Lundi 30 mars 2009 à 13h34
ANKARA, 30 mars 2009 (AFP) — La Turquie souffle le chaud et le froid sur une candidature du Premier ministre danois Rasmussen à l'Otan, qu'elle a de nouveau critiqué, tandis que le Danemark vient de faire un geste à l'égard d'Ankara, tout en jurant qu'il n'y faut voir "aucun lien" avec la question de l'Otan.
A quelques jours d'un sommet de l'Otan (3-4 avril), qui pourrait décider de la succession en août de l'actuel secrétaire général de l'Alliance, le Néerlandais Jaap de Hoop Scheffer, le Danemark vient d'envoyer une mission à Ankara pour enquêter sur un différend de longue date avec la Turquie.
Trois procureurs danois étaient jeudi et vendredi dans la capitale turque pour enquêter sur la télévision kurde Roj TV, qui émet au Danemark, et que la Turquie veut voir fermée, l'affirmant liée au mouvement armé kurde interdit du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), a indiqué à l'AFP l'ambassadeur du Danemark en Turquie, Jesper Vahr.
"Nous travaillons en étroite collaboration avec les autorités turques sur cette enquête", a ajouté le diplomate.
Il s'agit d'établir si oui ou non Roj TV entretient des liens avec le PKK, mouvement en lutte armée depuis 1984 dans l'est du pays que le Danemark "condamne" comme organisation terroriste, comme les autres membres de l'Union européenne.
Cette démarche danoise n'a cependant "aucun lien avec la question de l'Otan" et de l'approbation ou non par la Turquie d'une candidature de M. Rasmussen, a insisté M. Vahr.
L'interdiction de Roj TV a pourtant été réclamée à nouveau vendredi par le Premier ministre turc, dans une interview où il n'a pas manqué de lier cette question à celle de l'Otan, dont la Turquie est un membre stratégique, par sa situation entre Europe, Caucase et Proche Orient.
Le chef du gouvernement turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré qu'il avait expliqué personnellement au téléphone à son homologue danois Anders Fogh Rasmussen ses réticences à sa candidature au poste de secrétaire général de l'Otan.
M. Rasmussen n'a pas donné suite aux demandes de la Turquie de fermer Roj TV, a-t-il regretté, ajoutant: "Cela fait quatre ans, et ils n'ont pas réglé le problème".
Le Premier ministre turc, dont le Parti pour la justice et le développement (AKP) est issu de la mouvance islamiste, a aussi expliqué à M. Rasmussen que sa candidature suscite la contrariété des musulmans, après l'affaire des caricatures de Mahomet, publiées en 2005 par un journal danois.
M. Rasmussen, dont la candidature -- appuyée par les Etats-Unis -- semble bien partie sauf en cas de veto formel d'Ankara, avait défendu ces dessins satiriques au nom de la liberté d'expression.
Soufflant le chaud et le froid dans cette affaire, le président turc, Abdullah Gül, a laissé entendre vendredi à Bruxelles que son pays ne s'opposerait pas à une désignation de M. Rasmussen.
"Nous n'avons pas de position particulière contre le Premier ministre ou tout autre, de ce point de vue", a déclaré M. Gül.
Il a ajouté que M. Rasmussen "est en Europe l'un des Premiers ministres les plus importants et l'un de ceux qui ont eu le plus de réussite".
Des propos ambigus qui font dire à un diplomate européen à Ankara: "Certains jours c'est noir, d'autres blanc, et parfois gris".
"Le sentiment est que la Turquie veut pour l'instant +garder des munitions+, mais qu'elle est seule, et qu'elle finira par rentrer dans le rang", a commenté un autre diplomate européen.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.