PRESENTATION


PROGRAMME
INTERVENANTS
Theda Borde EN
Şermîn Bozarslan EN
Franck Cecen
Chirine Mohséni
Clemence Scalbert
Lucile Schmid
Rûşen WERDÎ
PRESSE



C  O N  F E R É N C E   I N T E R N A T I O N A L E
Les processus d'intégration des Kurdes
dans les pays de l'Union européenne

24 février 2006
Organisée par Institut kurde de Paris avec avec le soutien du FASILD



LES KURDES EN EUROPE : QUI SONT-ILS ? POURQUOI SONT-ILS VENUS ? QUE FONT-ILS ?

Par Maître Franck CECEN (*)



Préambule

1. Définition

Le terme de « débouté du droit d’asile » désigné l’étranger qui a sollicité la reconnaissance de la qualité de Réfugié ou de l’asile subsidiaire, mais dont la demande a été rejetée.

Dès lors, il est soumis aux règles de droit s’appliquant aux étrangers en situation irrégulière et il lui est, en général, demandé de quitter le territoire.

Généralement, après le refus de la Commission de Recours, le solliciteur d’asile devient un débouté du droit d’asile et reçoit, par la Préfecture, d’abord, un refus de séjour assorti d’une invitation à quitter le territoire.

Avant d’examiner l’ensemble des procédures permettant à un débouté du droit d’asile de se voir régulariser sa situation, il convient de rappeler que tous les pays européens ont plus ou moins modifié, depuis les dix dernières années, leurs lois sur le droit d’asile.

2. Application du droit d’asile dans les différents pays de la CEE

Confrontés au flux croissant des demandeurs, tous les pays européens ont eu le souci, depuis cinq ans, de réformer leurs lois sur le droit d’asile, dans l’espoir de limiter le nombre de demandes et d’accélérer leur traitement.

• En Allemagne, la réforme a 1993. Elle a d’abord concerné les lois fondamentales ; le principe selon lequel les persécutés politiques jouissent de l’asile a été complété par des dispositions permettant d’exclure certaines catégories des demandeurs du droit d’asile.

La réforme constitutionnelle a permis l’adoption d’une nouvelle loi sur la procédure d’asile. Elle définit quelques cas, dans lesquels la demande d’asile est présumée manifestement infondée et donc examinée selon une procédure simplifiée.

Cette réforme a été transposée dans la loi française, par une Ordonnance n° 2004-12.48 du 24 novembre 2004.

• La loi belge de 1980 sur les étrangers a été amendée à de nombreuses reprises, depuis son entrée en vigueur.

En ce qui concerne le droit d’asile, les principales modifications ont été adoptées en 1993 et en 1996.

L’évolution s’est notamment traduite par l’élargissement des motifs d’irrecevabilité, ces derniers se rapportant de plus en plus au fond de la demande.

• En 1994, l’Espagne a profondément réformé sa loi de 1984 sur l’asile, essentiellement pour pouvoir rejeter rapidement les demandes injustifiées ou fondées sur des déclarations fausses.

• Aux Pays-Bas, des dispositions relatives au droit d’asile sont contenues dans la loi de 1965 sur les étrangers. Elle a été revue plusieurs fois depuis son entrée en vigueur.

Les Pays-Bas sont, grâce aux modifications adoptées en 1993, 1994 et 1995, parvenus à mettre en place un dispositif calqué sur le modèle allemand.

Cherchant à simplifier la procédure d’asile, le Royaume-Uni (Grande-Bretagne) a, en 1993 et 1996, légiféré sur cette question, d’abord en généralisant le droit de recours, puis en créant une procédure d’appel accélérée, applicable dans certains cas seulement.

• En Italie, c’est la loi de 1990 sur les étrangers qui régit le droit d’asile.

Cependant, un projet de loi -déposé au Sénat, en septembre 1997- a été adopté. Son principal objectif consiste à accélérer le traitement des demandes par l’introduction d’une procédure de pré-examen permettant de rejeter une partie des demandes.

2.1 Points communs entre les différentes réformes

Toutes les réformes présentent de nombreux points communs. Les plus importantes sont :
  • la multiplication des procédures préalables d’examen de la recevabilité, permettant de rejeter une partie des demandes, avant l’examen au fond ;
  • les obstacles mis à l’entrée rapide des postulants dans le pays, dont une demande d’asile, afin de limiter les détournements ;
  • l’expulsion, sans délai, des demandeurs déboutés.


