Ferveur patriotique pour la fête nationale turque


29 octobre 2007 | Par Gareth Jones

ANKARA (Reuters) - L'armée turque poursuit sa vaste opération contre le PKK dans le sud-est du pays et ses préparatifs d'intervention contre les bases arrière des séparatistes kurdes dans le nord de l'Irak, dans un climat de ferveur exacerbé par la célébration de la fête nationale.

Un soldat a été tué par une mine dans la province orientale turque de Tunceli, où l'armée a mobilisé 8.000 hommes contre les combattants du Parti des travailleurs du Kurdistan, dont une vingtaine avaient été tués la veille.

Un autre militaire a été tué dans la région de Sirnak, frontalière du Kurdistan irakien, où des hélicoptères de combat ont attaqué lundi des positions des séparatistes, qui ont tué ce mois-ci 12 soldats et en ont capturé huit autres.

Environ 100.000 militaires appuyés par des blindés, de l'artillerie, des avions et des hélicoptères sont massés à la frontière irakienne, prêts a intervenir contre les bases arrière des séparatistes dès que le gouvernement donnera son feu vert.

"Nous retenons notre respiration en attendant l'ordre d'opérer", a confié au quotidien Radikal un responsable militaire de la zone frontalière.

Dans toute la Turquie, villes et villages étaient pavoisés aux couleurs nationales et couverts de portraits de Mustafa Kemal "Atatürk", fondateur unanimement vénéré de la République turque, dont le 84e anniversaire était célébré lundi.

"NOUS SOMMES TOUS PRETS"

A Ankara, un défilé terrestre et aérien en présence du président Abdullah Gül, du Premier ministre Tayyip Erdogan et des officiers de l'état-major a fourni à l'establishment turc l'occasion d'afficher son unité et sa résolution face au péril séparatiste.

Istanbul, capitale économique et ville la plus peuplée du pays, a également été le théâtre d'une parade militaire et de manifestations de ferveur nationaliste à l'occasion de cette fête nationale.

"Je suis très fier des 84 ans de République turque. Nous ne sommes pas inquiets pour l'avenir. Nous sommes unis et la République survivra", confie un ancien combattant de la deuxième armée de l'Otan.

"C'est la décision de notre gouvernement d'aller ou non dans le nord de l'Irak, mais nous sommes prêts à tout. L'armée, le peuple, nous sommes tous prêts", assure Ahmed Kendigel, 52 ans.

La ferveur nationaliste est à son comble depuis la mort des 12 soldats tués par le PKK et leurs funérailles ont donné lieu la semaine dernière à une immense manifestation d'hostilité au PKK, ajoutant aux pressions qui s'exercent sur Erdogan pour qu'il "fasse donner la troupe".

"Après la mort des soldats, il est plus important que jamais de célébrer la fête nationale. Il faut que nous montrions aujourd'hui que nous sommes contre le PKK et les attentats terroristes. Si nous en avions peur, nous ne serions pas ici", lance Reyhan Turan, un étudiant de 24 ans qui a manifesté à Istanbul.

"CONSEQUENCES DESASTREUSES"

La presse nationale est à l'unisson de ces démonstrations de nationalisme. "La Turquie est au seuil de décisions historiques", proclame le quotidien Vatan qui, comme les autres journaux, publie un portrait d'Atatürk.

"Nous traversons une période critique. En ces jours, nous avons besoin d'unité et de solidarité, comme Atatürk nous l'a montré il y a des années", écrit en "une" l'éditorialiste de Vatan.

Face à la détermination que la Turquie affiche, l'Irak ne cache pas son inquiétude. Hochiyar Zebari, chef de la diplomatie de Bagdad, a évoqué lundi au micro de la BBC les conséquences "désastreuses" d'une invasion du Kurdistan irakien par l'armée turque.

Alliés des deux pays, les Etats-Unis les ont "encouragés" lundi à rechercher une solution commune au problème du PKK, craignant qu'une intervention turque dans une zone d'Irak relativement épargnée par les violences depuis plus de quatre ans ne contribue à déstabiliser davantage la région.

De source autorisée turque, on dit que la rencontre prévue lundi prochain à Washington entre Erdogan et le président George Bush sera déterminante dans la décision d'Ankara d'aller ou non traquer les 3.000 combattants du PKK retranchés dans les montagnes du Kurdistan irakien.

En attendant, la fermeté turque contribue à propulser les cours mondiaux du pétrole à de nouveaux records à la hausse, les séparatistes kurdes de Turquie ayant menacé de répondre à toute intervention turque par des sabotages d'oléoducs.