Page Précédente

Turquie: le chef kurde Ocalan rencontre des avocats pour la 1ère fois en huit ans


Lundi 6 mai 2019 à 17h58

Istanbul, 6 mai 2019 (AFP) — Le chef historique de la rébellion kurde Abdullah Ocalan, qui purge une peine de prison à vie en Turquie, a rencontré des avocats pour la première fois depuis 2011, ont indiqué ses défenseurs lundi.

Lors d'une conférence de presse à Istanbul, les avocats de M. Ocalan ont en outre relayé un message de sa part exhortant des partisans en grève de la faim à ne pas mettre leur vie en danger par leur action.

La rencontre entre M. Ocalan et deux de ses avocats a eu lieu le 2 mai dans l'île-prison d'Imrali, non loin d'Istanbul, où il est incarcéré, ont-ils précisé.

"C'est sa première rencontre avec des avocats depuis 2011. Elle a duré environ une heure", a déclaré l'un des avocats qui l'a rencontré, Rezan Sarica, lors d'une conférence de presse à Istanbul.

"Seulement deux avocats ont été autorisés à le rencontrer même si quatre en ont fait la demande", a-t-il ajouté.

Malgré un isolement quasi-total, M. Öcalan reste une figure de référence pour la rébellion kurde en Turquie, où le conflit entre le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et l'Etat a fait plus de 40.000 morts depuis 1984.

Selon le parti prokurde HDP, quelque 3.000 prisonniers sont actuellement en grève de la faim pour réclamer l'assouplissement des conditions de sa détention, la plupart ayant rejoint le mouvement ces dernières semaines par solidarité avec une députée prokurde, Leyla Güven, qui refuse de s'alimenter depuis novembre dernier.

Par ailleurs, huit personnes se sont suicidées en prison depuis le début du mouvement, selon le HDP.

"Nous respectons la résistance de nos amis dans les prisons et en dehors mais nous souhaitons qu'ils ne la portent pas à un stade mettant leur vie en danger ou entraînant leur mort", a indiqué une autre avocate, Nevroz Uysal, relayant un message de M. Ocalan lors de la conférence de presse.

"Pour nous, leur état de santé physique et psychologique prime sur toute autre considération", a-t-elle ajouté. "Un règlement politique honorable et démocratique est primordial pour nous".

Depuis la reprise du conflit dans le sud-est de la Turquie en 2015 après la rupture d'un fragile cessez-le-feu, le discours du président Recep Tayyip Erdogan au sujet des rebelles kurdes s'est nettement durci, faisant s'éloigner la perspective d'une solution politique négociée au conflit.

Le frère de M. Ocalan, Mehmet, a pu lui rendre visite à la mi-janvier pour la première fois depuis 2016 à la faveur d'un geste d'apaisement consenti par les autorités après le lancement du mouvement de grève de la faim par des prisonniers en signe de protestation contre son isolement.

Dans le message relayé par ses avocats, M. Ocalan a aussi évoqué la situation en Syrie où une milice kurde syrienne liée au PKK contrôle de vastes territoires dans le nord du pays, au grand dam d'Ankara qui se dit déterminé à l'en chasser pour éviter la création d'une entité kurde à ses frontières.

"Nous pensons que les problèmes en Syrie doivent être résolus loin de la culture de violence et dans le but d'instaurer une démocratie locale dans le respect de l'intégrité territoriale de la Syrie. Les sensibilités de la Turquie doivent être prises en considération", a estimé M. Ocalan selon ses avocats.

Abdullah Öcalan, alors en cavale depuis 1980, a été capturé le 15 février 1999 par des agents turcs au Kenya.

Il a été condamné à mort le 29 juin 1999 pour trahison et tentative de diviser la Turquie mais sa peine a été commuée en 2002 en réclusion à perpétuité, après l'abolition de la peine de mort en Turquie.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.