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Washington met en garde la Turquie en Irak, le PKK appelle à la violence


Dimanche 24 février 2008 à 12h12

CIZRE (Turquie), 24 fév 2008 (AFP) — Les Etats-Unis ont prévenu dimanche la Turquie qu'elle ne parviendrait pas à résoudre la question kurde par des moyens uniquement militaires, alors que les rebelles kurdes appelaient à réagir à l'offensive contre leurs bases en Irak par des violences urbaines en Turquie.

Le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, qui doit se rendre à Ankara la semaine prochaine, a approuvé le principe de l'opération terrestre lancée jeudi soir par l'armée turque contre les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) retranchés dans le nord de l'Irak.

Mais il a dit espérer que l'opération serait "courte, précise et que sera évitée la perte de vies innocentes, et qu'ils (l'armée turque) partiront dès que la mission sera accomplie".

M. Gates, qui s'exprimait depuis Canberra, a estimé que la solution militaire n'était pas suffisante et pris pour preuve les exemples de l'Afghanistan et de l'Irak.

"Les mesures économiques et politiques sont réellement importantes car, passé un certain seuil, les gens deviennent insensibles aux attaques militaires. Si l'on ne met pas en place ce genre d'initiatives non-militaires, les efforts de l'armée deviennent de moins en moins efficaces", a-t-il dit.

Les Etats-Unis, qui considèrent à l'instar de nombreux pays le PKK comme un groupe terroriste, fournissent à la Turquie depuis plusieurs mois des renseignements en temps réel sur les mouvements des rebelles en Irak.

L'armée turque a déjà mené depuis le 16 décembre plusieurs raids aériens et une opération terrestre de faible ampleur dans la région, utilisée comme une base arrière par le PKK pour ses actions en Turquie.

Son état-major a établi à 79 rebelles et sept soldats tués le bilan des victimes de l'actuelle offensive.

Le PKK a pour sa part donné un bilan de 45 soldats et trois militants tués. Il a aussi affirmé avoir abattu un hélicoptère de combat, une information non confirmée par Ankara.

Le chef de l'aile militaire du PKK Bahoz Erdal a appelé dimanche les jeunes Kurdes de Turquie à lancer des actions de violences urbaines en représailles à l'offensive.

"S'ils (l'Etat turc) veulent nous détruire, nos jeunes doivent rendre la vie dans les grandes métropoles insupportable (...). Les jeunes Kurdes doivent se réunir par groupes de deux pour brûler chaque soir des centaines de voitures", a-t-il déclaré à l'agence de presse Firat News, considérée comme le porte-voix du PKK.

Erdal a par ailleurs accusé les Etats-Unis de jouer un rôle actif dans l'offensive turque.

"Les avions de reconnaissance américains survolent la région. Ils fournissent instantanément des renseignements à l'armée turque sur les positions de nos forces et les avions turcs viennent alors bombarder la zone", a-t-il ajouté.

Le dirigeant kurde a également accusé le président de l'Irak, le Kurde Jalal Talabani, de soutenir l'opération.

"A notre avis, l'attitude de Jalal Talabani dans cette offensive est très dangereuse. Nous avons des informations selon lesquelles il a même invité l'armée turque à se rendre sur les Monts Qandil", a-t-il déclaré, faisant référence au massif montagneux proche de l'Iran abritant le QG du PKK.

Les monts Qandil faisaient partie des objectifs visés par des raids aériens menés samedi, a rapporté l'agence de presse Anatolie.

De nouveaux affrontements ont eu lieu dimanche. Des membres des "peshmerga", les forces armées kurdes du nord de l'Irak, ont déclaré à l'AFP avoir entendu des explosions et des tirs dans la région de Hakurk, un bastion du PKK à une vingtaine de kilomètres de la frontière turque.

Un correspondant de l'AFP a vu passer plus d'une dizaine d'avions de chasse se dirigeant dans cette direction.

Firat News a affirmé que quelque 5.000 soldats turcs et une soixantaine de blindés faisaient route vers la région de Haftanin, près de la ville frontalière irakienne de Zahu, à l'ouest de Hakurk.

Les autorités turques ont assuré que le seul objectif de l'opération était le PKK et que les troupes regagneraient la Turquie au plus vite une fois leur mission accomplie.

Ankara estime à 4.000 le nombre de rebelles du PKK retranchés en Irak. Le conflit kurde en Turquie a fait plus de 37.000 morts depuis 1984.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.