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POINT SUR LA SITUATION EN TURQUIE

CILDEKT
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Liste
NO: 121

7/1/1999

  1. .
  2. LE PAPE A EXPRIMÉ SA SYMPATHIE AU PEUPLE KURDE DANS SON MESSAGE DE NOEL
  3. L'ARMÉE DEMANDE LA FORMATION D'UN GOUVERNEMENT "DANS LES PLUS BREFS DÉLAIS"
  4. LES KURDES DÉPLACÉS NE CROIENT PAS AUX PROMESSES DE RETOUR DANS LEURS VILLAGES
  5. QUE SONT DEVENUS CES DISPARUS ?
  6. TURQUERIES: MME ÇILLER SE REND SUR LA TOMBE D'ATATURK POUR SE PLAINDRE DU PRÉSIDENT DEMIREL
  7. SESLON UN BILAN OFFICIEL TURC DE 1998, PLUS DE 1840 GUÉRILLEROS DU PKK TUÉS PAR L'ARMÉE TURQUE
  8. PARIS: CONDAMNATION DE 15 KURDES ACCUSÉS D'APPARTENANCE AU PKK
  9. NOUVELLE CRISE DANS LES RELATIONS TURCO-SUISSES
  10. WASHINGTON REFUSE DE GARANTIR UN PRÊT DESTINÉ À FINANCER LA VENTE DE BLINDÉS AMÉRICAINS À LA POLICE TURQUE
  11. Le DESTIN DE QUELQUES JEUNES EN TURQUIE


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LE PAPE A EXPRIMÉ SA SYMPATHIE AU PEUPLE KURDE DANS SON MESSAGE DE NOEL


À l'occasion de son message de Noël, vendredi 25 décembre 1998, le Pape Jean Paul II a consacré une place particulière aux problèmes du Proche et Moyen-Orient en apportant son encouragement à "ceux qui s'emploient à apporter un apaisement à la douloureuse situation au Moyen-Orient, dans le respect des engagements internationaux ()" puis a ponctué en saluant "cordialement tous les peuples, spécialement le peuple kurde". La question kurde était au cur du message papale alors que le sort du chef du parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), Addullah Ocalan, n'est pas encore reglé. Le président du Conseil italien, Massimo D'Alema, a estimé, mardi 5 janvier, qu'en restant en Italie, ce dernier risquait d'y être jugé. M. D'Alema a précisé qu'un tribunal rendrait un jugement dans les 20 prochains jours sur le cas Ocalan à partir des documents adressés par Ankara aux autorités italiennes. "Si le tribunal trouve qu'il existe des raisons de juger Ocalan, le procès pourrait avoir lieu ici D'ici là, Ocalan est un homme libre et peut s'il le souhaite prendre un avion et quitter le pays" a déclaré le chef du gouvernement italien.

L'ARMÉE DEMANDE LA FORMATION D'UN GOUVERNEMENT "DANS LES PLUS BREFS DÉLAIS"


Tandis que la crise gouvernementale provoquée par la démission du Premier ministre Mesut Yilmaz pour "liens avec la mafia" entrait dans sa 43ème journée l'état-major a, le 5 janvier, appelé publiquement la classe politique à se ressaisir et à "former dans les plus brefs délais un gouvernement". Comme cet appel soulignait également le danger islamiste, l'injonction des généraux devenait limpide: formation d'un cabinet excluant le parti islamiste de la Vertu.

Mme Çiller invoquait "un complot contre le Parlement" a donné l'aval de son parti (DYP) à une coalition minoritaire dirigée par Bulent Ecevit, chef nationaliste du petit Parti de la Gauche Démocratique (DSP) bénéficiant des faveurs de l'armée alors qu'il y a quelques semaines elle rejetait catégoriquement un telle "solution anti-démocratique". Le député Y. Erez, chargé par le président turc de former un cabinet a, le 6 janvier, aussitôt présenté sa démission. Le président Demirel devrait nommer "dans les plus brefs délais " M. Ecevit Premier Ministre.

Pour Deniz Baykal, chef du Parti Républicain du Peuple (CHP), le président turc ne remplit plus que le rôle d'un notaire établissant sans les formes les instructions venant d'ailleurs (c'est-à-dire de l'armée).

