Mardi 10 octobre 2006 à 17h33
BAGDAD, 10 oct 2006 (AFP) — Le procès de Saddam Hussein pour génocide des populations kurdes a été suspendu après une nouvelle journée d'audience tumultueuse mardi, marquée par l'expulsion de l'ancien président puis des six autres accusés.
Parallèlement, la violence a continué de tuer en Irak, avec la découverte par la police de soixante corps à Bagdad ces dernières 24 heures et la mort de 10 personnes dans un attentat à la bombe devant une boulangerie dans la capitale irakienne.
Les corps, dont la plupart portaient la trace d'une exécution par balle à bout portant, ont été découverts dans plusieurs quartiers de Bagdad sur fond de violences confessionnelles entre chiites et sunnites.
Au procès de Saddam Hussein, alors que les premiers témoignages des victimes kurdes sur les horreurs des camps de détention de l'ancien régime avaient été écoutés dans le calme mardi matin, une dispute a éclaté avec le juge Mohammed al-Oreibi al-Khalifa lorsque l'ancien chef de l'Etat a déclamé un verset du Coran: "Combats les et Dieu t'accordera la victoire". Le juge a alors fermé le microphone et expulsé Saddam Hussein.
Comme c'est devenu la règle, un autre accusé, Hussein Rachid al-Tikriti, ancien commandant adjoint des forces armées, s'est mêlé à la querelle. Il a demandé à sortir en accusant le tribunal d'être composé de "souteneurs et de traîtres" puis a envoyé un coup de poing à un huissier. Il a été expulsé à son tour.
Un troisième accusé, Ali Hassan al Majid, ancien ministre de la Défense, a alors lancé: "Je veux que le verdict soit rendu tout de suite. Je veux être exécuté et en finir avec ce procès".
Les débats ont continué à huis clos. Il a ensuite été levé alors que tous les accusés étaient absents du tribunal.
La quinzième journée d'audience de ce procès devant le haut tribunal pénal irakien, qui siège dans la zone fortifiée de Bagdad, se tiendra mercredi.
Des femmes ont décrit les viols brutaux et autres violences sauvages dont elles ont été les témoins il y a près de vingt ans, dans les camps de la mort où étaient détenus les kurdes alors que leurs villages étaient bombardés.
Une Kurde a raconté qu'elle a vu, dans un camp, "une femme obligée à donner naissance à un enfant dans des toilettes. Nous avons dû couper le cordon ombilical à l'aide d'un tesson de bouteille et envelopper le bébé dans une toile grossière", a-t-elle dit devant la cour, dissimulée derrière un rideau pour protéger son identité.
Un autre témoin anonyme a raconté que des prisonniers avaient fini par attaquer l'auteur de viols après qu'une de ses victimes se soit donné la mort, mais qu'ils avaient ensuite été sauvagement battus en représailles.
Depuis le début du procès le 21 août, les témoins décrivent, en des termes similaires, la fuite ou la mort des habitants après l'attaque de leurs villages aux armes chimiques, la séparation des familles, l'agonie des victimes volontairement mal soignées dans les hôpitaux, les conditions dégradantes de détention dans des prisons sordides du sud de l'Irak.
L'ancien président irakien et Hassan al-Majid, surnommé Ali le chimique pour son rôle dans les bombardements chimiques des zones civiles, sont accusés de génocide.
En outre, tous deux et leurs cinq autres co-accusés, sont poursuivis pour crime de guerre et crime contre l'humanité contre les Kurdes pour avoir ordonné et exécuté les campagnes militaires d'Anfal, en 1987-1988, qui ont fait plus de 180.000 morts au Kurdistan, selon l'accusation.
Tous risquent la peine de mort.
Les avocats de la défense boycottent le procès pour protester contre la nomination en septembre du juge Mohammed al-Oreibi al-Khalifa due, selon eux, à une intervention du gouvernement.
En l'absence des avocats habituels, la défense de Saddam Hussein et de ses co-accusés est assurée par des avocats commis d'office mais que les accusés récusent.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.