Le Kurdistan d'Irak se dote d'un gouvernement "unifié"

Info 08.05.06 | 13h14 - Mis à jour le 08.05.06 | 13h14
Istanbul (Turquie) Correspondance

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AFP/SAFIN HAMED
Le nouveau premier ministre du gouvernement unifié du Kurdistan d'Irak, Nechirvan Barzani, à Arbil, le 7 mai 2006.

Le premier gouvernement unifié du Kurdistan d'Irak a été investi, dimanche 7 mai, par un vote unanime du Parlement de cette région épargnée par les violences irakiennes mais qui souffrait de sa partition administrative. "Nous allons récupérer pacifiquement, démocratiquement, en vertu de la Constitution de l'Irak, les droits qui nous furent arrachés à Mendali, Khanaqin, Kirkouk, Makhmour, Chekhan et Sindjar", a déclaré dans son discours le nouveau premier ministre, Nechirvan Barzani. Ce neveu du président du Kurdistan, Massoud Barzani, a ainsi rappelé que la cité pétrolière de Kirkouk n'était pas la seule revendiquée par les Kurdes au sud de leur région, autonome depuis 1991.

Cette revendication, rejetée par la plupart des sunnites d'Irak et une partie des chiites, est l'une des raisons ayant obligé Massoud Barzani et Jalal Talabani, le président de l'Irak, à unifier leurs administrations, surmontant des décennies de rivalité. L'autre explication tient à l'exaspération de leurs électeurs face à une division perpétuant les traditions de clientélisme. Mais ni celles-ci ni la juxtaposition de deux structures militaires et financières, maîtresses chacune dans sa région, ne peuvent disparaître du jour au lendemain : les postes les plus sensibles restent dédoublés entre membres du Parti démocratique du Kurdistan (PDK) des Barzani, qui règne à Arbil et Dohouk, et de l'Union patriotique du Kurdistan (UPK), de Talabani, maître à Souleimaniyé. Le premier ministre et les ministres de l'intérieur, de la justice, des finances et des peshmergas (armée) sont ainsi flanqués d'un vice-premier ministre et de ministres d'Etat du parti rival.

"A ceux qui ont peur que le Kurdistan soit fort ou unifié, je dis que c'est une condition pour que l'Irak soit fort et unifié", a dit le vice-président (chiite) irakien, Adel Abdelmahdi, venu à Arbil de même que l'ambassadeur des Etats-Unis.

INCURSIONS IRANIENNES

Outre une partie des Irakiens, la Turquie, l'Iran et la Syrie nourrissent une telle crainte à cause de leurs propres minorités kurdes, susceptibles d'être inspirées par la quasi-indépendance des Kurdes d'Irak. Ces dernières semaines, les chiites irakiens de Moqtada Al-Sadr ont ainsi envoyé des hommes à Kirkouk. La Turquie et l'Iran ont massé des troupes aux frontières du Kurdistan d'Irak.

Ankara dispose déjà de forces basées quelques kilomètres à l'intérieur de l'Irak, mais assure qu'elles n'ont pas d'activités contre les rebelles kurdes (de Turquie) du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) réfugiés en Irak. L'Iran, en revanche, a mené contre le PKK des incursions assorties de tirs d'artillerie. Le but, dit-on, est de séduire la Turquie et d'empêcher qu'elle ne s'aligne sur les Etats-Unis au moment où le ton monte entre Washington et Téhéran.

Sophie Shihab
Article paru dans l'édition du 09.05.06