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Turquie : libération d'un député prokurde déchu de son mandat


Dimanche 21 mars 2021 à 12h35

Ankara, 21 mars 2021 (AFP) — Les autorités turques ont brièvement interpellé dimanche un responsable de premier plan de l'opposition prokurde qui refusait de quitter le Parlement depuis plusieurs jours pour protester contre le retrait de son mandat de député après une condamnation pour "terrorisme".

L'ex-député Faruk Gergerlioglu "a été emmené de force alors qu'il était en pyjama et en pantoufles" par "près de 100 policiers", a déclaré le Parti démocratique des peuples (HDP, prokurde) dans un communiqué.

Il a été appréhendé à la sortie des toilettes du Parlement où il venait de faire ses ablutions pour pouvoir prier, a ajouté le HDP, qui a diffusé des images montrant M. Gergerlioglu, les traits tirés et en t-shirt noir, en train d'être emmené par des policiers.

Quelques heures plus tard, le bureau du procureur général d'Ankara a annoncé dans un communiqué que l'ancien élu avait été remis en liberté.

Au cours de sa déposition au commissariat, rendue publique par le HDP, M. Gergerlioglu a déclaré qu'il n'arrivait plus à plier un doigt de la main et qu'il avait des douleurs à la nuque en raison de son interpellation musclée.

Les autorités affirment, pour expliquer l'intervention des forces de l'ordre, que M. Gergerlioglu a scandé des slogans en faveur du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), un groupe qualifié de "terroriste" par Ankara, au Parlement. Mais le HDP a démenti ces accusations, vidéo à l'appui.

- "Rien n'a changé" -

Célèbre pour ses combats en faveur des droits humains, M. Gergerlioglu a été déchu de son mandat mercredi, après la confirmation par la justice d'une condamnation à deux ans et demi de prison pour "propagande terroriste".

Le député rejette ces accusations et sa destitution a été condamnée par plusieurs ONG et pays occidentaux.

Pour protester contre sa destitution, M. Gergerlioglu refusait de quitter le Parlement depuis mercredi, dormant et mangeant dans une salle du bâtiment officiel.

"Nous pouvions voir ce genre de scènes dans les années 1990. Malheureusement, rien n'a changé depuis", a-t-il lâché au moment de son interpellation, selon des propos rapportés par son parti.

Plusieurs députés prokurdes ont en effet été arrêtés au cours de cette "décennie noire" marquée par l'intensification du conflit kurde dans le sud-est de la Turquie et une répression intense des milieux prokurdes.

Le HDP, le troisième plus grand parti du pays, fait lui aussi l'objet d'une implacable répression depuis 2016 avec l'arrestation de plusieurs de ses élus et de ses dirigeants, dont le charismatique Selahattin Demirtas.

Le jour de la destitution de M. Gergerlioglu, les autorités turques ont réclamé l'interdiction du HDP, l'accusant d'être étroitement lié au PKK.

Le plus haut tribunal turc doit se prononcer sur ce dossier dans les prochaines semaines.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.