Page Précédente

Trois militantes kurdes tuées d'une balle dans la tête à Paris


Jeudi 10 janvier 2013 à 12h08

PARIS, 10 jan 2013 (AFP) — Trois militantes kurdes ont été tuées d'une balle dans la tête dans les locaux d'une association de leur communauté à Paris, où leurs corps ont été retrouvés dans la nuit de mercredi à jeudi.

"La scène peut laisser penser qu'il s'agit d'une exécution, mais l'enquête devra éclaircir les circonstances exactes de ce drame", a précisé une source policière.

Règlement de comptes au sein de la mouvance kurde lié aux négociations en cours entre Ankara et le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan, interdit en Turquie), action du mouvement d'extrême droite turc des "Loups gris", crime crapuleux, mobile personnel: plusieurs pistes sont envisageables, explique à l'AFP un spécialiste de la mouvance kurde en France, sous couvert de l'anonymat.

Une source policière évoque un regain d'activité parmi les activistes kurdes s'accompagnant de tentatives de règlements de comptes autour notamment du financement du PKK. La communauté kurde est régulièrement l'objet de l'intérêt de la justice et de la police françaises dans des dossiers de financement de ce parti, via des extorsions de fonds.

Evoquant "la détermination de certains militants extrémistes", la source policière explique que si la piste politique se confirmait, ce serait inquiétant "car les activistes auraient sans doute franchi un pas".

Devant l'immeuble qui abrite le Centre d'information du Kurdistan, rue Lafayette, à deux pas de la gare du Nord, le ministre de l'Intérieur Manuel Valls s'est refusé à tout commentaire quant à une éventuelle motivation politique.

"Nous sommes tous PKK"

Selon des représentants de la communauté, les victimes sont Fidan Dogan, 32 ans, permanente du centre d'information du Kurdistan et représentante en France du Congrès national du Kurdistan, Sakine Cansiz, présentée comme une membre fondatrice du PKK par des médias turcs, et Leyla Soylemez, une "jeune activiste". Leur nationalité n'a pas été précisée.

Dès l'annonce de ces assassinats, des centaines de Kurdes se sont rassemblés devant l'immeuble, scandant "Elles ne sont pas mortes", "Nous sommes tous PKK !", "Turquie assassin, Hollande complice!", "Les martyrs ne meurent jamais!", et agitant des drapeaux à l'effigie du chef emprisonné des rebelles kurdes Abdullah Öcalan.

Selon Leon Edart, responsable de la Fédération des associations kurdes, les trois femmes étaient seules mercredi à la mi-journée dans l'association, au premier étage d'un immeuble pourvu d'un digicode. Des proches, inquiets de ne pouvoir les joindre, se sont rendus sur place.

Selon la Fédération, ils ont vu des traces de sang sur la porte qu'ils auraient alors défoncée, découvrant les trois corps vers 01H00 du matin.

Sur la façade de l'immeuble, aucune plaque ne signale la présence du centre d'information du Kurdistan.

Ces assassinats surviennent au moment où, selon des médias turcs mercredi, Ankara et Abdullah Öcalan se sont mis d'accord sur le principe d'un arrêt des hostilités qui durent depuis 1984 et ont coûté la vie à plus de 45.000 personnes.

Le parti au pouvoir à Ankara a vu dans ce triple assassinat un possible "règlement de comptes" au sein du PKK. "Nous savons qu'il y a des dissensions, des clivages au sein du PKK", a déclaré Hüseyin Celik, vice-président du Parti de la justice et du développement (AKP, issu de la mouvance islamiste).

La France accueille 150.000 Kurdes dont 90% originaires de Turquie, selon une étude de 2006 de l'Institut kurde de Paris.

La section antiterroriste du parquet de Paris est saisie. Elle a confié l'enquête à la sous-direction antiterroriste (Sdat) et à la section antiterroriste (SAT) de la brigade criminelle de la police judiciaire.

Les corps des trois victimes étaient en cours d'acheminement à l'institut médico-légal vers midi.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.