Les nouvelles législations ont toutes pour but d’éliminer une partie des demandes en réexamen au fond, ce qui produit bien sûr des déboutés du droit d’asile.

Telle est la première source de production des déboutés du droit d’asile.

En effet, le motif de la demande est désormais analysé dès la phase de la recevabilité.

Si le vocabulaire diffère d’un pays à l’autre (vérification de la recevabilité, pré-examen, étude de l’admissibilité, examen du fond), tous les textes comportent des règles permettant de rejeter rapidement une partie des demandes : le principe du pays de « premier asile » et la notion de demande manifestement infondée.

Le principe du pays de premier asile a été consacré par les accords de Schengen. Ces accords établissent la responsabilité d’un seul des pays à cette convention pour l’examen des demandes.

En conséquence, les demandeurs peuvent être renvoyés où ils sont arrivés en premier lieu.

La notion de « réfugié en demande manifestement infondée » n’est pas la même dans tous les pays, mais l’expression recouvre à la fois des demandes frauduleuses (papiers falsifiés, demandes fondées sur des déclarations fausses…) et celles qui ne correspondent pas aux critères de la reconnaissance de la qualité de réfugié, énoncés par l’article 1er de la Convention de GENEVE.

Les demandes, présumées manifestement infondées, sont examinées selon une procédure accélérée, dite aujourd’hui la « procédure prioritaire » à l’issue de laquelle les postulants sont rapidement expulsés, même s’ils peuvent bénéficier d’un droit de recours.

2.2 Les pays dits « sûrs »

Parmi les demandes manifestement infondées, il convient de faire une place particulière à celles qui sont ainsi qualifiées en raison du pays d’origine du postulant.

En effet, si plusieurs pays évoquent l’absence de justification de la demande par rapport à l’article 1er de la Convention de GENEVE, l’Allemagne, les Pays-Bas, le Royaume-Uni ont établi une liste des pays d’origine sûre, que la France a fini par adopter à son tour et la confier à l’OFPRA.

Ainsi, le Conseil d’Administration de l’OFPRA détermine par une liste rendue publique, les pays dits d’origine sûre.

Aucun des pays que les kurdes fuient (à savoir la Turquie, l’Iran, l’Irak et la Syrie) ne font heureusement pas encore parties de cette liste dite de « pays sûrs ».

Le problème se pose essentiellement pour le kurde en provenance de GEORGIE.

Effectivement, il s’agit des kurdes de confession yézide en provenance, soit de l’Arménie, soit de la GEORGIE.



Le demandeur débouté :
  • soit parce que sa demande a été considérée comme irrecevable,
  • soit parce que l’asile aura été refusée à l’issue de la procédure normale d’examen,doit quitter rapidement le pays.


3. Irrecevabilité de la demande et délais

Lorsque la décision est consécutive à l’irrecevabilité de la demande, elle doit être exécutée très rapidement dans un délai inférieur à une semaine en général.

De plus, les recours déposés contre de telles décisions, lorsqu’ils sont possibles, sont le plus souvent non suspensifs d’effet.

Lorsque les dossiers sont examinés au fond, selon la procédure normale, et qu’ils sont finalement rejetés, le délai dont dispose le demandeur débouté, pour quitter le pays, est plus long.

Les lois allemandes, néerlandaises et françaises offrent le délai d’un mois.

Dans tous les pays, le demandeur peut déposer un recours contre la décision de rejet.

En l’Espagne, ce recours n’est pas suspensif d’effet. Il en va de même aux Pays-Bas où le recours n’est, en principe, pas suspensif à moins que la décision de rejet ne l’indique expressément. Pour ne pas être expulsé, le demandeur débouté peut cependant présenter une requête en vue d’une mesure provisoire.

De même, le projet de loi italien prévoit que le demandeur débouté puisse saisir le tribunal administratif régional et demander un permis de séjour pour des raisons de justice, car le recours auprès du Tribunal administratif n’a pas d’effet suspensif.

En revanche, en Allemagne, en Belgique et au Royaume-Uni, le demandeur débouté ne peut pas être expulsé tant que son recours n’a pas été examiné.

