principales exactions perpétrées au Kurdistan iranien selon des informations collectées par l'ONG des droits de l'homme Hengaw et l’Institut kurde de Washington.
Au cours des premières semaines de juillet 2025, les autorités iraniennes ont intensifié une répression massive contre la population kurde en Iran (Rojhelat). Les forces de sécurité et les tribunaux ciblent les Kurdes par des exécutions secrètes, des arrestations massives, des peines sévères et l'usage de la force létale, sous prétexte de sécurité nationale à la suite du récent cessez-le-feu entre l'Iran et Israël. Depuis le 1er juillet, des dizaines d'activistes kurdes, de figures culturelles et de citoyens ordinaires ont été arrêtés ou tués, accusés d'« espionnage » et de rébellion armée.
Début juillet, les tribunaux iraniens ont considérablement intensifié les condamnations à mort contre les Kurdes impliqués dans les manifestations « Femme, Vie, Liberté » de l'an dernier. Le 7 juillet, le tribunal révolutionnaire d'Urmia a condamné cinq Kurdes originaires de Bokan à un total ahurissant de 11 peines de mort (certains accusés en ont reçu deux ou trois chacun), en plus de lourdes peines de prison. Le juge Reza Najafzadeh a prononcé plusieurs chefs d'accusation passibles de la peine capitale – dont « insurrection armée » (baghi) et « inimitié envers Dieu » (moharebeh) – en les accusant également de liens avec des partis kurdes interdits (Komala, PDK) et même « d'espionnage pour Israël ». Le verdict mentionne la possession supposée de dispositifs satellitaires et une collaboration avec le Mossad comme preuves. Les organisations de défense des droits soulignent que le procès a ignoré les signes clairs de torture et d'aveux forcés, rendant des verdicts de façade sans preuves crédibles. Ces condamnations massives à mort – 12 au total dans cette affaire – marquent une forte montée du recours à la peine capitale par le régime pour terroriser la dissidence kurde.
Parallèlement aux exécutions, les agences de renseignement iraniennes ont lancé une vague d'arrestations dans les zones majoritairement kurdes. Dans les semaines qui ont suivi le conflit Israël-Iran, plus de 330 civils et activistes kurdes ont été arrêtés par les services de renseignement des Gardiens de la Révolution (IRGC) et le ministère du Renseignement, dans les provinces de l'Azerbaïdjan occidental (Urmia), du Kurdistan, de Kermanshah, d'Ilam, de Téhéran et même du Khorasan du Nord. La plupart ont été arrêtés sans mandat ni inculpation formelle, et beaucoup restent injoignables, sans accès à un avocat ni contact familial, détenus dans des centres secrets. Des dizaines d'autres ont été convoqués et interrogés pendant des heures, alors que les autorités élargissent leur réseau d'intimidation.
La répression a même visé les familles des membres de l'opposition kurde en exil. Le 10 juillet, des agents du renseignement ont perquisitionné une maison à Mahabad et arrêté Khedr Rasouli, 69 ans, et sa fille Klara Rasouli, père et sœur de l'activiste exilé du PDKI, Karo Rasouli. Les deux auraient été gravement torturés en détention et forcés à faire des « aveux » filmés, admettant un espionnage pour Israël. Selon des fuites, les images – obtenues sous la contrainte – seront utilisées par les médias d'État pour discréditer la famille Rasouli en la présentant comme des espions. Khedr Rasouli, ancien prisonnier politique ayant subi deux opérations cardiaques, se trouve dans un état alarmant à cause des sévices. Des sources kurdes affirment que le seul "crime" de cette famille est d'être liée à un leader dissident – une forme de punition collective désormais fréquente au Kurdistan iranien.
Dans le même temps, les autorités s'en prennent à la société civile kurde et à l'activisme environnemental. Le 21 juillet, les forces de sécurité ont arrêté au moins cinq Kurdes à Saqqez, dont le chef de village Latif Moradi et l'avocat Mozaffar Moradi, pour avoir protesté contre les activités d'une société minière aurifère. Les villageois manifestaient pacifiquement contre une exploitation destructrice pour les vergers, routes et montagnes près de Mirgeh Nakhshineh. Malgré une pétition citoyenne et des rassemblements pacifiques, le régime a répondu par des arrestations et des poursuites contre les organisateurs, soulignant que même les revendications écologiques et économiques sont réprimées.
