Heurts répétés dans le quartier turc, hier soir


Jeudi 25 octobre 2007 | STAGIAIREFRANCOIS ROBERT

LA MANIF anti-PKK, interdite, a dégénéré : plus de 100 arrestations, beaucoup de casse et trois policiers blessés


Belga

Il n'y a pas que des drapeaux belges qui flottent aux fenêtres, à Bruxelles. Dans le quartier turc, la « petite Anatolie », situé à cheval sur les communes de Schaerbeek et Saint-Josse, ce sont les drapeaux turcs qui fleurissent. Rue du Méridien et chaussée de Haecht, ils flamboient depuis quelques jours aux fenêtres des immeubles et aux devantures des cafés. Ils se déploient même en banderoles au-dessus de rues du quartier, attachés aux fils électriques.

C'est aux cris de « Le martyr ne meurt pas, la patrie ne se divise pas » qu'une foule de jeunes ultranationalistes, partis de la place Liedts vers 17 h, a progressé vers la chaussée de Haecht, le cœur d'« Emirdag Bruxelles » (une bonne partie des Turcs du quartier sont issus de cette province turque).

La veille, la police de la zone 5 (nord de Bruxelles) avait intercepté des messages SMS échangés au sein de la communauté turque et appelant à un rassemblement mercredi. La « manifestation spontanée » n'avait fait l'objet d'aucune demande officielle. Plus d'une centaine de policiers se sont alors déployés tant à Schaerbeek qu'à Saint-Josse. Positionnés stratégiquement sur les grands axes (chaussée de Louvain, près du Botanique, chaussée de Haecht) ils étaient prêts à intervenir. Par sécurité, le bourgmestre de Saint-Josse Jean Demannez (PS) avait fait fermer la maison communale et le commissariat de la rue Bériot

Les heurts se sont concentrés sur trois lieux : la chaussée de Haecht où les manifestants parfois cagoulés ont été arrosés par des autopompes, la rue de Liedekerke et la place Houwaert. Par petits groupes, les manifestants, armés de bâtons et de pierres, provoquaient les autorités puis se repliaient. Au même moment, d'autres groupes agissaient à plusieurs centaines de mètres de là.

La présence des forces de l'ordre a cependant limité les dégâts. Rue de Liedekerke, le café « Le jardin de Babylone », tenu par un Arménien, a de nouveau été attaqué. Juste à côté, une pierre a fracassé la vitre d'un immeuble. Quelques mètres plus loin, c'est une boutique gérée par un Kurde dont la devanture a volé en éclats, malgré la protection du rideau baissé. Une dizaine de policiers ont été blessés dont trois dans un accident de voiture. Ils ont été soignés à l'hôpital.

En fin de soirée, le commissaire David Jansen faisait état de nombreux contacts physiques avec les forces de l'ordre, des poubelles incendiées et de nombreux véhicules endommagés.

D'après l'agence Belga, les incidents ont concerné entre 600 à 800 personnes. Certains seraient même venus de Gand et d'Anvers. Toute la soirée, la police est restée sur le qui-vive. En tout cas, des commerçants commencent à se décourager. Comme ce tenancier turc d'un snack de la chaussée de Louvain : « J'en ai marre. Moi, je fais d'habitude un chiffre d'affaires de 700 euros par jour. Depuis lundi, il n'y a plus personne. Aujourd'hui, j'ai gagné cent euros ».

Rappelons que le quartier rassemble plus de la moitié de la communauté turque à Bruxelles. Dès que se produit le moindre soubresaut politique en Turquie, Schaerbeek et plus encore Saint-Josse importent la violence politique. Victimes involontaires d'un nationalisme exacerbé.