LES KURDES DÉPLACÉS NE CROIENT PAS AUX PROMESSES DE RETOUR DANS LEURS VILLAGES


Interrogé par un parlementaire islamiste (Parti de la Vertu- FP) à propos de la région kurde en Turquie régie par un régime d'exception où des millions de Kurdes ont été déplacés, le ministre turc de l'intérieur, Kutlu Aktas, a donné quelques chiffres sur la situation. Selon M. Aktas sur 11 préfectures sous le régime d'état d'exception (OHAL) comprenant 55 303 foyers, 830 villages et 2 363 hameaux, 385 262 personnes ont été contraintes à l'exode du fait de la situation régionale [NDLR: selon le rapport établi en 1998 par la commission parlementaire sur la migration en Turquie, le chiffre de villages et hameaux évacués est de 3824 et le nombre de déplacés tourne autour de 3 millions]. Divers projets et actions annoncés à partir de 1995 pour "encourager" le retour de ces familles entassées dans les bidonvilles des métropoles dans des conditions de misère extrême ont eu un effet marginal, puisque seules 24 451 personnes seraient de retour sur leurs terres. Dans cette région où l'armée et la police font la loi et où règnent l'arbitraire et la terreur les paysans kurdes chassés de leurs villages ne croient guère aux déclarations des autorités civiles et attendent la paix pour se risquer à retourner dans leurs foyers détruits.

QUE SONT DEVENUS CES DISPARUS ?


A l'instar des Mères de la Place de Mai en Argentine, depuis le mois de mai 1995, des mères, appelées "les folles de samedi ", se réunissent inlassablement chaque samedi devant le lycée français Galatasaray à Istanbul afin d'avoir une réponse à cette question cruelle: "Où sont nos enfants ? ". Jusqu' aujourd'hui aucune action n'avait pu durer aussi longtemps et marquer l'actualité quotidienne de la Turquie. Selon les sources officielles turques près de 560 personnes sont portées disparues et pourtant le directeur général de la Sûreté continue à affirmer qu'il n'y a aucun disparu.

Nimet Tanrikulu, membre fondateur de l'Association turque des Droits de l'Homme (IHD), a contredit ces affirmations en soulignant l'apparition de disparitions depuis le coup d'état militaire de 1980: "Selon nos estimations ce nombre dépasserait les 2000. Le monde entier est d'accord pour dire que les disparitions après garde à vue sont les plus importantes violations des droits de l'Homme. Or dans notre pays il y a encore des centaines de mères qui ne savent pas ce qu'il est advenu de leurs enfants () Notre volonté est un éclaircissement sur le sort des disparus et la sanction des coupables" a-t-il dit.

Depuis le début de leur protestation c'est à dire plus de 190 semaines, "les mères du samedi " n'ont jamais eu d'autorisation pour se rassembler. Ces dernières semaines la police les emmenait en garde à vue avant le début de chacune de leur manifestation. Pour le premier samedi de l'année 1999 la présidente de l'IHD d'Istanbul M. Eren Keskin, avocate de formation, et 5 "mères du samedi " ont été mises à l'écart par les forces de police.

Pendant ce temps l'appel lancé par le CILDEKT et la Fondation France-Libertés continue à recueillir le soutien de nombreuses personnalités pour qu'un des protagonistes-clé de cette politique de disparition et d'assassinats politiques, l'ambassadeur turc à Paris, S. Koksal, réponde de ces actes.

·L'association Reporters Sans Frontières (RSF) dénonce la condamnation d'un journaliste turc. L'éditorialiste turc, Nuredin SIRIN, a été condamné le 18 décembre dernier pour "incitation à la haine et à la discrimination raciale par voie de publication", concernant un article paru le 15 juin 1997 sur la question kurde. Ce dernier avait écrit: "Il faut être du côté de l'oppressé, même s' il est athée ".

Dans un communiqué rendu public le 30 décembre 1998, RSF a dénoncé la condamnation du journaliste, en soulignant, que cette décision de justice est contraire à l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'Homme, dont la Turquie est signataire, qui protège " la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques ". Cette liberté vient d'être sérieusement bafouée par la décision du préfet de la région d'état d'exception (OHAL) d'interdire la diffusion sur tout le territoire de cette région kurde du quotidien turc de gauche Yeni Evrensel accusé, d'incitation à la haine raciale et au séparatisme. Ce quotidien diffusé librement dans le reste de la Turquie est ainsi interdit dans les provinces kurdes sur une simple décision administrative.

