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POINT SUR LA SITUATION EN TURQUIE

CILDEKT
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Liste
NO: 227

18/1/2002

  1. LEYLA ZANA DEMANDE SA LIBÉRATION AVEC SES COLLEGUES
  2. L’OFFENSIVE JURIDICO-POLICIÈRE CONTRE LE HADEP S ‘INTENSIFIE
  3. PLUSIEURS DIZAINES D’INCULPATIONS, MENACES ET EXPLUSIONS POUR LES ÉTUDIANTS ET PARENTS D’ÉLÈVES QUI ONT DEMANDÉ L’ENSEIGNEMENT DE LA LANGUE KURDE
  4. ANKARA, INSENSIBLE À L’ENGLOUTISSEMENT DES SITES HISTORIQUES KURDES PAR LES EAUX DE SES BARRAGES, CRIE À LA BARBERIE APRÈS LA DESTRUCTION D’UNE FORTERESSE OTTOMANE PAR LES SAOUDIENS
  5. ACCORD DE COOPÉRATION MILLITAIRE ENTRE LA TURQUIE ET LA RUSSIE
  6. PROPOSITION DE LOI MALTHUSIENNE AU PARLEMENT TURC


LEYLA ZANA DEMANDE SA LIBÉRATION AVEC SES COLLEGUES


Le député ANAP de Diyarbakir, Sebgetullah Seydaoglu, a, le 16 janvier, déclaré au cours de la réunion de son groupe parlementaire que le temps pour la libération des députés kurdes emprisonnés depuis 8 ans en Turquie, était venu. Interrogé le lendemain par la presse, il a souligné que la situation médicale des anciens députés justifiait leur “ amnistie ”, en précisant que Leyla Zana accepterait cette fois-ci une telle décision si ses collègues bénéficiaient du même sort. “ Je me suis entretenu avec eux, Leyla Zana désire être amnistiée, accompagnée des autres députés kurdes. Si le président Sezer décidait une telle amnistie, L. Zana l’accepterait ” a-t-il déclaré.

L’amnistie de Leyla Zana, qui souffre notamment d’ostéoporose et des problèmes de circulation, avait été à l’ordre de jour en 1998, mais Mme Zana refusant un traitement de faveur par rapport à ses collègues, avaient rejeté l’offre du président turc avant même que la procédure ne soit bouclée.

L’OFFENSIVE JURIDICO-POLICIÈRE CONTRE LE HADEP S ‘INTENSIFIE


Le procureur général turc Sabih Kanadoglu a, le 17 janvier, requis devant la Cour constitutionnelle l'interdiction du parti pro-kurde de la Démocratie du Peuple (HADEP) pour “ liens avec la rébellion kurde armée ”.

M. Kanadoglu a déclaré à la presse après son réquisitoire de plus d'une heure qu'il avait expliqué à la cour en quoi le HADEP était devenu un foyer d'activités attentant à l'unité indivisible de la Turquie, principe posé par la Constitution. “ Nous avons aussi examiné les preuves dans cette affaire et j'ai demandé à la cour d'interdire ledit parti au vu de la gravité, l'étendue et la nature de ses activités ”, a-t-il ajouté.

Dans cette procédure ouverte en janvier 1999, le HADEP est accusé d'être lié au Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK). L'acte d'accusation affirme que le HADEP agit sous les directives du PKK, lui sert d'outil de propagande et que ses bureaux étaient devenus des “ centres de recrutement ” pour gagner les militants à la cause du PKK. Le HADEP, qui prône une solution pacifique à la question kurde, rejette ces accusations. La Cour constitutionnelle doit entendre la défense du HADEP le 30 janvier. Les partis pro-kurdes en Turquie ont régulièrement été interdits par la Cour dans le passé.

M. Kanadoglu a accéléré la procédure en demandant aux juges de se saisir du cas du HADEP le plus rapidement possible en faisant valoir que tout délai serait préjudiciable à l'unité du pays. Une interdiction du parti pro-kurde ne manquerait pas de créer des tensions entre la Turquie et l'Union européenne à laquelle la Turquie est candidate, ce qui requiert de sa part des efforts pour améliorer son désastreux bilan en matière de respect des droits de l'Homme et de la démocratie.

Par ailleurs, trois membres d'une section locale du HADEP ont, le 15 janvier, été écroués à Adana, pour “ assistance à une organisation séparatiste ”. Les trois hommes, interpellés auparavant par la police anti-terroriste, ont été présentés à la Cour de Sûreté de l'Etat qui les a fait incarcérer après les avoir inculpés d' “ assistance à une organisation séparatiste ”, expression qui désigne le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK). Une quinzaine de membres du HADEP avaient été, il y a quelques jours, placés en garde-à-vue dans la même ville d'Adana.

PLUSIEURS DIZAINES D’INCULPATIONS, MENACES ET EXPLUSIONS POUR LES ÉTUDIANTS ET PARENTS D’ÉLÈVES QUI ONT DEMANDÉ L’ENSEIGNEMENT DE LA LANGUE KURDE


Des centaines d’étudiants et d’élèves, ont été, le 14 janvier, poursuivis pour avoir demandé l’enseignement de la langue kurde aux autorités compétentes turques. 17 des 270 étudiants de l’université de Van, qui ont entrepris la démarche auprès du rectorat, restent toujours en détention, alors que les autres ont été libérés jusqu’au procès après avoir été présentés devant la cour de sûreté de l’Etat (DGM).

De nombreux autres étudiants des différentes provinces kurdes et turques ont présenté le même souhait aux rectorats, qui menacent les étudiants d’expulsion pure et simple. La direction de sûreté d’Istanbul, a, quant à lui, décidé le 17 janvier, d’inculper 22 parents d’élèves dont les enfants, encore en primaire, avaient demandé l’enseignement de la langue kurde. Les autorités turques précisent que l’interrogatoire de 60 autres personnes continue à Istanbul.