Le caractère suspensif du recours en Belgique et au Royaume-Uni doit cependant être tempéré.

En effet, en Belgique, le demandeur débouté de façon définitive peut être mis en détention pendant une période de deux mois. Ce délai peut être finalement prolongé pour finalement atteindre huit mois.

Il en va de même au Royaume-Uni où le demandeur débouté peut voir la durée de son titre de séjour provisoire raccourci, sans pouvoir exercer de recours contre cette décision. Le demandeur débouté peut alors être placé en détention.

Demande de droit d’asile en France

1. La législation – textes en vigueur

En France, le droit d’asile est régi par la loi du 25 juillet 1952, dite loi relative au droit d’asile, qui a été modifiée par la loi du 11 mai 1998.

La législation française prend en considération bien sûr la Convention de GENEVE du 28 juillet 1951.

Cette loi de 1952 a subi plusieurs modifications dont il n’y a pas lieu de toutes les rappeler ici. Toutefois, il convient de savoir que la loi française, en dehors de prendre en considération les conventions internationales que la France a ratifiées, subit la législation communautaire qui est celle d’une coopération intergouvernementale.

En ce sens, il convient de rappeler simplement quelques textes essentiels, à savoir :
  • la Convention de Schengen signée le 19 juin 1990 entre les six Etats de l’espace Schengen ;
  • la Convention de Dublin du 15 juin 1990 entre les quinze Etats membres de la Communauté ;
  • la résolution du 20 juin 1995, relative aux garanties minimales pour la procédure d’asile ;
  • la résolution du 26 juin 1997, concernant les mineurs non accompagnés ;
  • ou la position commune du 4 mars 1996 relative à l’application harmonisée de la définition du terme de « réfugié », au sens de l’article 1er de la Convention de GENEVE ;
  • le règlement du 11 décembre 2000 du Conseil (J.O. Comité Européen n° N.316,15 Des.P.1) relatif aux fichiers Eurodac, qui est entré en vigueur le 15 janvier 2003 ;
  • le règlement CEE (n° 343.2003 du Conseil du 18 février 2003) établissant les critères et le mécanisme de détermination de l’Etat responsable de l’examen d’une demande d’asile, présentée dans l’un des Etats membres par un ressortissant d’un pays tiers ;
  • la directive du Conseil du 27 janvier 2003, relative à la demande minimale pour laquelle le demandeur d’asile dans les Etats membres -dont les Etats pourront, s’ils le souhaitent, en étendre le bénéfice aux demandeurs d’autres formes de protection- ; cette directive a eu pour résultat une transposition du 31 décembre 2004 ;
  • ou encore le règlement de la Communauté Européenne n° 491-2004 du Parlement et du Conseil du 10 mars 2004, établissant un programme d’assistance technique et financière en faveur des pays tiers, dans les demandes d’immigrants et de l’asile ;
  • la directive du 29 avril 2004, relative à des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié, dans les Etats membres.


La législation française en matière d’asile, à savoir la loi du 25 juillet 1952, a subi des modifications et des réformes importantes.

Une première réforme de l’asile en profondeur a été réalisée par la loi du 10 décembre 2003. Cette loi a été promulguée le 10 décembre 2003 et est entrée en vigueur le 1er janvier 2004.

Un décret du 23 juillet 1998 a introduit dans la législation française, l’asile territorial.

Un décret du 14 août 2004 a substitué à cet asile territorial, une nouvelle protection dite « asile subsidiaire ».

Enfin, la loi de 1952 relative à l’asile et l’Ordonnance du 2 novembre 1945 ont été codifiés par une Ordonnance du 24 novembre 2004.

Nous avons, à présent, un Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile, qui régit le régime juridique des demandeurs d’asile et des déboutés du droit d’asile.

2. Application des textes

Le terme même du débouté de droit d’asile n’est consacré par aucun texte légal ou juridique.

C’est une appellation courante permettant de dire que le statut de réfugié politique n’est pas reconnu au demandeur.

Ceci étant, la première source de rejet vient du fait que le demandeur voit sa demande qualifiée de « manifestement infondée ».

L’article 741-4 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile a instauré a instauré deux types de procédure, prévus par la loi du 10 décembre 2003, qui font que le demandeur ne bénéfice pas d’un droit au séjour provisoire pour l’un des motifs énoncés.

