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Turquie : une médecin jugée pour avoir réclamé une enquête sur les armes chimiques


Vendredi 23 decembre 2022 à 17h36

Istanbul, 23 déc 2022 (AFP) — La présidente de l'Union des médecins de Turquie (TTB), Sebnem Korur Fincanci, jugée pour "propagande terroriste", sera maintenue en détention jusqu'à la prochaine audience de son procès jeudi, a décidé vendredi un tribunal d'Istanbul.

Détenue depuis le 27 octobre dans une prison d'Ankara, Mme Fincanci avait réclamé une enquête sur des accusations de recours à des armes chimiques par l'armée turque contre les combattants du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) en Irak, relayées par des médias et des membres de l'opposition.

Ankara avait aussitôt dénoncé une campagne de "désinformation".

Le PKK est considéré comme terroriste par Ankara et l'Union européenne.

L'arrestation de Mme Fincanci avait déclenché des manifestations à Istanbul où des dizaines de personnes avaient été arrêtées.

Cette experte en médecine légale de 63 ans est entrée vendredi dans la salle d'audience bondée, le poing en l'air, sous les applaudissements des personnes présentes pour la soutenir et le regard de dizaines de policiers antiémeute.

Pendant l'audience, elle a de nouveau appelé à "une enquête efficace" comprenant des inspections sur le terrain et des autopsies.

"En tant que défenseur des droits humains, j'ai la responsabilité de défendre la liberté d'expression et le droit du public à l'information", a-t-elle dit aux juges.

Le PKK avait affirmé que 17 de ses combattants étaient morts dans des attaques à l'arme chimique dans les montagnes du nord de l'Irak.

Mme Fincanci est connue en Turquie en tant qu'opposante au président turc Recep Tayyip Erdogan.

Amnesty International et Human Rights Watch ont lancé un appel commun avec cinq autres organisations pour la libération de Mme Fincanci dans l'attente de son procès.

"Sebnem Korur Fincanci est une éminente experte en matière de documentation de la torture", ont-ils déclaré dans un communiqué commun. "Son travail doit être loué, pas puni", a commenté le président allemand de l'Association médicale mondiale, Frank Ulrich Montgomery, dans le communiqué.

Le procureur a cependant accusé Mme Fincanci de "participer activement aux activités de propagande du PKK" et demandé son maintien en détention.

Mme Fincanci a déclaré que sa détention n'avait fait qu'attirer une plus grande attention sur ses appels à une enquête indépendante.

"Ne pensez pas qu'être en état d'arrestation et en prison est difficile pour moi, a-t-elle affirmé. "C'est en fait une occasion en or pour un défenseur des droits de l'Homme comme moi."

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.