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Turquie: libération d'une députée kurde en grève de la faim


Vendredi 25 janvier 2019 à 12h59

Diyarbakir (Turquie), 25 jan 2019 (AFP) — Une députée kurde observant depuis 79 jours une grève de la faim qui a entraîné une grave détérioration de sa santé a été remise en liberté vendredi sur ordre d'un tribunal turc.

La décision de libérer la députée Leyla Güven, détenue depuis janvier 2018, a été prise par un tribunal de Diyarbakir, principale ville à majorité kurde dans le sud-est de la Turquie.

Cette remise en liberté conditionnelle a été assortie d'une interdiction de quitter le territoire. Le procès a été ajourné au 29 mai.

Quelques heures après cette décision, la députée du Parti démocratique des peuples (HDP) a été libérée de la prison de Diyarbakir et conduite vers son domicile à bord d'une ambulance, selon un correspondant de l'AFP sur place.

Mme Güven, 55 ans, n'était pas présente à l'audience à laquelle ont assisté des représentants de plusieurs partis européens de gauche venus exprimer leur solidarité avec l'élue kurde.

Mme Güven avait entamé une grève de la faim en prison le 8 novembre pour protester contre les conditions de détention d'Abdullah Öcalan, le chef historique du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui purge une peine de prison à vie dans une île proche d'Istanbul après avoir été capturé par la Turquie en 1999.

La co-dirigeante du HDP, Pervin Buldan, a rendu visite à la députée après sa remise en liberté. Elle a affirmé que l'élue allait "poursuivre sa grève de la faim chez elle".

"Nous, on est là, ici aujourd'hui, pour exprimer notre solidarité avec Leyla Güven, notre solidarité avec le HDP pour soutenir et appuyer sa revendication qui est la libération de tous les prisonniers politiques en Turquie et la rupture de l'isolement que subit Öcalan", a déclaré à l'AFP devant le tribunal Danielle Simonnet, personnalité de La France Insoumise (gauche radicale).

- "Vie en danger" -

Le HDP, principal parti prokurde en Turquie, avait affirmé le 10 janvier que sa santé s'était dégradée à un point "mettant sa vie en danger".

Selon le HDP, Mme Güven a perdu "quelque 15 kilos" depuis le début de sa grève de la faim et "ne peut plus subvenir à ses besoins ou marcher seule".

Selon ce parti, des dizaines de "prisonniers politiques" ont observé des grèves de la faim dans les prisons turques pour protester contre "le maintien à l'isolement" de M. Öcalan dans sa prison sur l'île d'Imrali.

Mme Güven a été arrêtée en janvier 2018 après avoir critiqué l'offensive turque qui était alors en cours dans l'enclave à majorité kurde d'Afrine dans le nord de la Syrie.

Le HDP avait fait porter au gouvernement turc la responsabilité "pour toutes les conséquences négatives découlant de la protestation de Leyla Güven et les autres militants qui poursuivent leur grève de la faim en prison".

Après la décision du tribunal, des partisans du HDP se sont rassemblés devant la prison de Diyarbakir pour attendre la sortie de Mme Güven.

"Les autorités ont attendu qu'elle soit à l'article de la mort pour la libérer. L'Etat n'aurait pas dû la traiter de la sorte", a déclaré à l'AFP l'un d'eux, Ramazan Yakar.

Le président turc Recep Tayyip Erdogan accuse le HDP d'être la vitrine politique du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), classé "terroriste" par Ankara et ses alliés occidentaux.

Le chef de file du HDP, Selahattin Demirtas, est détenu depuis novembre 2016. Il est accusé de diriger une "organisation terroriste", de "propagande terroriste" et d'"incitation à commettre des crimes".

Le HDP a été frappé de plein fouet par les purges qui ont suivi la tentative de putsch de juillet 2016 et, outre M. Demirtas, plusieurs de ses députés ont été arrêtés.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.