TURQUERIES: MME ÇILLER SE REND SUR LA TOMBE D'ATATURK POUR SE PLAINDRE DU PRÉSIDENT DEMIREL


La Turquie est officiellement un Etat laïc mais dans les faits c'est une théocratie dont la divinité tutélaire se nomme Ataturk, le Temple son mausolée d'architecture musolinienne à Ankara, et la religion "les principes éternels d'Ataturk" inscrits dans le préambule de la Constitution et enseignés dans toutes les écoles et casernes. Les gardiens du Temple sont les fameuses "institutions de l'État" c'est-à-dire l'armée, la police politique (MIT), les cours de sûreté de l'État et leurs prolongements dans les média, l'Université et les partis de l'État. Le culte officiel et obligatoire d'Ataturk exige qu'à chacune des dates significatives de la vie du "père des Turcs" (les anniversaires de naissance et de mort, et de sa geste les 23 avril, 19 mai , 30 août, 31 octobre, etc.), à chaque changement de dirigeants civils ou militaires, tout ce monde se rende en grande pompe au mausolée d'Ataturk pour lui exprimer respects et fidélité. Les hommes d'État étrangers en visite et les ambassadeurs en poste à Ankara doivent également se prêter à cet exercice obligé. Cependant, Mme Çiller est en train de donner une nouvelle dimension à ce culte, en transformant le mausolée d'Ataturk en un mur de lamentation. En effet, le 27 décembre, accompagnée par une forte délégation de députés de son parti (DYP) elle s'est rendue sur la tombe d'Ataturk pour se plaindre des écarts de conduite du président Demirel. Selon elle, en nommant comme Premier ministre d'abord B. Ecevit, chef du quatrième parti politique du pays, ensuite un simple député, Y. Erez, transfuge du DYP, "le président Demirel s'écarte de la voie du Grand Ataturk". Elle s'est plainte amèrement à celui-ci, suppliant son aide.

Face à cet événement national médiatisé le président Demirel a dû répliqué publiquement (Hurriyet du 25-12-1998): "Il ne suffit pas de se rendre auprès d'Ataturk pour prétendre être de vrais ataturkistes. Elle (Mme Çiller) devrait y renouveler sa foi et se purifier!".

Tout cela se passe dans un pays de l'OTAN, membre du Conseil de l'Europe et "candidat à l'Union européenne!".

SESLON UN BILAN OFFICIEL TURC DE 1998, PLUS DE 1840 GUÉRILLEROS DU PKK TUÉS PAR L'ARMÉE TURQUE


Selon les chiffres annoncés par les autorités turques, 1843 rebelles du PKK et 311 membres des forces de sécurité turques, ont été tués lors des opérations menées en 1998. En septembre 1998, le PKK a annoncé une trêve unilatérale et inconditionnelle que les autorités turques ont catégoriquement rejetée. À deux reprises, en mars 1993 et décembre 1995, le cessez-le-feu unilatéral n'avait duré que quelques mois. La guerre menée dans la région a fait près de 37000 depuis 1984. Par ailleurs, l'état-major des armées a qualifié d'affabulations sans fondement les déclarations récentes des dirigeants du PKK selon lesquelles il y aurait eu "des discussions entre des émissaires turcs et des représentants du PKK, notamment au Pays-Bas en août et septembre 1998".

· Le suicide énigmatique en prison d'un trafiquant de drogue. Huseyin Uzun, un trafiquant de drogue membre d'une bande mafieuse, a été retrouvé, le 26 décembre 1998, pendu dans les locaux de la police d'Istanbul où qu'il s'était rendu de lui même pour faire des révélations sur ses complices. Ce dernier avait accusé nommément de hauts responsables policiers à Istanbul d'avoir reçu des pots-de-vin des barons de la drogue turcs, dont l'ex-chef du département de narcotique d'Istanbul Ferruh Tankus, limogé mi-décembre [NDLR: cf. bulletin 120].

