Dimanche 21 octobre 2007 à 18h36
DIYARBAKIR (Turquie), 21 oct 2007 (AFP) — Trente-deux rebelles kurdes et douze soldats turcs ont été tués lors de combats près de la frontière irakienne dimanche, une des journées les plus meurtrières dans la campagne séparatiste qui dure depuis vingt trois ans dans le sud-est de la Turquie.
L'attaque menée par des combattants du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, considéré comme une organisation terroriste par la Turquie, l'Union européenne et les Etats-Unis) a eu lieu quatre jours seulement après le feu vert du parlement turc autorisant, si nécessaire, des incursions militaires en Irak, base arrière des séparatistes.
Un porte-parole du PKK à Erbil, dans le Kurdistan irakien, a affirmé qu'un groupe de soldats turcs avait été capturé au cours des combats. Mais cette information a été démentie par le ministre turc de la Défense, Vecdi Gönül. "Il n'y a pas d'otages", a déclaré M. Gönül à la presse lors d'une visite à Kiev.
Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a annoncé une réunion de hauts responsables civils et militaires dimanche soir à Ankara sous la direction du président Abdullah Gül, pour discuter de la riposte à l'attaque du PKK.
"Nous déciderons après cette réunion quel genre de mesures nous adopterons", a déclaré M. Erdogan à la presse à Istanbul après avoir voté dans un référendum constitutionnel.
Le chef de l'état-major général, le général Yasar Büyükanit, d'autres militaires de haut rang et des ministres devaient participer à la réunion à partir de 20h00 heure locale (17h00 GMT).
"En ce qui concerne l'opération transfrontalière, nous prendrons toutes les mesures nécessaires dans le cadre de l'autorisation" donnée par le parlement, a déclaré M. Erdogan. Il a néanmoins laissé entendre que la réaction d'Ankara ne serait pas précipitée, assurant : "Nous agirons l'esprit calme".
Le ministre turc de la Défense a fait une déclaration similaire. "Nous avons des projets pour traverser la frontière", mais une incursion "n'est pas prévue de façon urgente", a déclaré M. Gönül, qui venait de s'entretenir à Kiev avec son homologue américain Robert Gates.
"Tant que l'Irak aidera les terroristes, il sera de notre droit de les éliminer", a déclaré le président Gül dans sa ville natale de Kayseri.
Des centaines de personnes ont manifesté spontanément dans plusieurs villes turques, dont un millier de personnes sur la place centrale de Taksim à Istanbul.
Les combats ont été déclenchés par l'attaque d'un important groupe de séparatistes contre une patrouille dans les premières heures de dimanche, a indiqué l'état-major dans un communiqué publié sur son site internet.
Les affrontements continuaient dans l'après-midi, l'armée "poursuivant les terroristes" avec le soutien d'hélicoptères de combat et l'artillerie lourde pilonnant "63 cibles en coordination avec les mouvements de troupes", précise le communiqué.
Par ailleurs, 17 civils ont été blessés par l'explosion d'une mine au passage du minibus dans lequel ils voyageaient à l'approche de Daglica, limitrophe de la frontière irakienne et lieu des combats de dimanche, selon des sources sur place.
La Turquie estime que quelque 3.500 hommes armés du PKK sont basés dans le nord de l'Irak - région contrôlée par une administration autonome kurde qu'Ankara accuse de soutenir les rebelles - où ils s'approvisonnent en armes pour lancer des attaques en territoire turc.
A Bagdad, le parlement irakien a voté dimanche une motion condamnant la menace militaire turque, tout en exigeant le départ du PKK de l'Irak et en appelant le gouvernement à prendre "les mesures appropriées".
A Erbil, le président irakien Jalal Talabani a jugé impossible de livrer à la Turquie les chefs du PKK retranchés dans les montagnes, comme l'a demandé Ankara.
"Malgré sa puissance, l'armée turque ne peut pas les annihiler ou les arrêter. Alors comment pourrions-nous les arrêter et les livrer à la Turquie?", a déclaré M. Talabani.
Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, s'est dit "très inquiet". La situation est "extrêmement dangereuse", a-t-il déclaré à la presse à Paris.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.