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Turquie: hommages et colère un an après la mort par balle d'un avocat kurde


Lundi 28 novembre 2016 à 15h52

Diyarbakir (Turquie), 28 nov 2016 (AFP) — Qui a tué Tahir Elçi ? Un an après la mystérieuse mort par balle de ce célèbre avocat kurde, des centaines de personnes lui ont rendu hommage lundi à travers la Turquie, et critiqué la lenteur de l'enquête.

Tahir Elçi, bâtonnier de l'ordre des avocats de Diyarbakir, principale ville du sud-est à majorité kurde de la Turquie, a été tué le 28 novembre 2015 d'une balle dans la tête au cours d'une fusillade entre la police et des hommes armés présentés par les autorités comme des rebelles du PKK.

La mort violente de ce défenseur de la cause kurde a choqué un pays ensanglanté par la reprise des combats entre forces de sécurité et membres du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), un conflit qui a fait plus de 40.000 morts depuis 1984. Deux soldats ont été tués lundi lors d'une embuscade du PKK à Tunceli (sud-est), selon l'agence de presse Dogan.

Des centaines de personnes ont déposé des fleurs près d'une mosquée historique de Sur, à Diyarbakir, au pied de laquelle Tahir Elçi a été tué à 49 ans.

Des avocats en robe, certains tenant des portraits du bâtonnier tué, n'ont pu retenir leurs larmes, a constaté un photographe de l'AFP.

A Istanbul, plusieurs dizaines d'avocats se sont rassemblés devant le palais de justice de Bakirköy derrière une banderole proclamant "Nous n'oublierons jamais Tahir Elçi", selon une vidéaste de l'AFP.

Mais, alors que l'enquête piétine toujours un an après les faits, les commémorations sont également marquées par la colère devant la lenteur du processus judiciaire.

Selon les témoignages, Tahir Elçi venait de terminer une conférence de presse, dans laquelle il avait appelé à mettre un terme aux combats dans le sud-est, lorsque des coups de feu ont retenti.

Le bâtonnier de Diyarbakir a été touché en plein visage lors de ces échanges, sans qu'il soit possible de déterminer avec certitude s'il a été spécifiquement visé par un des tireurs ou victime d'une balle perdue.

Un an après sa mort, "il n'y a ni acte d'accusation, ni témoin, ni suspect", a déploré la veuve du bâtonnier, Türkan Elçi, dans un entretien au quotidien d'opposition Cumhuriyet.

Le principal parti prokurde, le HDP, a été prompt à dénoncer un "assassinat politique", soutenant que la balle meurtrière avait été tirée par la police, des accusations rejetées par le gouvernement.

A Istanbul, une avocate, Leyla Han Tüzel, estime qu'"il a été tué avec la complicité du pouvoir politique, des médias et des organes judiciaires".

Tahir Elçi avait été brièvement détenu quelques jours auparavant dans le cadre d'une enquête pour "propagande terroriste" après avoir déclaré que le PKK, classé "organisation terroriste" par Ankara, était un "mouvement politique armé".

Un an après la disparition de ce défenseur de la cause kurde, le HDP a été décapité par l'arrestation de ses dirigeants et plusieurs médias prokurdes ont été fermés par les autorités.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.