L'enquête officielle sur son décès conclue au suicide mais l'avocat de Huseyin Uzun réfute cette idée. "Comment quelqu'un qui se pend à un endroit moins élevé que sa taille peut-il être mortellement blessé ? Un suicide devrait ressembler à un suicide " a-t-il souligné. Un homme qui mesure 1,80m a-t-il pu se pendre dans une pièce où la hauteur du plafond atteint 1,5m se demande une partie de la presse tandis que la police observe un mutisme total.

PARIS: CONDAMNATION DE 15 KURDES ACCUSÉS D'APPARTENANCE AU PKK


Le tribunal correctionnel de Paris a condamné, jeudi 17 décembre, pour terrorisme 15 immigrés kurdes à des peines de prison allant jusqu'à cinq ans ferme, sans aucune preuve matérielle de leur culpabilité. Aucun des accusés n'a été reconnu coupable de violences. Après trois ans d'instruction, d'écoutes, de filatures les policiers n'ont rien pu trouver: aucune arme, aucun échantillon d'explosif, tout ceci s'étant retourné contre les accusés comme élément à charge: " Pourquoi il n'y a rien ? Parce que c'est comme ça que ça fonctionne, une organisation clandestine ", a déclaré Anne Obez-Vosgien, substitut du procureur, qui a rédigé son réquisitoire sur la base des accusations de la police turque. L'hebdomadaire humoriste Charlie Hebdo a critiqué cette décision en ces termes: "les 15 hommes ont donc été condamnés au nom de leurs relations présumées avec une société parisienne, Medya, supposée servir de couverture au PKK. Preuve irréfutable: au siège de la boîte, les enquêteurs ont découvert un poster d'Abdullah Ocalan, leader du PKK. Dans cette conception de la justice, tous ceux qui ont, un jour, affiché un poster du Che dans leur chambrette devraient également se retrouver à Fresnes pour "association de malfaiteurs en vue de la préparation à un acte de terrorisme". Avant d'être extradés en Bolivie. Mais ce sont là les méthodes de la justice antiterroriste en France- contre lesquelles la Fédération Internationale des Droits de l'Homme s'apprête à rendre un rapport saignant. Un des "malfaiteurs" kurdes a pourtant échappé au procès. Le 27 octobre 1997, après 18 mois de préventive, Ramazan Alpaslan s'est pendu dans sa cellule. La vieille du jour où le parquet voulait ordonner sa remise en liberté. Décidément, en plus d'être terroriste, le Kurde est fourbe et malin. Il se suicide avant de commettre un attentat. Pour brouiller les pistes".

NOUVELLE CRISE DANS LES RELATIONS TURCO-SUISSES


La compagnie de téléphone privée suisse, BAL CAP, gérant le réseau de câble du canton de Bâle, répondant à la demande de ses clients vient de décider d'inclure la chaîne kurde MED-TV à son réseau câblé et d'en exclure la chaîne turque d'État, TRT-INT, apparemment peu regardée. Cette décision commerciale et privée a provoqué une nouvelle crise dans les relations entre la Turquie et la Suisse, après celle, à peine apaisée autour de la commémoration à Lausanne du 75ème anniversaire du Traité de Lausanne fondement en droit international de l'État turc. Ankara a vivement protesté auprès du gouvernement helvétique car "MED-TV est l'organe de l'organisation de terreur PKK; les émissions de cette chaîne qui est la voix de l'organisation terroriste prenant pour cible la Turquie doivent cesser immédiatement et la chaîne TRT-INT dont reprendre". Les autorités suisses ont promis d'examiner la note turque mais la presse suisse dénonce l'intolérance des Turcs et leur ingérence dans les affaires intérieures de la Suisse. La chaîne publique intérieure suisse SF2 a, dans son journal de soir du 4 janvier souligné "le caractère nationaliste, militaire et intégriste des émissions de TRT-INT" que "MED-TV est à l'heure actuelle la seule chaîne de télévision kurde et que les immigrés kurdes ont aussi droit à leur culture". La prétention turque de vouloir étouffer toute expression kurde jusqu'au cur même de l'Europe agace de plus en plus d'Européens qui, cependant, n'ont pas encore pris l'initiative d'agir en commun.