D’une part, soit il vient d’un pays dit d’origine sûre. Est considéré comme un pays d’origine sûre, un pays qui veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l’Etat de droit, ainsi que des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Il appartient à l’OFPRA d’en établir la liste en attendant une définition communautaire.
  • à des raisons de police ;
  • lorsque la présence de l’étranger constitue une menace grave pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l’Etat ;
  • au caractère frauduleux, abusif ou dilatoire de la demande.


De ces trois catégories de motif, celui relatif au pays d’origine sûre constitue l’une des innovations de la loi 2003, puisqu’il introduit ce contexte inconnu jusqu’alors en droit français, mais déjà retenu dans un certain nombre d’Etats notamment européens, ainsi que dans le cadre communautaire par le protocole « AZNAR », annexé au traité d’Amsterdam et par la proposition de directive « Procédure article 30 ».

Toutefois, la définition qu’elle en donne contraste avec la définition communautaire par son caractère général et succinct.

Lorsque l’OFPRA statue en procédure prioritaire, l’instruction de la demande est enfermée dans un délai de 15 jours, ramené à 96 heures, lorsque le demandeur est en rétention.

Des délais aussi brefs ne sont guère compatibles avec les garanties d’un examen individuel qui peut être complexe, notamment pour les ressortissants des pays dits d’origine sûre.

Selon un rapport d’activité de l’Office, pour 2003, l’OFPRA a été saisi de 5.223 demandes en procédure prioritaire, soit 6 % du total, contre 4.388 en 2002, soit 8,3 %.

Demande de réexamen

Une seconde possibilité au débouté du demandeur d’asile est de faire une demande de réexamen de son cas.

La recevabilité d’une demande de réexamen est subordonnée à deux conditions :
  • la première est que l’intéressé doit invoquer des faits intervenus postérieurement à la précédente décision du Directeur de l’OFPRA ou de la CRR ;
  • en second lieu, ces faits nouveaux doivent avoir des conditions d’incidence sur les craintes de persécution du demandeur.




Perte de la qualité de réfugié

En dehors des déboutés du droit d’asile qui n’ont pas eu accès à ce statut, il y a aussi ceux qui ont perdu ce statut en raison de changement des circonstances.

La perte de la qualité de réfugié concerne ceux qui sont exclus du droit d’asile pour diverses raisons :
  • soit il existe une autre protection,
  • soit ils bénéficient de la protection d’un autre Etat,
  • soit il est prouvé qu’ils ont eu un comportement indigne de la protection internationale qui est prévu à l’article 1.9 de la Convention de GENEVE relative au droit d’asile,
  • soit ils ont commis un crime contre la paix (crime de guerre ou crime contre l’humanité),
  • soit ils ont commis un crime grave de droit commun,
  • soit ils ont eu des agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies.


A notre connaissance, il y a eu seulement deux cas kurdes de ces exclusions, qui concernaient des crimes contre la paix ou crimes contre l’humanité en tant de paix et des crimes graves de droit commun, ayant pour victimes des populations civiles.

Dans ces cas là et tout cas en conséquence de ces décisions intervenues, le débouté du droit d’asile n’a aucun statut à ce titre.

C’est un simple étranger en situation irrégulière sur le territoire nationale et c’est la législation relative aux étrangers en situation irrégulière qui est appliquée.

En ce sens, le débouté de droit d’asile, qui est invité à quitter le territoire national suite à un refus de séjour, dans un délai d’un mois, qui n’a pas quitté le territoire, fait l’objet d’un arrêté de reconduite à la frontière, en général vers le pays dont il a la nationalité.

Dans ce cadre là, le réfugié a le droit de saisir le Tribunal Administratif :
  • contre l’arrêté de reconduite à la frontière
  • et contre le pays de destination (le pays dont il a la nationalité).


L’arrêté de reconduite

Concernant l’arrêté de reconduite, il y a deux possibilités pour le débouté :
  • d’une part, c’est de prouver qu’il y a une illégalité externe de la décision, à savoir soit l’incompétence de l’autorité,
  • ou alors il y a une erreur manifeste d’appréciation de la Préfecture relative à la situation de la personne.
Le pays de destination

Concernant le pays de destination, c’est la protection assurée à tout citoyen par la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme, notamment sur l’article 8 qui dispose qu’aucune personne ne sera exposée à des traitements inhumains, cruels et dégradants.

