Le message est clair : le processus d’adhésion de la Turquie à l’UE, au point mort depuis 2018, ne peut être relancé dans les circonstances actuelles, malgré l'importance géopolitique et stratégique d'Ankara.
Telle est la conclusion d’un rapport sur la Turquie approuvé mercredi au Parlement européen à Strasbourg avec 367 voix pour, 74 contre et 188 abstention.
"Le processus d’adhésion est gelé. Il n’y a aucun progrès", déclare à Euronews Nacho Sánchez Amor, eurodéputé espagnol (S&D) et rapporteur du texte sur la Turquie.
Arrestation du maire d’Istanbul Ekrem İmamoğlu, répression des manifestations anti-gouvernementales, violations des droits de l’Homme : les eurodéputés ont dénoncé le recul démocratique en cours.
"La détention et le harcèlement du maire İmamoğlu sont probablement le pic de cette tendance répressive", estime l'eurodéputé.
En 2024, la Turquie arrive 158 ème sur 180 pays dans le classement mondial de la liberté de la presse de Reporters sans frontières (RSF).
Partenariat stratégique
Sécurité, commerce, migration : la Turquie reste toutefois un partenaire stratégique de l’UE et un allié au sein de l’OTAN. Elle dispose notamment d'une influence croissante dans des régions d'Ukraine, de la mer Noire et du Moyen-Orient.
Lors d’un débat au Parlement européen, la commissaire à l’élargissement a souligné la nécessité d’approfondir la coopération avec Ankara dans des domaines d’intérêt stratégique mutuel tels que le climat, la sécurité énergétique et le commerce.
"La déclaration UE-Turquie de 2016 sur les migrations continue à produire des résultats. Les arrivées irrégulières de la Turquie dans l’UE ont diminué de 33 % cette année par rapport à la période de l’an dernier", a annoncé la commissaire à l’élargissement Marta Kos.
Les députés ont également condamné la récente visite du Président Erdoğan dans les zones occupées de la République de Chypre. La République de Chypre du Nord, est un État reconnu uniquement par Ankara. L'île est divisée depuis l'invasion partielle par la Turquie en 1974.
De son côté, le rapporteur Nacho Sánchez Amor appelle à ne pas fermer définitivement la porte à une adhésion de la Turquie à l’UE.
"Il faut faire la distinction entre le pays et les dirigeants actuels. Il est vrai que sous le régime de l’AKP, il est impossible d’avancer parce qu’il n’y a pas de volonté politique de faire progresser les valeurs démocratiques", estime-t-il.
"Mais il y a une société civile dynamique qui nous demande, qui nous implore de ne pas clore (le processus). Elle veut garder l’espoir que peut-être dans le futur, avec d’autres dirigeants, un autre pays, avec un environnement différent, ce pourrait être l'occasion pour la Turquie de renouer avec l'Union européenne sur la base de l'adhésion", ajoute-t-il.
L'adhésion à l'UE est subordonnée au respect des critères de Copenhague tels que le respect de l'État de droit et des institutions démocratiques, la protection des minorités ou encore une économie de marché viable.
En 2024, l’alignement de la Turquie sur la politique étrangère et de sécurité commune de l’UE a chuté à 5%, selon un rapport de la Commission.
Le rapporteur insiste : “Il n’y a pas de raccourcis pour devenir membre de l’UE”.