ANKARA, INSENSIBLE À L’ENGLOUTISSEMENT DES SITES HISTORIQUES KURDES PAR LES EAUX DE SES BARRAGES, CRIE À LA BARBERIE APRÈS LA DESTRUCTION D’UNE FORTERESSE OTTOMANE PAR LES SAOUDIENS


La querelle fait rage entre la Turquie et l'Arabie saoudite, cette dernière ayant fait abattre une forteresse de l'époque ottomane, proche des Lieux saints de La Mecque. La Turquie avait réagi avec colère à cette destruction, il y a quelques semaines, accusant le royaume wahhabite de “ génocide culturel ”, tandis que les ultra-nationalistes turcs avaient brûlé des portraits du roi saoudien. La Turquie, héritière de l'Empire ottoman, a comparé cette destruction à celle des Bouddhas de Bamiyan en Afghanistan par les Talibans, et promis de porter plainte auprès de l'UNESCO.

Lundi 14 janvier, l'ambassadeur saoudien en Turquie Mohammad Al Bassam, affirmant que la forteresse avait été abattue pour accommoder les pèlerins musulmans, a promis que le château d'Ajyad serait rassemblé plus loin. Cette forteresse du XVIIIe siècle avait été abattue pour laisser la place à un centre commercial et résidentiel parmi plusieurs méga-projets en cours pour moderniser la ville sainte de La Mecque, projet d'un coût de 533 millions de dollars, confié à un consortium de trois compagnies, Mecca Construction, Bin Laden Group et Saudi Oger. “ Chaque décision du gouvernement d'Arabie saoudite est prise pour le bien du pèlerinage et pour la sécurité et le confort des pèlerins ”, a déclaré l'ambassadeur, rappelant cependant que le château est propriété saoudienne. L’ambassadeur a d’autre part interpellé ses homologues turcs en déclarant “ la forteresse de Ajyad, construite de pierres et de boue, n’a que 200 ans… Les sites de Zeugma étaient beaucoup plus anciens, mais le gouvernement turc en ne pensant qu’aux intérêts de son peuple, a continué ses projets de construction de barrages… Rappelez-moi pour mémoire, qu’en est-il de la forteresse de Sinopi ? ”

La Turquie, pays musulman mais à l'Etat laïque, a vivement condamné la démolition en annonçant qu'elle envisageait de boycotter partiellement, en signe de protestation, le pèlerinage à La Mecque, où quelque deux millions de fidèles affluent des quatre coins du monde tous les ans.

ACCORD DE COOPÉRATION MILLITAIRE ENTRE LA TURQUIE ET LA RUSSIE


La Turquie et la Russie ont, le 14 janvier, signé un accord de coopération militaire visant à renforcer des relations bilatérales souvent tendues par des accusations mutuelles de soutien à leurs guérillas respectives, kurde et tchétchène. “ Cet accord, signe d'amitié et de coopération entre la Russie et la Turquie, sera un bon exemple pour d'autres pays de la région ”, a souligné le chef de l'état-major de l'armée turque, le général Huseyin Kivrikoglu, avant de le signer avec son homologue russe Anatoli Kvachnine.

L'accord pose la base légale d'une coopération entre les armées russe et turque et sera suivi par d'autres accords et protocoles, a souligné le général Kivrikoglu. Le général Kvachnine a relevé que l'accord contribuerait à renforcer la coopération technique et en matière d'entraînement du personnel militaire. “ Tout ceci sera bénéfique pour nos Etats et nos peuples ”, a-t-il dit.

La Turquie, membre de l'OTAN, et la Russie ont développé d'étroites relations commerciales après l'effondrement de l'URSS, mais leurs relations restent entachées par de fréquentes accusations d'un soutien à des mouvements séparatistes considérés comme “ terroristes ” dans chacun des pays --les Kurdes pour la Turquie et les Tchétchènes pour la Russie.

La Turquie a longtemps accusé la Russie de tolérer la présence du PKK sur son territoire et Moscou reproche à Ankara d'abriter des rebelles tchétchènes, qui ont mené plusieurs opérations de détournement de bateaux et avions ces dernières années à partir de la Turquie. En novembre 2001, les deux pays ont signé un plan d'action pour renforcer la coopération bilatérale incluant la lutte contre le terrorisme.

PROPOSITION DE LOI MALTHUSIENNE AU PARLEMENT TURC


Mail Buyukerman, un député turc connu pour ses idées excentriques a, le 15 janvier, indiqué avoir présenté un projet de loi au gouvernement prévoyant une vasectomie pour les pères de famille de plus de deux enfants. “ Non seulement cela freinera la croissance démographique, mais en plus les couples pourront avoir des relations sexuelles sans craindre une grossesse ”, a expliqué le député indépendant lors d'une conférence de presse au Parlement. Il a précisé avoir soumis son projet de loi au vice-Premier ministre Husamettin Ozkan, qui a répondu “ positivement ” à ses propositions.

Ce projet prévoit de soumettre à une vasectomie les hommes ayant engendré plus de deux enfants. S'ils se montrent récalcitrants, ils devront payer une amende de 20 milliards de livres turques (14.600 dollars environ) ou faire un an de prison, a expliqué le député. Les hommes acceptant la vasectomie après avoir été envoyés en prison ne devront pas purger le reste de leur peine.

Les autorités turques s’inquiètent également de la forte croissance démographique enregistrée dans les provinces kurdes alors que les régions turques marquées par l’urbanisation font face à une chute du taux de natalité.