Mise en rétention

L’étranger, arrêté en situation irrégulière, bénéficie de la protection judiciaire établie par la loi.

Arrêté dans ces circonstances, le débouté du droit d’asile, comme tout étranger en situation irrégulière, fait l’objet en général d’une garde à vue de 24 heures, à la fin de laquelle l’arrêté de reconduite à la frontière lui est notifié. Il est mis fin à sa garde à vue et il est remis aux autorités administratives, qui le transfèrent dans un centre de rétention.

Dans ce centre, il a le droit, s’il n’a pas fait encore de demande d’asile, de présenter une demande d’asile qui fera l’objet d’une procédure dite prioritaire, pour laquelle l’Office est saisie d’urgence et a 96 heures pour se prononcer après l’enregistrement de cette demande.

Dans la pratique, il faut savoir que 95 % de ces demandes sont rejetées.

Dans le cadre de cette procédure dite « prioritaire », le recours devant la Commission contre la décision de l’OFPRA n’est pas suspensif d’effet et il arrive, très souvent, que l’étranger qui a même exercé un recours devant la Commission est déjà été reconduit dans son pays d’origine, alors que son recours est enregistré et qu’il est convoqué devant la Commission.

La légalité de la mise en rétention est, elle, contestée devant le Juge des Libertés et de la Détention.

Il y a donc toute une garantie judiciaire qui l’entoure, le but étant de renvoyer l’étranger vers son pays d’origine.

Un accord de son pays via son ambassade étant nécessaire, si l’étranger n’est pas renvoyé au bout de 32 jours de rétention, il est mis en liberté purement et simplement.

Il entre alors dans une zone de non droit car, à par de prendre connaissance de faits nouveaux le concernant personnellement, il peut toujours s’adresser à la Préfecture pour une demande de réexamen.

A notre connaissance, la loi n’a pas limité le nombre de demandes qui, dans la pratique, dépasse rarement trois fois.

3. Le demandeur d’asile kurde

Le débouté de demande d’asile était, à partir de 1996, notamment des kurdes d’Irak et actuellement les kurdes yézides, en provenance de l’ex-République soviétique notamment de la GEORGIE.

Une tendance d’apparition récente nous fait croire que désormais les kurdes de Turquie se trouvent dans la même situation.

3.1 Kurdes d’Irak

En ce qui concerne les kurdes d’Irak, il convient de noter ici que la plupart d’entre eux n’était que de transit en France, refusait de présenter une demande d’asile ou alors le faisait sous une fausse identité, car leur but était d’atteindre l’Angleterre.

Le nom de Sangatte est connu de vous tous. Il n’y a pas lieu de le rappeler. Il s’agissait en un mot d’un centre d’hébergement dit « centre de demandeurs d’asile ».

Mais, en réalité, peu d’entre eux demandait l’asile car, disaient-ils, « on n’a pas la garantie de l’obtenir en France ».

Mais au-delà de cela, depuis le pays d’origine, ces personnes avaient pour but d’atteindre l’Angleterre pour des raisons tenant à la présence de membres de leur famille dans ce pays ou de l’existence d’un statut dit humanitaire.

L’Angleterre a durci, à son tour, sa législation et la Convention de Dubin permettant aujourd’hui de renvoyer les personnes vers le pays de la première demande.

Les circonstances ayant changé en Irak, leur nombre de kurdes en provenance de ce pays a considérablement chuté pour se réduire à un millier de personnes au grand maximum.

Le changement intervenu dans ce pays, l’instauration d’un gouvernement régional kurde, l’existence d’un Parlement et surtout la possibilité aujourd’hui de retourner directement par des voies aériennes dans ce pays, a fait que la plupart d’entre eux a renoncé volontairement à ce statut précaire et est retournée dans leur pays d’origine.

D’autres se sont vus régularisés leur situation par des accords passés entre la France et l’Angleterre, au moment de la fermeture du centre de Sangatte.

Cette population kurde originaire d’Irak se trouvant dans la situation de débouté du droit d’asile peut raisonnablement s’estimer à quelque 500 ou 600 personnes au grand maximum qui, encore une fois, il faut le rappeler demande dans leur majorité de partir en Angleterre, d’où la faiblesse de leur récit et l’absence de justification de leurs craintes de persécution dans la partie kurde du pays.

