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Manifestations en Iran pour marquer l'anniversaire de la répression en 2019


Mardi 15 novembre 2022 à 16h59

Paris, 15 nov 2022 (AFP) — Des Iraniens sont à nouveau descendus dans les rues mardi après un appel lancé par les organisateurs de manifestations contre la mort de Mahsa Amini, pour commémorer la répression meurtrière des troubles provoqués en novembre 2019 par une hausse du prix du carburant.

Un mouvement de protestation, réprimé lui aussi, secoue la République islamique depuis la mort, il y a deux mois, de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans arrêtée pour infraction au code vestimentaire strict qui oblige les femmes à porter le voile islamique en public.

Sur fond de vacarme de klaxons, des manifestants ont bloqué un grand rond-point de Téhéran, scandant "Liberté, liberté", selon des vidéos vérifiées par l'AFP.

Alors que la nuit tombait, certains se sont réunis autour de feux, scandant "Mort au dictateur", un slogan visant le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, selon une vidéo publiée par le média en ligne 1500tasvir.

Des gens ont défilé dans d'autres villes, notamment Bandar Abbas (sud) et Chiraz (sud), où des femmes ont été vues en train de brandir leur foulard au-dessus de leur tête.

A Sanandaj (nord-ouest), des manifestants ont brûlé des pneus et scandé des slogans contre le gouvernement, selon une autre vidéo.

- Magasins fermés -

"Femme, vie, liberté" et "Homme, patrie, prospérité", ont crié des étudiants à l'université islamique d'Azad à Tabriz (nord-ouest), peut-on voir sur une autre vidéo diffusée par 1500tasvir.

Un appel à la grève avait été aussi lancé dans le pays.

Des magasins ont fermé dans le Grand Bazar de Téhéran, ainsi que dans les villes de Kerman (sud-est), Mahabad (nord-ouest), Chiraz et Yazd (centre), selon des vidéos publiées par la même source.

L'agence iranienne Mehr a fait état de la fermeture de la majorité des magasins dans le Grand Bazar, mais a cité un employé disant qu'ils avaient fermé après que des manifestants "ont menacé de (les) brûler".

Selon l'ONG de défense des droits des Kurdes d'Iran Hengaw, basée à Oslo, des arrêts de travail ont été observés dans la majeure partie de la province du Kurdistan (ouest), d'où était originaire Mahsa Amini.

L'appel à manifester mardi a été lancé pour marquer le troisième anniversaire du début des manifestations déclenchées en novembre 2019 par la hausse des prix du carburant, à l'origine de violences sanglantes dans de nombreuses ville du pays. Des postes de police avaient été attaqués, des magasins pillés, des banques et des stations-service incendiées.

Selon Amnesty International, au moins 304 personnes avaient été tuées au cours de ces violences. Et d'après les témoignages d'experts rapportés fin septembre devant un tribunal de Londres, le nombre de morts a même pu atteindre 1.515.

Depuis la colère déclenchée par la mort de Mahsa Amini le 16 septembre, les manifestations en Iran se sont multipliées puis transformées en un vaste mouvement contre le régime qui dirige le pays depuis la Révolution islamique de 1979.

- "Dureté croissante" -

Au moins 326 manifestants ont été tués dans la répression du mouvement, selon un bilan établi samedi par Iran Human Rights (IHR), une ONG basée à Oslo.

Ce chiffre comprend au moins 123 personnes tuées depuis le 30 septembre dans la province du Sistan-Baloutchistan (sud-est), après des manifestations provoquées par le viol présumé d'une jeune fille par un policier.

Les actions de protestation ne montrent aucun signe d'apaisement malgré la violente répression face à des manifestants largement pacifiques, selon des ONG de défense des droits humains, et une campagne d'arrestations massives incluant des militants, des journalistes et des avocats.

Parmi eux figure Hossein Ronaghi, défenseur de la liberté d'expression en grève de la faim, hospitalisé dimanche puis retourné en prison lundi soir après l'amélioration de son état de santé.

Le Haut-Commissariat aux droits de l'Homme a réclamé mardi la libération "immédiate" des milliers de personnes arrêtées pour avoir participé aux manifestations et dénoncé des peines de plus en plus sévères, comme une récente condamnation à la peine de mort d'un manifestant.

Il a encore dénoncé la "dureté croissante" des autorités face aux manifestations.

Lundi, l'Union européenne avait annoncé de nouvelles sanctions visant 29 responsables iraniens parmi lesquels le ministre de l'Intérieur, Ahmad Vahidi, et trois institutions, notamment la chaîne publique Press TV, accusée d'avoir diffusé "les aveux forcés" de détenus après la répression de manifestations contre la mort de Mahsa Amini.

L'Iran a vivement critiqué mardi ces nouvelles sanctions et annoncé qu'il se réservait le droit d'y répondre "avec force".

L'ancien président iranien et principale figure des réformateurs, Mohammad Khatami, a rejeté lui l'idée d'un reversement du pouvoir en Iran même si, selon lui, domine une insatisfaction contre la gouvernance actuelle.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.