Mardi 26 février 2008 à 17h13
AMADIYAH (Irak), 26 fév 2008 (AFP) — Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a estimé mardi que la Turquie exerçait son droit à "l'autodéfense" en combattant les rebelles kurdes dans le nord de l'Irak, alors que Bagdad a condamné l'incursion comme une "violation de la souveraineté de l'Irak".
"L'opération transfrontalière menée par la Turquie est le résultat de son droit légitime à l'autodéfense", a affirmé M. Erdogan devant le groupe parlementaire de son parti.
"La Turquie mène un combat juste contre une organisation terroriste qui menace la paix et la stabilité régionales (...) La Turquie a le droit de se défendre elle-même, d'éliminer ceux qui portent atteinte à la paix, l'unité et la solidarité de ses citoyens", a-t-il ajouté.
M. Erdogan a fait valoir que la présence des rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), cibles de l'offensive menée depuis jeudi soir par l'armée turque, était aussi "un élément d'instabilité politique pour l'Irak".
Le gouvernement irakien n'en a pas moins condamné mardi l'incursion turque.
"Lors d'une réunion aujourd'hui, le cabinet a fait part de son rejet et de sa condamnation de l'incursion de l'armée turque qui est considérée comme une violation de la souveraineté de l'Irak", a indiqué le gouvernement dans un communiqué diffusé par son porte-parole Ali al-Dabbagh.
Les Etats-Unis, qui fournissent depuis plusieurs mois des renseignements en temps réel sur les déplacements des rebelles et dont le secrétaire à la Défense Robert Gates doit se rendre mercredi à Ankara, ont appelé lundi à un retrait rapide des troupes turques.
La Turquie a indiqué qu'elle retirerait ses troupes aussitôt leur mission achevée mais n'a pas donné d'échéance.
Sur le terrain, de fortes chutes de neige ont "partiellement" empêché mardi la poursuite de l'opération, a annoncé dans un communiqué l'état-major turc, précisant que l'aviation et l'artillerie avaient pu poursuivre leurs bombardements.
Des membres des forces armées kurdes de la région autonome du nord de l'Irak avaient auparavant fait état de combats près du camp de Zap, un des principaux points de passage utilisés par les rebelles pour s'infiltrer en Turquie, situé dans une profonde vallée à six kilomètres de la frontière turque.
Ces sources avaient également mentionné des affrontements dans la région montagneuse de Hakurk, un des principaux bastions du PKK, plus à l'est et à une vingtaine de kilomètres de la frontière turque.
L'état-major turc a affirmé que deux soldats turcs ont été tués par des "tirs de harcèlement" dans la nuit de lundi à mardi mais a indiqué ne pas pouvoir donner de bilan des pertes chez les rebelles en raison des conditions météorologiques.
Ces décès portent à 19 le nombre de soldats tués depuis le lancement de l'opération jeudi soir contre les rebelles, dont les pertes se maintiennent à au moins 153 selon le décompte de l'état-major.
Le dernier bilan fourni par le PKK faisait état d'au moins 81 soldats et de trois rebelles tués.
Le principal parti pro-kurde de Turquie, le Parti pour une société démocratique (DTP), a appelé mardi à un arrêt des combats.
"L'Histoire punira les fauteurs de guerres, ceux qui se nourrissent de sang et qui font de la politique sur le sang versé", a affirmé devant les députés du DTP le président de leur groupe parlementaire, Ahmet Türk, cité par l'agence de presse Anatolie.
A Van, une ville de l'est de la Turquie à la population en majorité kurde, neuf personnes ont été arrêtées après des heurts entre manifestants anti-incursion et forces de police qui on fait 12 blessés légers, dont quatre policiers, selon Anatolie.
Ankara estime à 4.000 le nombre de rebelles retranchés dans le nord de l'Irak. Le conflit kurde en Turquie a fait plus de 37.000 morts depuis le début en 1984 de l'insurrection du PKK, considéré comme une organisation terroriste par la Turquie, l'Union européenne et les Etats-Unis.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.