WASHINGTON REFUSE DE GARANTIR UN PRÊT DESTINÉ À FINANCER LA VENTE DE BLINDÉS AMÉRICAINS À LA POLICE TURQUE


La campagne d'opinion menée depuis plusieurs semaines par des ONG américaines de défense des droits de l'homme contre la vente à la police turque de véhicules blindés américains vient de remporter un important succès.

Le gouvernement américain vient de refuser qu'une telle transaction puisse être financée par l'Exumbank, banque sollicitée pour un prêt de $38 millions par une filiale de General Dynamics, désireuse de vendre 140 véhicules blindés à la police turque, l'Eximbank, dûment alertée par les ONG, avait demandé au Département d'État si une telle transaction ne constituerait pas une violation de la Loi Leahey dans la mesure où certaines unités de la police turque ont été accusées de torture et d'autres violation des droits de l'homme. Le Département d'État lui a demandé de refuser le prêt demandé. La loi Leahey, adoptée en 1996, interdit l'octroi des fonds publics américains pour des transactions susceptibles d'aider des forces de sécurité étrangères impliquées dans des violations des droits de l'homme.

Le DESTIN DE QUELQUES JEUNES EN TURQUIE


Un article paru dans le quotidien turc Milliyet du 3 janvier 1999 évoque le sort de quelques jeunes victimes de la police et de la justice turques:

Dans la première affaire il s'agit d'Umit Kanli, étudiant au Conservatoire à l'Université d'Égée. Quelques jours après les émeutes de Gazi en 1995, Umit est arrêté devant son école et mis en garde à vue pour "détention de pancartes et destruction par cocktail Molotov d'un distributeur d'argent" [NDLR: Alors que le responsable de la banque a affirmé lors du procès que le feu avait pris à cause d'un mauvais contact d'électricité dont les pompiers savaient l'existence de longue date]. Suite aux coups et tortures subis, Umit et un de ses amis Baris Yildirim, sont longuement restés dans le coma et leur santé reste aujourd'hui encore très fragile. Et pourtant, la Cour de Sûreté de l'État les condamnera à 12,5 années de prison au motif d'"appartenance à une organisation illégale".

Dans une autre affaire, Ismail Gokce, lycéen de 15 ans de Nazilli, a été emmené en garde à vue puis condamné à 12.5 années de prison pour "adhésion à un parti illégal", ( compte-tenu de son jeune âge sa peine a été ramenée plus tard à 7.5 années). Quant à Ibrahim Gullu, étudiant à l'université, âgé de 22 ans, une peine de mort est demandée à son encontre alors qu'à sa charge il n'y a que la déposition d'un policier qui prétend avoir été dépossédé de force de son arme par le jeune Ibrahim [NDLR: L'arme en question était introuvable 5 minutes après son arrestation].

Quant aux jeunes de Manisa, qui avaient ouvert une pancarte au Parlement turc pour protester contre le montant des droits d'inscription à l'Université, ils ont chacun écopé de plus d'une dizaine d'années de prison pour "adhésion à une organisation armée" et cela sans aucune preuve matérielle. Aujourd'hui ils accusent les policiers de les avoir sauvagement torturés.

L'affaire Sinan Demirbas, étudiant à l'université d'Elazig, arrêté et assassiné par la police à la suite d'une garde à vue, a eu un dénouement digne de la justice turque. Le commissariat soutenait dans son procès-verbal qu'il avait été victime d'une chute dans les escaliers. Cinq ans après sa mort un policier a avoué l'avoir tué lors de la garde à vue.

Le procès de Baki Erdogan, mort encore à la suite d'une garde à vue en 1993 à Aydin, a pris fin par les condamnations de l'assistant du directeur de la sûreté de la province, du directeur divisionnaire et de 5 policiers, à 7 ans 6 mois et 20 jours de prison. Mais ces derniers sont libres et assurent toujours leur fonction.

Le décès de Serkan Eroglu, trouvé pendu dans les toilettes de son Université, a tout d'abord été présenté comme un suicide, mais le rapport d'autopsie révélant la présence de chloroforme dans son sang a mis en lumière que Serkan avait été endormi puis pendu. Il s'agissait donc d'un assassinat déguisé.

Et enfin plus de trois années se sont écoulées après la mort du jeune journaliste Metin Goktepe, qui a été arrêté, torturé et assassiné à la suite d'une garde à vue. Tous les policiers impliqués dans ce meurtre et identifiés sont libres.