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Répression et chagrin en Iran, un an après la mort de Mahsa Amini


Samedi 16 septembre 2023 à 03h50

Paris, 16 sept 2023 (AFP) — Les Iraniens opposés au régime de la République islamique marquent samedi le premier anniversaire de la mort en détention de la jeune Mahsa Amini, qui a déclenché des mois de protestations, des militants dénonçant une nouvelle répression en cours pour décourager toute résurgence des manifestations.

Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans, est décédée après son arrestation le 16 septembre 2022 pour avoir prétendument enfreint le code vestimentaire strict des femmes, l'un des piliers idéologiques de la République islamique depuis la chute du shah laïc en 1979.

Sa famille affirme qu'elle est décédée des suites d'un coup à la tête, mais les autorités nient cette version des faits.

Sa mort a été suivie par des semaines de manifestations de colère, menées en grande partie par des femmes, qui ont ouvertement défié le régime et ébranlé les autorités du guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei.

Mais après plusieurs mois, elles ont perdu leur élan face à une répression qui a vu 551 manifestants, dont 68 enfants et 49 femmes, tués par les forces de sécurité, selon l'organisation iranienne Human Rights (IHR) basée en Norvège, et plus de 22.000 autres arrêtés, selon Amnesty International.

Sept hommes ont également été exécutés dans des dossiers liés à ces manifestations.

Les militants affirment que la répression s'est intensifiée à l'approche du premier anniversaire, ciblant notamment les proches des personnes tuées lors des manifestations pour s'assurer qu'ils ne s'expriment pas.

L'ONG Human Rights Watch (HRW) a indiqué que les membres des familles d'au moins 36 personnes tuées ou exécutées lors de la répression ont été interrogés, arrêtés, poursuivis ou condamnés à une peine de prison au cours du mois dernier.

- "Doubler la mise" -

"Les autorités iraniennes tentent d'étouffer la dissidence pour empêcher la commémoration publique de la mort en détention de Mahsa Jina Amini, devenue le symbole de l'oppression systématique des femmes, de l'injustice et de l'impunité par le gouvernement", a déclaré Tara Sepehri Far, chercheuse sur l'Iran à HRW.

Les deux journalistes qui ont le plus suivi l'affaire, Niloufar Hamedi et Elahe Mohammadi, sont emprisonnées depuis près d'un an, tandis qu'une autre, Nazila Maroufian, qui a interviewé le père de Mahsa, Amjad Amini, a été détenue à plusieurs reprises.

M. Amini a déclaré aux médias persans basés hors d'Iran qu'il entendait organiser la commémoration de la mort de sa fille dans leur ville natale de Saqez, dans le nord de l'Iran, à population kurde.

Des médias, dont Radio Farda, basée à Prague, ont déclaré qu'il avait été convoqué par des responsables des services de renseignement après cette annonce. Il n'a pas été arrêté mais l'un des oncles de Mahsa Amini, Safa Aeli, a été arrêté à Saqez le 5 septembre.

Selon l'ONG Hengaw qui suit la situation des Kurdes, le gouvernement a envoyé des forces de sécurité supplémentaires à Saqez et dans d'autres villes qui pourraient devenir des zones sensibles ce week-end.

- "Meurtre de masse extrajudiciaire" -

Par ailleurs, un projet de loi connu sous le nom de "Soutien à la culture du hijab et de la chasteté" est à présent devant le Parlement, demandant des sanctions beaucoup plus sévères pour la violation de la loi en vigueur.

Amnesty International a accusé l'Iran d'avoir commis une "litanie de crimes au regard du droit international pour éradiquer toute contestation de son emprise de fer sur le pouvoir", déplorant qu'aucun responsable n'ait fait l'objet d'une enquête sur la mort de Mahsa Amini ou sur la répression.

Pour sa part, l'IHR a souligné que l'Iran a intensifié les pendaisons pour tous les délits, en particulier pour les crimes liés à la drogue, afin d'envoyer un message à l'ensemble de la société, avec plus de 500 personnes exécutées cette année seulement.

"Ce à quoi nous sommes confrontés aujourd'hui en Iran n'est pas la peine de mort, mais l'exécution extrajudiciaire de masse des personnes les plus marginalisées pour semer la peur et empêcher le déclenchement de nouvelles manifestations", a fait valoir Mahmood Amiry-Moghaddam, directeur d'IHR.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.