Obama et McCain profondément divisés sur l'Irak et l'Afghanistan


1er novembre 2008

WASHINGTON - " Si la crise financière s'est violemment invitée dans la campagne électorale, le vainqueur de la présidentielle du 4 novembre devra aussi s'attaquer à la guerre en Irak et en Afghanistan. Et bien que John McCain et Barack Obama s'opposent sur ces dossiers, le nouveau locataire de la Maison Blanche ne possédera probablement pas une grande marge de manoeuvre.

 

Pour le démocrate Barack Obama, la guerre en Irak a été une erreur dès le début et doit prendre fin dans les 16 mois suivant sa prise de fonction, soit en mai 2010 au plus tard. Il s'agit de libérer les forces américaines au bénéfice d'un combat plus intense contre les talibans et leurs alliés d'Al-Qaïda en Afghanistan et au Pakistan. Il souhaite néanmoins laisser en Irak un nombre non précisé de soldats pour continuer à former les forces irakiennes, protéger les diplomates américains et d'autres intérêts, et faire office de force de réaction rapide en cas de regain de violence significatif.

Son rival républicain, lui, a soutenu dès le départ l'engagement de l'armée américaine en Irak et prône le maintien des troupes dans le pays jusqu'à la victoire, bien que les implications d'une telle position soient mal définies. John McCain avance l'argument qu'un départ des forces américaines aujourd'hui pourrait replonger le pays dans le chaos qu'il a connu jusqu'au second semestre 2007.

Les deux candidats à la Maison Blanche sont au moins d'accord sur un point: la nécessité de renforcer les troupes en Afghanistan où la violence est devenue aiguë. Barack Obama a affiché son intention d'y envoyer 7.000 hommes supplémentaires en cas d'élection, son adversaire n'ayant pour sa part rien dit de l'ampleur des renforts nécessaires.

Repoussés dans l'ombre ces deux derniers mois par la tourmente financière et son cortège de sombres nouvelles, les conflits en Irak et en Afghanistan représentent toujours un boulet moral et financier pour les Etats-Unis. Leur coût atteint au minimum 800 milliards de dollars (621 milliards d'euros), le bilan humain approche les 5.000 morts côté américain, et l'opinion publique se montre de plus en plus opposée à la guerre en Irak.

Reste que la marge de manoeuvre du successeur de George W. Bush dépendra de plusieurs inconnues. Au premier rang d'entre elles, la farouche opposition d'une partie du Parlement irakien à un projet d'accord de sécurité entre Washington et Bagdad, qui prévoit un départ des soldats américains des villes irakiennes fin juin et un retrait d'Irak d'ici à la fin 2011 -à moins que le gouvernement ne demande aux Etats-Unis de rester.

L'ambassadeur des Etats-Unis en Irak Ryan Crocker a fait savoir qu'il avait informé les Irakiens d'un retrait des forces américaines vers leurs bases au 1er janvier si l'accord n'était pas adopté par le Parlement irakien avant l'expiration fin décembre du mandat de l'ONU, qui fixe un cadre juridique à la présence de troupes étrangères sur le sol irakien.

L'administration Bush a récemment mis en garde les autorités irakiennes contre les "conséquences réelles" d'un rejet du pacte de sécurité. "Nous n'aurons pas de base juridique pour poursuivre les opérations" en Irak sans l'aval du Parlement irakien, a observé la porte-parole de la Maison Blanche Dana Perino. "Et les Irakiens le savent (...) Nous sommes persuadés qu'ils seront capables de le reconnaître".

A la question de savoir s'il honorerait l'accord sur le Statut des forces américaines, John McCain a répondu: "J'ai toujours dit que nous pourrions être sortis sous certaines conditions, l'honneur et la victoire, et pas la défaite". Les conditions évoquées par le sénateur de l'Arizona ne sont pas claires et la réponse n'enferme en rien le candidat républicain.

S'il entrait en vigueur, l'accord se rapprocherait des propositions de Barack Obama, même si l'expiration en mai 2010 du délai évoqué par le candidat pour un retrait pointe au calendrier plus d'un an et demi avant ce que prévoit l'accord américano-irakien. Cependant, sa volonté de maintenir une présence américaine lui apporterait une certaine marge de manoeuvre.

Outre l'incertitude concernant le pacte de sécurité bilatéral, la situation en Irak comporte plusieurs inconnues, dont celle d'un regain de violences entre sunnites et chiites -une fois parties les forces américaines-, mais aussi le souhait d'autonomie des Kurdes dans le Nord, et l'incapacité actuelle des forces irakiennes à faire régner la paix. Et la plupart des spécialistes militaires ne pensent pas que Irakiens puissent assurer la sécurité dans le pays à l'expiration du délai de 16 mois avancé par Barack Obama.