Jeudi 12 janvier 2006 à 13h47
MUNICH (Allemagne), 12 jan 2006 (AFP) — Un Kurde irakien, Lokman Amin Mohammed, accusé d'avoir fait passer clandestinement des islamistes d'Irak vers l'Europe et inversement, a été condamné jeudi par la Cour d'appel de Munich à sept ans de prison pour soutien logistique et financier à l'organisation islamiste Ansar al-Islam en Irak.
Les juges ont ainsi suivi le réquisitoire du parquet, alors que la défense avait requis une "peine bien inférieure" contre Mohammed, 31 ans.
Le président de la Cour, Bernd von Heintschel-Heinegg, a estimé que le procès a accrédité pleinement l'acte d'accusation quant au caractère terroriste d'Ansar al-Islam (Partisans de l'islam) et du groupe Jaish Ansar-al-Sunna, deux organisations dont Mohammed, a-t-il dit, a été indubitablement membre.
Selon M. Heintschel-Heinegg, ces deux organisations ont revendiqué 350 attaques terroristes, faisant plus de 1.100 morts et blessés.
Ce procès est le premier en Allemagne pour appartenance à une organisation terroriste active à l'étranger, un nouveau chef d'accusation inscrit dans le code pénal en 2002, un an après les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis.
Lokman Amin Mohammed était accusé d'avoir été le cerveau de la cellule munichoise d'Ansar al-Islam, soupçonné d'avoir commis de nombreux attentats en Irak contre des intérêts occidentaux, notamment contre l'ambassade de Jordanie à Bagdad.
Il était également poursuivi pour avoir fait entrer en Irak des volontaires européens pour le Jihad, ainsi que pour avoir aidé plusieurs Irakiens, blessés dans leur pays, à entrer clandestinement en Europe occidentale pour s'y faire soigner.
Il aurait ainsi aidé un spécialiste en explosifs de l'organisation à venir se faire soigner en Grande-Bretagne.
Il est aussi accusé d'avoir versé de l'argent à des membres d'Ansar al-Islam.
Lors de son réquisitoire, le procureur Lothar Lehnert avait estimé que les sept mois de débats devant la cour avaient permis de confirmer "pleinement" les soupçons pesant sur l'Irakien.
Au début du procès, l'accusé avait nié toute appartenance au mouvement terroriste, concédant seulement avoir aidé des compatriotes persécutés par le régime de Saddam Hussein à se réfugier en Allemagne. Mi-novembre, il a toutefois changé de stratégie, et est soudain passé des aveux, lors d'audiences tenues à huis clos pour des raisons de sécurité.
La fin du procès Mohammed survient alors que le procureur fédéral allemand Kay Nehm a annoncé lundi le renvoi devant un tribunal d'un autre membre présumé d'Ansar al-Islam, l'Irakien Dieman A.I., en détention provisoire depuis juin dernier.
Ce prédicateur extrémiste de Nuremberg (Bavière, sud) est notamment soupçonné d'avoir fourni à l'organisation terroriste, en 2003 et 2004, une aide logistique ainsi que d'importantes sommes d'argent, qu'il se procurait à travers des fraudes à l'aide sociale.
Avant l'inscription du nouveau chef d'accusation d'appartenance à une organisation terroriste à l'étranger, la justice allemande ne pouvait poursuivre que les membres présumés d'organisations actives en Allemagne.
Cette modification de la loi avait permis au parquet allemand d'ouvrir une enquête sur l'attentat de Bali en novembre 2002, qui avait fait six victimes allemandes sur un total de 202 morts.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.