Page Précédente

Turquie: le régime accélère la procédure pour lever l'immunité de députés prokurdes


Vendredi 15 avril 2016 à 14h36

Ankara, 15 avr 2016 (AFP) — Le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu a appelé vendredi deux partis d'opposition à soutenir sa proposition de réformer la Constitution pour autoriser des poursuites judiciaires contre plusieurs députés du parti prokurde accusé de "propagande terroriste".

"Il faut que l'opposition soutienne sans tarder notre projet et ouvre ainsi la voie d'un procès", a déclaré M. Davutoglu devant des membres de son Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur) à Kocaeli (nord-ouest).

Selon une source parlementaire, le Parlement devrait se prononcer avant la fin du mois.

Depuis la reprise du conflit kurde l'été dernier, le régime du président Recep Tayyip Erdogan a multiplié les poursuites contre les soutiens, y compris élus, du Parti démocratique des peuples (HDP, prokurde), qu'il accuse d'être les "complices" des rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

Pour aboutir à un procès en bonne et due forme, ces procédures, qui visent notamment l'emblématique patron du HDP Selahattin Demirtas, requièrent la levée de leur immunité parlementaire par le Parlement.

Pour accélérer le processus, le parti au pouvoir a déposé cette semaine un projet d'amendement de l'article 83 de la Constitution, qui stipule qu'un élu soupçonné d'un crime ou d'un délit ne peut être interrogé, détenu ou jugé sans un vote du Parlement.

Sa proposition de réforme prévoit que cette immunité ne s'applique pas aux députés faisant l'objet de poursuites déposées devant le bureau de l'Assemblée.

Si ce texte était voté, il ouvrirait la voie à un procès contre 129 députés.

Le principal mouvement d'opposition, le Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), et le Parti de l'action nationaliste (MHP, droite) ont annoncé qu'ils ne s'opposeraient pas au texte du gouvernement.

"Par principe, nous sommes opposés à l'immunité", a déclaré un élu du CHP, Engin Altay, même s'il a jugé l'amendement contraire à la Constitution.

M. Erdogan, qui a promis "d'éradiquer" le PKK et ses "complices", a pesé de tout son poids en faveur de ce texte. "Il faut demander des comptes à ceux qui nuisent à l'unité du peuple", a-t-il récemment lancé.

A eux trois, l'AKP, le CHP et le MHP réunissent largement la majorité des deux tiers des 550 députés nécessaire à l'adoption de l'amendement.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.