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Séisme en Turquie: un élan de solidarité sur fond de tensions


Mardi 25 octobre 2011 à 12h14

ANKARA, 25 oct 2011 (AFP) — Le séisme meurtrier qui a touché la région kurde de la Turquie, a provoqué un élan de solidarité nationale pour cette région défavorisée de longue date, semblant pour l'instant apaiser des tensions ethniques toujours vives.

L'Etat turc s'est mobilisé pour secourir les rescapés du tremblement de terre d'une magnitude de 7,2 qui a fait, selon un dernier bilan, 366 morts, tandis que l'armée poursuit une offensive contre les rebelles kurdes plus au sud, à la frontière avec l'Irak et dans les montagnes de ce pays voisin.

Si l'on compare avec les précédents séismes, les secours se sont assez vite organisés, mais certains s'estiment défavorisés dans la distribution de l'aide.

"Dans l'autre camp (de sinistrés), celui où sont logés toutes les familles de militaires et de fonctionnaires, celui que les ministres vont visiter (...), il y a des repas chauds, il y a le chauffage", affirme Necdet à l'AFP à Ercis, ville ravagée par le séisme.

"Nous, on ne s'occupe pas de nous parce qu'on est Kurdes", dit-il.

Des soupçons pèsent aussi sur la mairie d'Ercis, aux mains du Parti de la justice et du développement (AKP, au pouvoir), que certains accusent de favoriser ses électeurs, les tribus conservatrices des villages alentour, kurdes elles aussi, mais sans revendications identitaires.

Larmée, qui a envoyé 10.000 hommes combattre le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), a pourtant dépêché 3.000 hommes à Van et le Croissant-Rouge y a envoyé des milliers de tentes et 22.000 couvertures.

Le Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, s'est immédiatement rendu sur les lieux pour montrer que l'Etat était sur le pont.

Le séisme est intervenu au moment où la Turquie avait pour unique ordre du jour la brûlante question kurde et l'offensive menée contre le PKK qui a tué la semaine dernière 24 soldats, attisant les tensions ethniques.

Depuis l'été, le PKK a multiplié ses attaques et le gouvernement a répondu en arrêtant plusieurs centaines de militants kurdes.

Dimanche, au moment où la terre tremblait à Van, des dizaines de milliers de Turcs manifestaient à travers le pays pour dénoncer les opérations du PKK, désigné comme une organisation terroriste par bon nombre de pays.

Mais, les images de la détresse des sinistrés de Van diffusées en boucle par les télévisions ont ému la Turquie, semblant faire oublier, pour un temps, les dissensions ethniques.

Cette tragédie sonne comme un appel à la réconciliation, affirme ainsi le quotidien Milliyet.

"Le temps est venu dans notre pays de réfléchir à panser les plaies et à arrêter le cycle de la mort. Qu'au moins la tragédie de Van serve à cela", soulignait une éditorialiste de ce journal.

Signe de détente: le débat parlementaire sur le conflit kurde prévu mercredi au parlement a été repoussé. Dans la foulée, les élus kurdes ont retiré une motion de censure déposée contre le ministre de l'Intérieur.

Le chef de file des députés kurdes, Selahattin Demirtas, a salué la solidarité envers Van. "Ces aides ont une odeur de fraternité" turco-kurde, a-t-il dit.

Et les appels aux dons se multipliaient pour une population déjà meurtrie par le conflit kurde, depuis 1984.

"Nous voulons aider nos concitoyens qui souffrent et leur montrer que nous sommes solidaires avec eux", a expliqué à l'AFP Nermin Börü, la propriétaire d'une école maternelle d'Ankara qui a lancé une collecte de vêtements auprès des parents d'élèves.

Et nombre de Turcs des villes de l'ouest ont envoyé de l'aide à Van.

Reste que le drame n'a pas suffit à retenir les réactions hostiles à la population kurde, notamment sur Facebook ou Twitter. Et sur le plateau de la chaîne privée ATV, une animatrice de télévision a lancé : "ils (les Kurdes) tuent comme des oiseaux la police et les soldats mais demandent après qu'on vienne les aider".

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.