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Ouverture du procès de sept militants d'ultragauche pour association de malfaiteurs terroriste


Mardi 3 octobre 2023 à 15h56

Paris, 3 oct 2023 (AFP) — Le procès pour association de malfaiteurs terroriste de sept sympathisants de la mouvance ultragauche, soupçonnés d'avoir projeté des actions violentes contre des policiers et des militaires, s'est ouvert mardi devant le tribunal correctionnel de Paris.

La présidente du tribunal a ouvert l'audience peu avant 14H00, devant une salle comble, en passant en revue les demandes de citations de témoins par les avocats de la défense.

Les sept prévenus ont ensuite commencé à décliner tour à tour leur identité à la barre.

Ils comparaissent pour association de malfaiteurs terroriste et, pour trois d'entre eux, également pour "refus de remettre une convention secrète de chiffrement d'un moyen de cryptologie".

A l'origine du dossier, un rapport de la DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure) sur un projet d'action violente fomenté par des militants d'ultragauche. Leur leader serait un militant libertaire aujourd'hui âgé de 39 ans, Florian D., ayant combattu en 2017 auprès des Kurdes des Unités de protection du peuple (YPG) au Rojava (nord-est de la Syrie) contre le groupe Etat islamique.

Après plusieurs mois de surveillance et d'écoutes, les suspects sont interpellés le 8 décembre 2020, en divers endroits de France (Toulouse, Rennes ou encore Vitry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne), puis mis en examen. Lors des perquisitions, les forces de l'ordre retrouvent notamment des produits servant à fabriquer des explosifs et des armes.

Les mis en cause sont soupçonnés d'avoir participé à des "entraînements de progression tactique et de tir" dans une maison abandonnée en Haute-Garonne et fabriqué et testé des explosifs, en vue d'"abattre les institutions républicaines" en s'en prenant à des policiers et militaires, selon la justice qui se base sur des conversations écoutées par les enquêteurs.

Aucun passage à l'acte imminent n'a toutefois été envisagé.

- Demande de renvoi -

Devant les enquêteurs, ils évoquent pour leur part des parties d'airsoft et reconnaissent avoir confectionné des explosifs, mais selon les mots de Florian D., uniquement pour fabriquer un "gros pétard" dans un but ludique.

A la barre, ce dernier, cheveux gris ras et tee-shirt bleu marine, a indiqué qu'il était désormais cuisinier à temps partiel.

Un de ses avocats, Me Raphaël Kempf, a ensuite plaidé une demande de renvoi du procès, s'appuyant sur une récente décision du Conseil constitutionnel, qui a donné raison à l'ancien Premier ministre François Fillon sur une question de procédure.

Il a indiqué s'interroger sur "les conditions dans lesquelles la DGSI (avait) procédé à des surveillances" de son client entre son retour du Rojava en janvier 2018 et février 2020, quand le parquet national antiterroriste a ouvert une enquête préliminaire, évoquant une potentielle "violation" de sa vie privée.

La défense des prévenus a tenté en vain de faire citer des agents de la DGSI au procès.

Un des représentants du ministère public a demandé le rejet de cette demande de renvoi, estimant qu'elle n'était que "dilatoire".

La présidente a suspendu l'audience pour statuer sur cette demande.

Avant le début de l'audience, vers midi, une cinquantaine de personnes, souvent le visage dissimulé derrière un masque chirurgical, s'étaient réunies devant le tribunal judiciaire.

Les manifestants ont enchaîné les prises de parole au micro et chanté en soutien aux prévenus le refrain "on n'est pas des terroristes, juste révolutionnaires", sur l'air de "Mourir sur scène" de Dalida.

Plusieurs d'entre eux ont ensuite affiché le message entre lettres noires "Ne nous laissons pas anti-terroriser" en craquant un fumigène violet.

"Ce procès a une dimension politique, comme ce qui s'est passé à Sainte-Soline" (Deux-Sèvres), a affirmé Doris, retraitée et ex-libraire indépendante, qui n'a pas souhaité donner son nom complet.

Avant cette affaire, la dernière saisine connue de la justice antiterroriste pour des faits liés à l'ultragauche remonte à l'affaire de Tarnac en 2008, pour des soupçons de sabotage de lignes TGV.

Mais les qualifications terroristes, objet d'un âpre débat, avaient été abandonnées par la justice avant le procès, qui s'était conclu en 2018 par une relaxe quasi générale. "+Le groupe de Tarnac+ était une fiction", avait conclu la présidente du tribunal.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.