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Turquie: le parti pro-kurde HDP privé de subventions


Jeudi 5 janvier 2023 à 13h39

Ankara, 5 jan 2023 (AFP) — La Cour constitutionnelle turque a décidé jeudi de priver temporairement d'aides publiques le troisième parti du pays, le HDP pro-kurde, accusé par les autorités de liens avec le "terrorisme", a indiqué à l'AFP un porte-parole du parti.

Le Parti démocratique des peuples (HDP), qui rejette ces accusations, est également sous le coup d'une menace de fermeture, à moins de six mois des élections présidentielle et législatives.

Une décision pourrait intervenir mardi 10 janvier.

Selon la chaîne privée NTV, 539 millions de livres turques (28,7 millions de dollars) d'aide publique devaient être accordées au HDP cette année, dont un tiers avant le 10 janvier.

La décision de priver de subventions publiques le HDP - troisième formation politique au Parlement - a été adoptée par 8 voix pour et 7 contre, selon plusieurs médias turcs.

Le parti, considéré par certains analystes comme le "faiseur de rois" de la prochaine élection présidentielle prévue en juin prochain, a aussitôt qualifié la décision de "détournement du droit", remettant en cause l'indépendance de la Cour constitutionnelle.

"[Elle] vise à empêcher un processus électoral juste et démocratique et à ignorer la volonté des électeurs", a réagi le HDP sur Twitter.

"Cet embargo contre le HDP aura un coût politique", a affirmé le député HDP Ömer Öcalan.

"Nouvelle preuve que le gouvernement d'Erdogan utilise les tribunaux pour désavantager, éliminer et punir l'opposition politique", a réagi sur Twitter Emma Sinclair-Webb, représentante de l'ONG Human Rights Watch (HRW) pour la Turquie.

- "Mépris des électeurs" -

"Voler au HDP les fonds auxquels il a droit à l'approche des élections, en parallèle de la demande de fermeture [du parti], montre un mépris total pour les règles démocratiques et les droits de millions d'électeurs", a-t-elle ajouté.

Dans son acte d'accusation, le procureur général en charge du dossier a affirmé que la principale formation pro-kurde est liée "de façon organique" au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), groupe armé qualifié de "terroriste" par Ankara et ses alliés occidentaux.

Le HDP fait l'objet d'une répression implacable depuis 2016, année où son chef de file Selahattin Demirtas a été arrêté.

Il a été condamné deux ans plus tard à quatre ans et demi de prison et nombre de responsables et de sympathisants du HDP ont été également arrêtés.

L'armée turque a lancé fin novembre une série de raids aériens contre des positions du PKK et d'autres combattants kurdes dans le nord de l'Irak et de la Syrie.

Depuis les années 1990, près d'une dizaine de partis pro-kurdes ont été interdits ou se sont auto-dissous avant leur suspension.

Le HDP avait obtenu 12% des suffrages aux élections législatives de 2018, faisant élire près de 60 députés.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.