Jusqu’au mois de mars 2003, avant le changement du régime, comme vous le savez, une partie du territoire kurde -notamment Kerkuk de Ronatim Mussoul- et la montagne de Singar où vit une communauté importante kurde-yézide étaient encore sous le contrôle du régime. Les personnes en provenance de ces régions pouvaient encore, du fait de leur impossibilité d’atteindre la zone kurde au Nord, prétendre au statut de réfugié, en raison de leurs craintes de persécution dans le pays d’origine.

Aujourd’hui, les changements intervenus et la passation de ces régions, sous le contrôle kurde, font que leurs demandes ne sont plus prises en considération ou elles le sont avec les circonstances actuelles. Les déboutés du droit d’asile concernent essentiellement cette population d’Irak.

3.2 Kurdes en provenance de l’ex-URSS

En ce qui concerne les kurdes en provenance de l’ex-URSS, l’OFPRA -et surtout la Commission de Recours des Réfugiés- tend à reconnaître dans l’ensemble le fait qu’il y a une persécution généralisée à l’égard de cette minorité jusqu’à un récent rapport du mois de mars 2003, qui conclut à l’absence de politique de persécution de la minorité yézide en GEORGIE.

Une décision du mois de mai 2005 du Conseil d’Administration de l’OFPRA a reconnu la GEORGIE comme un pays sûr, en raison du changement démocratique intervenu dans ce pays.

Ceci étant, alors même que la GEORGIE a tendance à devenir un Etat de droit, le gouvernement géorgien n’a toujours pas la main mise sur sa propre administration et cette administration se livre, à coup sûr, à harceler, persécuter et racketter cette minorité, qui était dans le temps estimée à 120.000 personnes et qui se voit réduite aujourd’hui à environ 30.000 personnes au grand maximum.

La particularité de ces demandeurs est qu’ils viennent -contrairement aux kurdes d’Irak ou d’Iran, qui étaient dans leur majorité des célibataires ou des personnes mariées mais ayant laissé femme et enfants derrière eux- en famille complète.

Leur récit est convenu, voire typique, ce qui enlève toute crédibilité à leur récit.

Leur demande étant appréciée au cas par cas, un nombre important d’entre eux a obtenu le statut de réfugié.

Aujourd’hui, leur situation correspondrait plus à la protection dite subsidiaire qui est justifiée par le fait que, aussi démocratique soit-il, le gouvernement géorgien n’arrive pas ou n’est pas en mesure d’assurer actuellement une protection à tous ses citoyens en contrôlant mieux son administration.

3.3 Kurdes en provenance de Turquie

En ce qui concerne les kurdes de Turquie, sans que la politique de la France change à ce sujet et alors même que l’Office n’a pas considéré, dans ses dernières décisions, la Turquie comme un pays sûr, il est indéniable que depuis 1999 :
  • d’une part, en raison du retrait des forces armées du PKK,
  • et d’autre part, sous la cessation de certains statuts, exceptions par le législateur turc sous la pression européenne,


une amélioration certaine de la condition de vie quotidienne de la population civile kurde est à relever.

Les déboutés du droit d’asile originaires de la Turquie et notamment d’origine paysanne, dans leur majorité, sont des victimes de la campagne de destruction de la paysannerie kurde par l’armée turque, qui ne trouve toujours pas le moyen de retourner dans leur pays d’origine.

Mais on voit arriver notamment des intellectuels, des militants politiques, dont les demandes sont, en général, entendues. L’Office et la Commission de Recours accordent encore le statut de réfugié à des militants politiques kurdes, originaires de Turquie.

3.4 Kurdes en provenance de Syrie et d’Iran

La question du débouté de droit d’asile se pose nettement en ce qui concerne les kurdes de Syrie et d’Iran, qui constituent le nombre le moins signifiant de demandeurs d’origine kurde en France.

Il convient ici de rappeler qu’il serait juste :
  • que le gouvernement français accorde une attention particulière aux kurdes en provenance de GEORGIE, d’IRAN et de la SYRIE ;
  • et que les demandes des kurdes de Turquie, en ce qui concerne le renvoi des personnes vers leur pays d’origine, se fassent de manière plus étudiée.


(*) Avocat au barreau de Paris, France