Page Précédente

Syrie: Naturalisation de kurdes et loi abolissant l'état d'urgence rédigée


Jeudi 7 avril 2011 à 13h44

DAMAS, 7 avr 2011 (AFP) — Le chef de l'Etat syrien a mis fin jeudi à un contentieux d'un demi-siècle en naturalisant des dizaines de milliers de Kurdes tandis que la commission chargée de préparer l'abolition de la loi d'urgence a achevé ses travaux.

De leur côté, les opposants ont invité à des rassemblements jeudi devant les sièges du Baas pour le 64ème anniversaire de la fondation du parti et lancé des appels sur Facebook pour un "vendredi de la résistance pour manifester en dépit de nos blessures" et "des sit-in pacifiques jusqu'à la liberté".

"Le président Bachar al-Assad a promulgué un décret octroyant à des personnes enregistrées comme étrangères dans le gouvernorat de Hassaké la citoyenneté arabe syrienne", affirme le communiqué officiel.

Cette mesure concerne en principe environ 300.000 personnes.

En 1962, 20% des Kurdes de Syrie avaient été privés de leur citoyenneté à la suite de ce recensement controversé, et la question empoisonnait depuis la vie des personnes concernées et les rapports entre les autorités syriennes et la communauté kurde.

"Il s'agit d'une mesure positive", a réagi Radif Moustapha, président du comité kurde pour les droits de l'Homme. "Mais les Kurdes continueront à revendiquer leurs droits civiques, politiques culturels et sociaux", a-t-il affirmé à l'AFP.

Dans le même temps, "les juristes ont achevé de rédiger une nouvelle loi sur la sécurité remplaçant la loi d'urgence, et ont transmis jeudi leur texte au commandement régional du Baas", le parti au pouvoir depuis 1963, a affirmé à l'AFP un responsable proche du régime qui ne veut pas être identifié.

"Selon moi, le chef de l'Etat en prendra connaissance ce week-end et lancera ensuite une consultation auprès de différents représentants de la société civile", a-t-il ajouté. La nouvelle loi devrait être adoptée début mai par le Parlement.

L'abolition de cette loi adoptée en 1962 et qui réduit sensiblement les libertés publiques, est une des principales revendications des manifestants.

Le président Assad a de plus limogé jeudi Mohammad Iyad Ghazal, le gouverneur de Homs, à 160 km au nord de Damas, où des violences avaient eu lieu le 1er avril lors de manifestations, a annoncé l'agence officielle Sana.

Il s'agit du deuxième gouverneur démis en moins d'un mois par le chef de l'Etat, après celui de Deraa (sud), ville devenue l'épicentre de la contestation contre le régime.

Signe du changement depuis le début de la contestation mi-mars, les médias officiels, qui se distinguaient par leur langue de bois, ont changé de ton.

Le quotidien al-Baas a ainsi publié une tribune sur la loi d'urgence de Haytham Maleh, farouche défenseur des droits de l'Homme et opposant de longue date, libéré de prison il y juste un mois.

Autre nouveauté, la télévision syrienne donne depuis plusieurs jours la parole à des citoyens de différentes régions qui expriment leurs revendications, en majorité à caractère social. Certains affichent même leur désir de voir l'abolition de la loi d'urgence et même de l'article 8 de la Constitution sur le rôle central du parti Baas dans la société et l'Etat.

"Nous avons commencé il y a près d'une semaine ce programme qui s'intitule +Ce que les gens veulent+ et nous débuterons la semaine prochaine une autre émission sur la corruption", a affirmé une responsable de la télévision, qui a tenu à garder l'anonymat.

Les mesures répressives n'ont pas cessé pour autant.

Deux opposants, Rarghida Hassan et Ammar Cheikh Haïdar, ont été condamnés à deux ans de prison par un tribunal militaire de Homs, et trois autres jugés par contumace ont écopé de trois ans, pour avoir "propagé des informations mensongères susceptibles de nuire au moral de la nation", a affirmé Me Khalil Mattouk, président du Centre syrien de défense des prisonniers d'opinion.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.