Les militants culturels et linguistiques kurdes sont également visés. À Shirvan (province du Khorasan du Nord), des agents en civil des Gardiens de la Révolution ont arrêté Mostafa Rahnama, un athlète kurde de 47 ans et figure culturelle, le 21 juillet, alors qu'il se trouvait près d'une université. Il a été arrêté sans mandat, et les questions de sa famille sur son sort ou les charges retenues sont restées sans réponse. Cette arrestation s'inscrit dans une campagne plus large d'intimidation contre les enseignants de kurde et les associations culturelles, même hors du Kurdistan iranien. De même, en Azerbaïdjan occidental, le sort de l'artiste kurde de théâtre Amin Karimi reste inconnu plus de trois semaines après son arrestation, le 1er juillet, au poste frontière de Sarv Karimi, qui revenait de Turquie, a été arrêté par des agents frontaliers et a disparu depuis lors. Ces disparitions forcées plongent les familles dans l'angoisse et la peur pour leurs proches.
Enfin, les forces de sécurité iraniennes continuent d'utiliser la force létale contre les civils kurdes en toute impunité. Le 23 juillet, la police a abattu deux jeunes Kurdes, Arman Beyglari et Pezhman Badri, à Holeylan (province d'Ilam), suite à une altercation mineure dans un parc. Après une dispute, les deux hommes ont quitté les lieux en moto, mais ont été pourchassés par la police et abattus. Cet incident – sans lien avec des manifestations – illustre la réaction disproportionnée et violente du régime envers les Kurdes.
L'un des aspects les plus brutaux de la répression a visé les kolbars kurdes : des porteurs semi-légaux qui transportent des marchandises à travers les frontières occidentales pour survivre. Dans le sillage du cessez-le-feu, les autorités iraniennes ont qualifié ouvertement les kolbars de menace pour la sécurité nationale, justifiant l'usage de la force létale par des accusations d'espionnage. Au moins trois kolbars ont été abattus par des gardes-frontières iraniens au cours du mois. Parmi les victimes documentées figurent :
Siwan Abdullahzadeh, 20 ans (tué le 28 juin à Baneh),Khaled Mohammadi, 23 ans (tué le 8 juillet à Baneh),Payam Ahmadi (tué le 15 juillet à Sarvabad)
De nombreux autres ont été grièvement blessés. Par exemple, le 4 juillet, Rezgar Mohammadi, un kolbar de Bukan, a subi de graves lésions rénales après avoir été attaqué par les forces du CGRI près de la frontière de Baneh. Le 23 juillet, à Marivan, les gardes-frontières ont non seulement tiré sur un kolbar blessé, mais l'ont également sauvagement battu. L'homme, identifié comme Ata, 23 ans, originaire de Sarvabad, a été accusé de contrebande. Cette brutalité a semé la terreur parmi les communautés pauvres de kolbars vivant le long des frontières.
Le gouvernement iranien lie explicitement ces actes à des allégations d'espionnage. Le 1er juillet, un député influent, Hossein-Ali Haji Deligani, a qualifié les kolbars de « brèche sécuritaire » et a appelé à des mesures immédiates pour stopper les prétendus transferts d'équipements militaires ou d'espionnage via les passages frontaliers non officiels. Après la guerre, les autorités ont interdit la pratique du kolbari, supprimant du jour au lendemain la principale source de revenus de milliers de familles kurdes.
Cette militarisation de la politique frontalière a eu des conséquences alarmantes : au premier semestre 2025, au moins 10 kolbars ont été tués et 12 blessés par des tirs directs des forces du CGRI ou des gardes-frontières. Les observateurs des droits humains affirment que Téhéran instrumentalise les accusations de sécurité pour légaliser les exécutions extrajudiciaires de travailleurs kurdes non armés. Les tirs, suivis de campagnes de diffamation dépeignant les victimes comme des « contrebandiers » ou des espions, indiquent une stratégie systématique visant à intimider et soumettre la population kurde frontalière.