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Manifestations: l'Iran accuse les Etats-Unis de vouloir déstabiliser le pays


Jeudi 13 octobre 2022 à 13h59

Paris, 13 oct 2022 (AFP) — Le président iranien a accusé jeudi les Etats-Unis de chercher à déstabiliser son pays, confronté depuis près d'un mois à des manifestations déclenchées par la mort de Mahsa Amini, une mobilisation qui ne faiblit pas malgré la répression accrue.

Le décès le 16 septembre de cette Kurde iranienne de 22 ans a déclenché la plus grande vague de manifestations et de violence que la République islamique ait connue depuis près de trois ans. La jeune femme avait été arrêté trois jours auparavant par la police des moeurs à Téhéran pour avoir, selon celle-ci, enfreint le code vestimentaire strict de la République islamique pour les femmes, prévoyant notamment le port du voile.

Depuis, des jeunes femmes, étudiantes et écolières sont à l'avant-garde des manifestations au cours desquelles elles scandent des slogans anti-gouvernementaux, mettent le feu à leur foulard et affrontent les forces de sécurité dans les rues.

"Femme, vie, liberté" -- slogan du mouvement de contestation -- ont à nouveau été scandés dans la nuit de mercredi à jeudi à Boukan (nord-ouest), ville où des manifestants ont brûlé le drapeau iranien, selon une vidéo vérifiée par l'AFP.

Le mouvement de contestation en Iran, le plus important depuis celui de 2019 contre la hausse du prix de l'essence, a entraîné des manifestations de solidarité dans de nombreuses villes du monde ainsi que des sanctions américaines et européennes visant des responsables iraniens impliqués dans la répression des manifestations qui a fait des dizaines de morts et entraîné des centaines d'arrestations.

Une nouvelle fois jeudi, le régime iranien s'en est pris aux Etats-Unis, accusant son ennemi juré d'être responsable de la situation: "Washington et ses alliés ont recours à une politique de déstabilisation vouée à l'échec", a déclaré le président ultraconservateur, Ebrahim Raïssi.

- Répression croissante -

La répression des manifestations a déjà fait au moins 108 morts, selon des ONG. Des coups de feu et des gaz lacrymogènes ont de nouveau été tirés contre des manifestants descendus dans la nuit dans tout le pays, notamment dans les villes d'Ispahan (sud), de Machhad (nord-est), de Rasht (nord), de Saghez (ville natale d'Amini) et de la capitale Téhéran.

Des vidéos en ligne montrent des manifestants qui affrontent les forces de sécurité cherchant à les arrêter, obligeant parfois des policiers à fuir.

Sur une vidéo vérifiée par l'AFP, des femmes se font malmener par les forces de sécurité, notamment un homme qui semble être Armin Amoozad Haramzadeh, le gouverneur adjoint de Rasht, dans la province de Gilan.

Selon l'ONG Iran Human Rights (IHR), basée à Oslo, des ouvriers du secteur énergétique se sont joints au mouvement de contestation cette semaine en se mettant en grève à l'usine pétrochimique d'Asalouyeh (sud-ouest), à Abadan (ouest) et Bushehr (sud).

Des affrontements meurtriers ont frappé en particulier Sanandaj, capitale de la province du Kurdistan d'où est originaire Mahsa Amini. La ville de Zahedan (sud-est) a également été touchée par des violences déclenchées le 30 septembre lors de manifestations contre le viol présumé d'une jeune fille par un policier, qui ont fait au moins 93 morts, selon l'IHR.

Pour faire face à la contestation, les autorités iraniennes ont bloqué l'accès aux réseaux sociaux, notamment aux applications Instagram et WhatsApp, et lancé une campagne d'arrestations massives, alors que la répression s'accroît.

Et les juges en Iran ont reçu pour consigne de ne pas prononcer des peines "faibles" contre les "principaux éléments des émeutes", a rapporté jeudi le site d'information du pouvoir judiciaire en référence aux manifestations.

Dans un rapport publié mercredi, l'agence de presse Human Rights Activists News Agency (HRANA) a déploré "l'utilisation non réglementée de fusils de chasse à plomb par les forces de l'ordre provoquant des blessures chez de nombreux manifestants", notamment contre des personnes âgées, des adolescents ou même des enfants.

"Le nombre de détenus est estimé à au moins 5.500 personnes" depuis le début du mouvement, selon HRANA.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.