Jeudi 24 janvier 2008 à 18h27
STRASBOURG (Conseil Europe), 24 jan 2008 (AFP) — La Turquie a été condamnée jeudi à Strasbourg par la Cour européenne des droits de l'Homme pour n'avoir pas fait la moindre enquête sur la disparition depuis 11 ans d'un jeune épicier kurde de Diyarbakir, malgré les témoignages de sa famille et des voisins.
Le père du jeune homme, Muhyettin Osmanoglu, âgé de 68 ans et propriétaire d'une épicerie en gros, recevra un total de 90.000 euros pour dommages moral et matériel, dont une partie reviendra à la compagne de son fils et à ses héritiers.
M. Osmanoglu et ses voisins avaient été témoins en mars 1996 de l'enlèvement du jeune homme, emmené par deux hommes armés et munis de talkies-walkies qui lui déclarèrent qu'ils étaient policiers et qu'ils conduisaient son fils à la sûreté.
Depuis cette date, Attila Osmanoglu n'a plus donné signe de vie et son corps n'a jamais été identifié.
Le père a demandé à six reprises à la police ce qu'il était advenu de son fils, mais les responsables lui répondirent qu'il ne figurait pas sur les registres de garde à vue.
En 2006, un quotidien publia les aveux d'un ancien agent des services anti-terroristes de la gendarmerie qui décrivait l'enlèvement et le meurtre d'Attila Osmanoglu, expliquant qu'on lui avait fracassé le crâne avec un marteau pour qu'on ne puisse plus identifier la victime.
Le gouvernement turc a cependant démenti toute implication des forces de l'ordre dans la disparition et l'homicide du jeune homme et refusé d'ouvrir une enquête sur des allégations vagues qui reposaient sur des ouï-dire.
Pour la Cour européenne, la totale inertie des autorités turques dans cette affaire est "incompréhensible" et "illogique". La Turquie, a-t-elle conclu, violé l'article 2 de la Convention européenne des droits de l'Homme qui protège le droit à la vie ainsi que l'article 3 (interdiction des traitements inhumains) en infligeant au père du disparu une telle angoisse et un désarroi depuis onze ans.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.