La cour européenne: libérez Demirtas

mis à jour le Mardi 20 novembre 2018 à 16h47

La justice européenne « ordonne » à la Turquie de libérer l’opposant kurde Demirtas

Lemonde.fr

Pour la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), l’emprisonnement du leader kurde, candidat malheureux à la présidentielle, « étouffe le pluralisme ».

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) « ordonne [à la Turquie] la cessation de la détention provisoire de l’opposant politique M. Demirtas », leader du Parti démocratique des peuples (HDP – Halklarin Demokratik Partisi, en turc, ou Partiya Demokratîk a Gelan, en kurde). Dans son arrêt rendu mardi 20 novembre, la CEDH condamne aussi Ankara à lui verser 10 000 euros pour le dommage moral et 15 000 euros de frais de justice.

L’emprisonnement de l’opposant kurde Selahattin Demirtas vise à « étouffer le pluralisme » et à « limiter le libre jeu du débat politique » dans le pays, a jugé la Cour. « Sa détention provisoire constitue une atteinte injustifiée à la libre expression de l’opinion du peuple et au droit du requérant d’être élu et d’exercer son mandat parlementaire », ont estimé les juges européens, entre autres violations de la Convention.

Des procès « politiques »

Détenu depuis novembre 2016 et candidat malheureux à la présidentielle du 24 juin 2018, M. Demirtas avait été condamné en septembre à quatre ans et huit mois de prison pour « propagande terroriste ». Il est également poursuivi dans de nombreux dossiers et risque au total jusqu’à cent quarante-deux ans de prison dans le cadre de son principal procès.

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a rapidement réagi, mardi, estimant que « les décisions de la CEDH ne nous contraignent aucunement ». « Nous allons contre-attaquer et mettre un point final à cette affaire », a-t-il ajouté selon l’agence de presse étatique Anatolie.

Mais, contrairement aux affirmations de M. Erdogan, les arrêts rendus par la CEDH ont bel et bien un caractère contraignant pour les pays signataires, comme la Turquie, de la Convention européenne des droits de l’homme, « aux termes de l’article 46 de la convention », a rappelé le porte-parole du Conseil de l’Europe, Daniel Holtgen.

Inlassablement, la formation prokurde dénonce des procès « politiques » pour réduire au silence un parti farouchement opposé à M. Erdogan. Le HDP, troisième force au Parlement, a ainsi été fortement touché par les purges menées après le putsch manqué de juillet 2016.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a plusieurs fois accusé le HDP d’être la vitrine politique du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), un groupe classé terroriste par Ankara et ses alliés occidentaux.