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Ouverture du procès d'un Néerlandais accusé de génocide en Irak


Lundi 21 novembre 2005 à 19h15

LA HAYE, 21 nov 2005 (AFP) — Le tribunal de La Haye a entamé lundi le procès d'un négociant en produits chimiques, Frans van Anraat, accusé de complicité de génocide pour avoir fourni dès 1984 des produits utilisés par le régime de Saddam Hussein, notamment lors du massacre de Kurdes à Halabja en

L'audience doit se poursuivre mardi avec notamment la présentation par les juges des témoins attendus à la barre.

Frans Van Anraat, les cheveux grisonnant, vêtu d'un cardigan bleu, a suivi le début de son procès depuis le banc des accusés, l'air sûr de lui.

Il a invoqué son droit au silence lorsque les juges ont tenté de l'interroger sur le dossier.

"Il ne s'agit pas d'un manque de respect envers vous ou à l'égard de ce tribunal, mais j'invoque mon droit à garder le silence", a-t-il déclaré.

Van Anraat est poursuivi pour crimes de guerre et génocide, pour avoir livré les produits chimiques nécessaires à Saddam Hussein pour fabriquer des armes chimiques, a précisé en début d'audience le procureur spécial pour les crimes de guerre.

Agé de 63 ans, il est la première personne jugée pour ce génocide, le crime le plus grave du droit international, selon l'organisation Trial Watch, dont le siège est à Genève. Il avait été arrêté en décembre 2004.

Dans une motion préliminaire, la défense a demandé à la cour de se déclarer incompétente et de remettre son client en liberté, arguant que le procès n'est pas équitable et que le principal suspect dans ce dossier, Saddam Hussein, devait être jugé sur la base des mêmes accusations, en Irak.

Les juges ont rejeté cette demande.

Le massacre d'Halabja, qui a fait 5.000 morts en une journée, fait partie de la liste des crimes dont est accusé Saddam Hussein, mais ne lui vaut pas encore d'inculpation formelle. L'ancien président irakien et sept autres responsables de son régime sont jugés depuis le 19 octobre pour le meurtre en 1982 de 143 chiites du village de Doujaïl (au nord de Bagdad).

Selon le procureur, les attaques aux armes chimiques menées par Bagdad ont fait "des milliers de morts en Irak et en Iran". Il estime que "l'accusé est coupable de graves crimes internationaux".

Outre Halabja, il est accusé d'être complice de plusieurs attaques au gaz dans le nord de l'Irak, dans les villages de Goktapa et de Birjinni, mais aussi en Iran, en 1986 et 1988, pour lesquelles il répond de crimes de guerre.

Certaines victimes des attaques étaient présentes au cours de l'audience de lundi.

Frans van Anraat pour sa part ne conteste pas la vente de ces produits, mais assure qu'il ignorait leur utilisation finale.

Visé par une enquête américaine, il avait été arrêté en 1989 en Italie, puis avait fui vers l'Irak où il était resté jusqu'à l'attaque de la coalition conduite par les Etats-Unis en 2003, date à laquelle il s'est réfugié aux Pays-Bas.

Les Etats-Unis ont renoncé en 2000 à leur demande d'extradition, sans explication. De leur côté, les autorités néerlandaises n'avaient pas de raisons de l'arrêter jusqu'à ce qu'il soit accusé de génocide.

La justice néerlandaise peut poursuivre Van Anraat pour génocide en Irak, après un jugement de la Cour suprême des Pays-Bas donnant aux tribunaux néerlandais compétence universelle en matière de crimes de guerre et de génocide, dès lors que les accusés résident aux Pays-Bas.

Le procès devrait durer trois semaines et un jugement est attendu le 23 décembre.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.