Hollande vole au secours des Kurdes et égratigne la diplomatie macronienne

mis à jour le Lundi 12 mars 2018 à 14h49

LeFigaro.fr | Par Jules Pecnard

LE SCAN POLITIQUE - Selon les informations du Parisien, l'ancien président de la République demande la création d'une «no fly zone» au-dessus des territoires bombardés par l'aviation turque, à Afrine.

Il s'appuie sur l'actualité internationale pour sortir de sa réserve. Dans un entretien accordé au Monde , François Hollande affirme sa volonté de venir en aide au peuple kurde, confirmant une information du Parisien . L'ancien chef de l'État lance son appel alors que les forces turques mènent une offensive contre la ville frontalière d'Afrine, quelques mois après la déroute de Daech dans la région. «Il n'est pas possible de célébrer la libération d'une partie de la Syrie et de laisser mourir des populations entières dont on sait qu'elles ont joué un rôle déterminant pour arriver à ce résultat», plaide François Hollande. Une prise de parole relayée par l'intéressé lui-même via Twitter.

Plus concrètement, selon Le Parisien, l'ex-locataire de l'Élysée cherche à obtenir une interdiction de survoler Afrine. L'idée étant de freiner l'offensive aérienne qui a déjà provoqué la mort de 240 civils et en a blessé plus d'un millier. Dans ses locaux de la rue de Rivoli dimanche, il a reçu Khaled Issa, représentant en France du Rojava, le Kurdistan syrien. Celui-ci rapporte au quotidien que François Hollande «a bien compris que le combat d'Afrine, aujourd'hui, est l'exacte réplique de Kobané». Confrontés à Daech, les Kurdes avaient reçu à partir de 2014 un soutien matériel de la part de l'Hexagone, sous la forme d'armes et de conseillers militaires.

La Russie «doit être menacée»

L'entourage de François Hollande assure que celui-ci n'a aucune volonté de couper l'herbe sous le pied de son successeur. Il se permet néanmoins d'affirmer au Monde que «les puissances démocratiques (...) doivent prendre conscience de leur responsabilité, de ce que peuvent être leur influence et leur rôle». «Mon devoir est de rappeler ce que j'ai pu faire au nom de la France et ce que cela porte comme conséquence. Si j'ai soutenu les Kurdes dans le cadre de la coalition, ce n'est pas pour les laisser dans la situation où ils sont», s'alarme-t-il.

Inquiet que la «parole» donnée par la France aux Kurdes soit trahie par la chute d'Afrin au profit des Turcs, François Hollande pointe du doigt le rôle de la Russie dans le conflit syrien. Fustigeant son veto au conseil de sécurité des Nations unies, le prédécesseur d'Emmanuel Macron estime que si la Russie de Vladimir Poutine «est menaçante, elle doit être menacée». «C'est la Russie qui est la puissance principale et le risque est sérieux d'une escalade si aucune limite ne lui est fixée», affirme-t-il, sommant l'actuel gouvernement, entre les lignes, de tenir tête à Moscou.

Macron comparé à Obama en 2013?

Ces propos rappellent inévitablement l'accueil en grande pompe organisé en l'honneur du président russe à Versailles le 29 mai dernier. Si l'entretien bilatéral entre Emmanuel Macron et Vladimir Poutine fut plutôt franc et musclé, l'image d'une collaboration plus apaisée qu'auparavant entre Paris et Moscou avait marqué les esprits. Reconnaissant les liens historiques qui unissent les deux puissances, François Hollande affirme que la France ne peut pas laisser Vladimir Poutine «avancer ses pions sans réagir».

Autre critique sous-jacente, celle de la «ligne rouge» invoquée par l'actuel président de la République en matière d'usage d'armes chimiques par le régime syrien, lors de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre. Faisant référence au discours tenu par Barack Obama à l'été 2013, François Hollande estime que «s'il y a une ligne rouge et qu'elle est violée sans entraîner de réaction, celui qui s'est permis une telle transgression s'autorise tout». Et l'ex-élu corrézien de citer l'annexion de la Crimée par la Russie comme une conséquence de ce signal envoyé par l'Occident. Pour autant, selon Le Parisien, l'Élysée ne tiendrait pas rigueur de cette piqûre de rappel et se dirait même prêt à relayer, voire soutenir l'initiative de François Hollande.