Les Kurdes en colère

mis à jour le Dimanche 13 decembre 2009 à 13h39

Radio-canada.ca

Le sud-est de la Turquie a été le théâtre, dimanche, d'affrontements après la décision de la Cour constitutionnelle de dissoudre le Parti pour une société démocratique (DTP), le principal parti prokurde du pays accusé d'être lié aux séparatistes armés du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

Les manifestations ont eu lieu, entre autres, à Hakkari, une ville à forte population kurde, où des centaines de protestataires ont lancé des pierres et des cocktails Molotov sur les policiers et érigé des barricades. Les policiers ont riposté en aspergeant les manifestants d'eau et de gaz lacrymogènes.

Des incidents ont également été signalés à Van ainsi que des manifestations à Diyarbakir, la plus grande ville de la région, où les tensions restent vives.

Les députés du DTP ont fait savoir, par le biais de leur chef Ahmet Türk, qu'ils boycottaient les travaux de l'Assemblée nationale pour protester contre l'interdiction de leur mouvement.

Ahmet Türk, qui n'a jamais condamné les actions du PKK, n'a pas indiqué ce que ses troupes entendaient faire désormais, mais il a déclaré « persister à croire à la démocratie politique ».

Incertitude

La décision de la Cour constitutionnelle plonge le pays dans une grande incertitude politique et menace les efforts de l'AKP, le parti du premier ministre Tayyip Erdogan, pour se réconcilier avec la minorité kurde du pays après des décennies de guérilla séparatiste. Il a déjà entrepris des réformes pour garantir les droits culturels des Kurdes turcs et mettre fin à un long conflit intérieur qui a fait plus de 40 000 morts.

Les aspirations des Kurdes à une plus grande autonomie sont toutefois perçues par l'establishment conservateur, y compris le système judiciaire, comme une menace pour l'État laïque hérité de Mustafa Kemal Atatürk, le père de la Turquie moderne.

Plusieurs partis kurdes ont été interdits en Turquie dans le passé, mais ils se sont toujours reformés sous de nouvelles appellations.

Une démission des députés du PTD entraînerait des élections partielles, qui risquent d'être périlleuses pour l'AKP, qui dispose actuellement d'une majorité à l'Assemblée nationale.

Préoccupation de l'UE

Cette décision de dissoudre le DTP pourrait compromettre la candidature turque à l'Union européenne, dont la présidence suédoise a exprimé vendredi soir sa préoccupation. « Tout en dénonçant avec force la violence et le terrorisme, la présidence rappelle que la dissolution de partis politiques est une mesure exceptionnelle qui doit être utilisée avec la plus grande retenue. »

Pour sa part, le département d'État américain a estimé que la décision de la Cour relevait des affaires intérieures de la Turquie, mais que la démocratie devait faire avancer la liberté politique pour tous les citoyens. Les mesures qui restreignent ces droits « doivent être mises en oeuvre avec une extrême prudence », a-t-il ajouté.