Publications

Haut

POINT SUR LA SITUATION EN TURQUIE

CILDEKT
 -
Liste
NO: 201

17/5/2001

  1. MASSOUD BARZANI EN VISITE EN TURQUIE
  2. BILAN D’AVRIL 2001 DES VIOLATIONS DES DROITS DE L’HOMME AU KURDISTAN
  3. GRÈVE DE LA FAIM DANS LES PRISONS TURQUES : 22 MORTS
  4. LA COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME CONDAMNE LA TURQUIE POUR 14 VIOLATIONS À CHYPRE
  5. LA COUR DE CASSATION TURQUE CONDAMNE 31 ISLAMISTES À LA PEINDE DE MORT
  6. LU DANS LA PRESSE TURQUE : DRÔLE DE JUSTICE


MASSOUD BARZANI EN VISITE EN TURQUIE


Massoud Barzani, président du Parti démocratique du Kurdistan irakien (PDK), est arrivé le 7 mai, à Ankara pour s'entretenir avec les responsables turcs.

À son arrivée dans la capitale turque, il a déclaré : "Nous allons évoquer les questions qui intéressent les deux parties. Il nous est nécessaire de procéder à un échange de vue de temps en temps avec les autorités turques". Au programme de cette visite : relations économiques et politiques, questions de sécurité frontalière, avenir du régime de sanction, processus de réconciliation PDK-UPK…

À propos de la sécurité frontalière, au terme d'un entretien avec le sous-secrétaire d'Etat turc aux Affaires étrangères Faruk Logoglu, il a indiqué : " Il n'y a pas de changement dans notre attitude envers le PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan). La présence du PKK dans notre région est inacceptable (…) Si le PKK insiste pour être présent dans cette région, nous continuerons à le combattre ".

De plus, M. Barzani a souligné que les relations du PDK avec son rival, l'Union Patriotique du Kurdistan (UPK de Jalal Talabani), se développaient favorablement : " Je souhaite qu'elles puissent contribuer à la reconstruction de la région ". Les deux principaux partis kurdes irakiens se sont récemment mis d'accord sur une série de mesures de confiance comprises dans un accord conclu en septembre 1998 sous les auspices de Etats-Unis, dont l'application était jusqu'ici bloquée par des dissensions.

M. Barzani a également été reçu par le Premier ministre Bulent Ecevit, avec lequel il a évoqué la question de la révision des sanctions internationales imposées à l'Irak, envisagée par les Etats-Unis. Washington souhaite alléger les restrictions sur les produits de consommation à usage civil et durcir celles sur l'équipement et les technologies militaires.

Par ailleurs M. Barzani a également rencontré des responsables du parti turc d’opposition de la Juste Voie (DYP). Au cours de son entretien avec Hasan Ekinci, vice-président du DYP, le député ANAP de Diyarbakir Hasim Hasimi a servi d’interprète à M. Barzani qui à chacune de ses visites en Turquie s’exprime partout en kurde, y compris dans des enceintes officielles et gouvernementales où l’idéologie officielle nie l’existence même d’une langue kurde.

Le PDK contrôle l’important trafic routier entre la Turquie et l’Irak et assure la sécurité de l’oléoduc Kirkouk- Yumurtalik (Turquie) qui traverse son territoire. Le commerce profitable à la Turquie et à l’Irak génère aussi d’importants droits douaniers qui constituent la ressource principale du gouvernement régional kurde. Dans des moments de crise, Ankara menace de " fermer la frontière " et d’asphyxier l’économie kurde irakienne.

BILAN D’AVRIL 2001 DES VIOLATIONS DES DROITS DE L’HOMME AU KURDISTAN


L’Association turque des droits de l’homme (IHD) a, le 10 mai, rendu public son rapport d’avril 2001 sur les violations des droits de l’homme au Kurdistan. En voici les principaux extraits :
  • Nombre de meurtres non élucidés et d’exécutions extrajudiciaires : 3
  • Nombre de morts dans des affrontements : 13
  • Nombre de placements en garde-à-vue : 153
  • Nombre de victimes de tortures et de sévices : 43
  • Nombre d’arrestations : 30
  • Nombre de villages / maisons incendiés : 4
  • Nombre de publications interdites dans la région sous état d’urgence (OHAL) : 17
  • Nombre de pièces de théâtre et de conférences de presse interdites : 4

    GRÈVE DE LA FAIM DANS LES PRISONS TURQUES : 22 MORTS


    Deux nouveaux prisonniers turcs sont décédés, le 7 mai, des suites de leur grève de la faim, le bilan de ce mouvement radical de protestation s'établissant désormais à 22 morts. Les détenus et leurs familles protestent contre un nouveau système pénitentiaire de haute sécurité qui les place, selon eux, en situation d'isolement et de vulnérabilité.

    M. Cafer Tayyar Bektas, membre d'un groupe d'extrême-gauche interdit, s'est éteint dans un hôpital d'Ankara après 200 jours de grève, selon l'Association turque des droits de l'Homme. Un autre militant, Huseyin Kayaci, est mort de son côté dans un hôpital à Izmir après 148 jours de grève. Les deux hommes ne buvaient que de l'eau enrichie de sucre, de sel et de vitamines.

    Environ 250 détenus et de nombreux membres de leur famille sont en grève de la faim depuis l'an dernier pour protester contre leur transfert depuis des établissements traditionnels ayant de grandes cellules collectives vers de nouvelles prisons où les cellules n'abritent qu'un seul détenu, trois dans le meilleur des cas. Selon les grévistes de la faim, ce nouveau système laisse les détenus à la merci des exactions des gardiens. L'Etat estime que l'ancien système permettait aux détenus de gérer eux-mêmes leurs cellules en en faisant des centres d'endoctrinement. Les premiers transferts en décembre ont déclenché des affrontements qui ont fait 30 morts parmi les prisonniers et deux chez les militaires.



