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Turquie : trois universitaires en détention pour avoir signé une pétition prokurde


Mardi 15 mars 2016 à 23h14

Istanbul, 15 mars 2016 (AFP) — La justice turque a placé mardi en détention trois universitaires accusés de "propagande terroriste" pour avoir signé une pétition dénonçant les violences de l'armée dans ses opérations contre les rebelles kurdes, ont rapporté les médias.

Sur requête du procureur, un tribunal d'Istanbul a ordonné l'incarcération d'Esra Munger, professeur à l'université Bogazici, de Muzaffer Kaya, qui enseigne aux Beaux-Arts, et de Kivanc Ersoy, professeur à l'université Nisantasi, selon l'agence de presse Dogan.

Par ailleurs, un professeur britannique d'une autre université stambouliote lui aussi accusé de "propagande terroriste", Chris Stephenson, a été placé mardi en garde à vue pour avoir distribué des tracts appelant à célébrer le Nouvel An kurde le 21 mars, a annoncé l'agence de presse progouvernementale Anatolie.

En janvier dernier, plus de 1.200 intellectuels turcs et étrangers avaient signé une "pétition pour la paix" dénonçant les "massacres" commis par les forces de sécurité turques pendant des opérations contre les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans plusieurs villes sous couvre-feu.

Cette initiative a suscité la fureur du président islamo-conservateur Recep Tayyip Erdogan, qui avait promis que les pétitionnaires paieraient le "prix" de leur "trahison".

Dans la foulée, des procédures judiciaires avaient été déclenchées dans toute la Turquie et une vingtaine d'universitaires placés en garde à vue, ravivant dans ce pays comme à l'étranger les critiques de la dérive autoritaire de M. Erdogan.

La "propagande terroriste" est punie d'un peine maximale de cinq ans de prison.

La semaine dernière, le syndicat d'enseignants Egitim-Sen a annoncé que 153 procédures criminelles avaient été engagées contre les signataires de cette pétition et que neuf professeurs avaient été licenciés et 27 autres mis à pied.

Le conflit kurde a repris cet été après plus de deux ans de cessez-le-feu. Dimanche soir, un attentat-suicide à la voiture piégée attribué par les autorités au PKK a fait 35 morts et plus de 120 blessés dans la capitale Ankara.

"Il n'y a pas de différences entre un terroriste qui tient une arme et quelqu'un qui utilise sa position et un stylo jusqu'au point de soutenir le terrorisme", avait dit lundi M. Erdogan, qui a promis d'"éradiquer" le PKK.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.