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Syrie: des blessés et des combattants kurdes quittent une ville assiégée par les forces d'Ankara


Dimanche 20 octobre 2019 à 16h30

Ras al-Ain (Syrie), 20 oct 2019 (AFP) — Des combattants kurdes ont quitté dimanche la ville frontalière syrienne de Ras al-Aïn assiégée par les forces d'Ankara, un premier retrait depuis un accord de trêve dans le nord-est de la Syrie, négocié par Washington et expirant théoriquement dans deux jours.

Annoncé jeudi, ce cessez-le-feu prévoit la suspension pour 120 heures de l'offensive lancée le 9 octobre par la Turquie pour permettre un retrait des combattants kurdes (YPG) des zones frontalières, et la mise en place d'une "zone de sécurité" de 32 km de largeur en territoire syrien le long de la frontière.

Un convoi transportant des blessés et des combattants des Forces démocratiques syriennes (FDS), dominées par les YPG, mais aussi des dépouilles a quitté dimanche la ville de Ras al-Aïn, assiégée par les forces turques et leurs supplétifs syriens, selon un correspondant de l'AFP sur place.

Plus de 50 véhicules, dont des ambulances, ont quitté l'hôpital de la ville faisant office de ligne de démarcation entre les belligérants, a-t-il constaté, affirmant avoir vu des flammes s'élever de l'hôpital après le départ du convoi.

L'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) avait auparavant indiqué qu'au total, 41 dépouilles --28 combattants des FDS et 13 civils-- se trouvaient dans le seul hôpital de la ville ou dans des cimetières provisoires.

- Youyous -

Le convoi est arrivé à Tal Tamr, plus au sud, où des habitants réunis sur la place principale les ont accueillis par des youyous et slogans en soutien aux FDS, a constaté un correspondant de l'AFP.

Il n'a pas été possible dans l'immédiat de confirmer côté kurde s'il y aurait un retrait total, ni si le départ des combattants dimanche s'inscrivait dans le cadre de l'application de l'accord de trêve. Une source kurde s'est contentée d'évoquer un "plan de retrait".

Le ministère turc de la Défense a confirmé dans un communiqué le retrait, affirmant qu'un "convoi de 86 véhicules" est parti de Ras al-Aïn "en direction de Tal Tamr".

Le président américain Donald Trump a affirmé que "le cessez-le-feu tient très bien", dans un tweet citant son ministre de la Défense, Mark Esper. "Il y a eu des accrochages mineurs qui se sont vite terminés. Les Kurdes se réinstallent dans de nouvelles zones", selon M. Esper.

C'est la première fois que des combattants des FDS sortent de Ras al-Aïn. Samedi, l'Observatoire avait rapporté l'évacuation par un convoi médical de 30 blessés de la ville, et de quatre personnes ayant succombé à leurs blessures.

A quelques mètres de l'hôpital, Walid Azza, un responsable d'un groupe syrien proturc a dit à l'AFP avoir reçu des informations sur "une opération de retrait total des FDS et des blessés" qui doit se dérouler par étapes.

"Les Etats-Unis ont l'obligation de faciliter le retrait des YPG et de ramasser leurs armes", a affirmé dimanche Fahrettin Altun, porte-parole de la présidence turque.

Cette trêve est ponctuée de combats et bombardements sporadiques dans l'ouest et le nord-ouest de Ras al-Aïn, d'après l'OSDH.

Dans la zone de Tal Abyad, à l'ouest, un soldat turc a été tué et un autre blessé, a indiqué dimanche le ministère turc de la Défense.

Depuis jeudi, les forces kurdes et Ankara s'accusent mutuellement de violer l'accord de trêve.

L'offensive turque contre les forces kurdes a été lancée après un retrait le 7 octobre des soldats américains de secteurs frontaliers à la suite d'une annonce de Donald Trump, ouvrant la voie à l'opération.

Et le 13 octobre, les Etats-Unis avaient annoncé le retrait de quelque 1.000 militaires américains déployés dans le nord et l'est de la Syrie en guerre.

- Retrait américain -

Dimanche, plus de 70 véhicules blindés arborant un drapeau américain et transportant du matériel militaire ont traversé la route internationale en passant par la ville de Tal Tamr, escortés par des hélicoptères, a constaté le correspondant de l'AFP.

Selon l'OSDH, le convoi s'est retiré de la base de Sarrine, près de la ville de Kobané, et s'est dirigé vers la province de Hassaké plus à l'est.

"Il s'agit de la plus grande base militaire américaine dans le nord et du quatrième départ des forces américaines d'une base en Syrie", a indiqué à l'AFP le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane.

Ces derniers jours, les Américains se sont retirés de trois autres bases, dont celle de la ville clé de Minbej et d'une autre située aussi près de Kobané, près de la frontière turque.

Désormais, toutes les bases dans les provinces de Raqa et d'Alep "sont vides de toute présence militaire américaine", a précisé M. Abdel Rahmane. Les Etats-Unis conservent encore des positions dans les provinces de Deir Ezzor et de Hassaké, selon lui.

Depuis le lancement de leur offensive le 9 octobre, les forces turques et leurs supplétifs syriens ont conquis une bande frontalière de près de 120 km entre Tal Abyad et Ras al-Aïn.

L'offensive a tué 114 civils et déplacé 300.000 autres, selon l'OSDH.

Les combats et les bombardements ont également tué 256 membres des FDS contre 196 combattants pro-Ankara.

L'offensive lancée par Ankara a ouvert un nouveau front dans le conflit syrien qui dure depuis 2011, et a rebattu les cartes dans le nord du pays.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.