    LA COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME CONDAMNE LA TURQUIE POUR 14 VIOLATIONS À CHYPRE


    La Cour européenne des droits de l'Homme, saisie par le gouvernement chypriote grec, a, le 10 mai, reconnu la Turquie coupable de 14 violations sur l'île méditerranéenne, dont la partie nord est sous occupation turque depuis 27 ans. Il s'agit de la 4ème requête interétatique de "Chypre contre la Turquie", mais c'est la première fois que la Cour européenne tranche, les trois plaintes précédentes ayant été traitées par le Comité des ministres, l'exécutif du Conseil de l'Europe.

    Dans cette dernière requête, datant de 1994, Nicosie accusait Ankara d'avoir violé la quasi-totalité des articles de la Convention européenne des droits de l'Homme, tant en ce qui concerne la disparition de près de 1.500 Chypriotes grecs, le déplacement forcé de 211.000 autres, des biens confisqués, que les conditions de vie des Chypriotes grecs restés sur place (restrictions des droits, menaces pour leur sûreté, interdiction des journaux en langue grecque...).

    Lors de l'audience de la Cour européenne, le 20 septembre 2000, le gouvernement turc avait pratiqué la politique de la chaise vide, ne présentant aucun défenseur, une première dans l'histoire de la Cour de Strasbourg, créée en 1959. Ankara avait fait savoir par une source diplomatique qu'il ne se sentait pas concerné par les accusations de Nicosie et il avait renvoyé la responsabilité des faits à la République turque de Chypre du Nord (RTCN) proclamée en 1983 dans le nord de l'île divisée et que la Turquie est seule à reconnaître.

    Les juges de la Cour européenne se sont prononcés par 16 voix contre une pour la responsabilité de la Turquie dans ces violations, qui vont de l'absence d'enquête sur la disparition de Chypriotes grecs à des traitements inhumains infligés aux proches de personnes disparues.

    L'Etat turc est également accusé d'empêcher des Chypriotes grecs originaires du nord de l'île de rentrer chez eux ; de refuser toute compensation pour la perte de propriété, d'interférer dans la liberté de culte ; et de faire subir des discriminations aux Chypriotes grecs vivant sur la péninsule de Karpas, dans le secteur turc.

    Le gouvernement d'Ankara a déjà réfuté ces accusations par le passé, affirmant que le contrôle du nord de Chypre ne relevait pas de ses compétences et que la responsabilité des faits incombait à la seule administration chypriote turque, qui n'est cependant reconnue que par la Turquie.

    Dans son arrêt, la Cour rejette toutefois la plainte chypriote accusant la Turquie de violer d'autres clauses de la Convention européenne des droits de l'Homme, notamment celles relatives à l'esclavage, au travail forcé et à la liberté d'assemblée.

    Les troupes turques ont envahi Chypre en 1974 à la suite d'une tentative de coup d'Etat menée par des Chypriotes grecs partisans du rattachement à la Grèce. À la suite de cette invasion, 180.000 Chypriotes grecs ont fui ou ont été expulsés du nord de l'île, où la Turquie maintient 35.000 hommes pour soutenir le gouvernement local.

    Par ailleurs, des milliers de Chypriotes grecs, qui se sont regroupés dans quelque 80 requêtes dites individuelles, attendent que la Cour européenne statue sur leurs plaintes. Une requête regroupe les 1.000 habitants d'un village, une autre 400, selon un juriste de la Cour.

    LA COUR DE CASSATION TURQUE CONDAMNE 31 ISLAMISTES À LA PEINDE DE MORT


    La Cour de cassation a, le 10 mai, rejeté le pourvoi en cassation de 31 activistes islamistes impliqués dans l’incendie meurtrier en juillet 1993 d’un hôtel à Sivas causant la mort de 37 intellectuels réunis pour célébrer des festivités culturelles alévis. La Cour a cependant cassé l’arrêt pour trois activistes qui devront être rejugés par la Cour de sûreté de l’Etat.

    LU DANS LA PRESSE TURQUE : DRÔLE DE JUSTICE


    Melih Asik, journaliste au quotidien turc Milliyet, dans ses colonnes du 11 mai 2001, dénonce, à partir deux exemples de l’actualité, l’iniquité dont font preuve la justice et les autorités turques, particulièrement lorsque la police et les responsables politiques turcs sont impliqués. Voici son article intitulé " Crime et châtiment !… " :

    " Les quotidiens turcs relataient deux informations différentes dans leurs colonnes d’hier [10 mai 2001]. Le Premier : " À Adana, les 4 policiers ayant mené un raid contre un appartement soupçonné d’abriter des membres d’une organisation interdite et tué par bévue Murat Bektas, un innocent travailleur, ont été condamnés à 6 mois de prison avec sursis ".

    Le second : " Après qu’Ahmet Çakmak, célèbre pour avoir lancé une caisse enregistreuse sur le Premier ministre Bülent Ecevit, a déposé : " je me suis éloigné des lieux ni vu ni connu ", les 11 policiers en fonction sur les lieux ont été suspendus. "

    Récapitulons… Les policiers qui, sans aucune raison, ont tué un simple citoyen restent en fonction. ?

    Les policiers accusés de manquement à leur devoir simplement parce que le Premier ministre reçoit une caisse enregistreuse à 25 mètres de lui, sont, eux, suspendus… Nous disons " VIVE LA JUSTICE ! "