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Les troupes irakiennes font mouvement vers les champ de pétrole de Kirkouk aux mains des Kurdes


Lundi 16 octobre 2017 à 00h51

Bagdad, 15 oct 2017 (AFP) — Les troupes irakiennes ont fait mouvement dans la nuit de dimanche à lundi pour "prendre une base militaire et les champs de pétrole" tenus depuis trois ans par les Kurdes dans la province disputée de Kirkouk.

Cette offensive intervient après trois jours de face-à-face tendu entre troupes irakiennes et peshmergas kurdes et après l'expiration d'un délai supplémentaire accordé à ces derniers pour quitter les zones dont ils ont pris le contrôle en 2014 dans le chaos créé par la percée fulgurante des jihadistes du groupe Etat islamique (EI).

"Les forces irakiennes et les unités de mobilisation populaire avancent depuis Taza Khormatou, au sud de la ville de Kirkouk", a indiqué le Conseil de sécurité kurde sur Twitter. Un photographe de l'AFP a vu des colonnes militaires se diriger vers le nord depuis Taza Khormatou.

Aux abords de la ville de Kirkouk, les troupes irakiennes ont appelé par haut-parleurs les peshmergas à se retirer de leurs positions, ont indiqué des sources locales.

Au même moment, le gouverneur de Kirkouk, Najm eddine Karim, limogé par Bagdad mais qui refuse de quitter son poste, a appelé les habitants à prendre les armes pour défendre leur ville.

Jusqu'à présent, les forces irakiennes se sont contentées de reprendre certaines bases désertées peu avant par les peshmergas.

- 'Déclaration de guerre' -

Les forces irakiennes veulent, a indiqué le Conseil de sécurité kurde, "reprendre la base K1" de la 12e division de l'armée irakienne, dont les peshmergas s'étaient emparés en juin 2014 peu après la chute de Mossoul aux mains des jihadistes du groupe Etat islamique (EI). Ainsi que "les champs de pétrole" de Kirkouk.

Ils étaient tenus par les forces du gouvernement à Bagdad jusqu'à ce qu'en 2008, les Kurdes prennent le contrôle de celui de Khormala. Et en 2014, ils se sont également emparés de ceux de Havana et Bay Hassan.

Les trois champs pétroliers de Kirkouk fournissent 250.000 barils par jour sur les 600.000 b/j de pétrole produits, dont 550.000 b/j sont exportés par le Kurdistan irakien en dépit du refus de Bagdad.

Le Kurdistan, qui traverse la plus grave crise économique de son histoire, pourrait lourdement pâtir de la perte de ces champs qui assurent 40% de ses exportations pétrolières.

A côté de "K1" se trouve une raffinerie au nord-ouest de Kirkouk. Les troupes irakiennes entendent également reprendre l'aéroport mitoyen.

Selon des sources dans la province de Kirkouk, les troupes qui incluent les unités du contre-terrorisme (CTS), la police, ses unités spéciales et l'armée, progressent sur six fronts, notamment depuis Bachir et Taza Khormatou, au sud-ouest de Kirkouk.

Plus tôt dimanche, le gouvernement irakien avait changé de ton en accusant les Kurdes de chercher à déclarer la guerre avec la présence dans la province disputée de Kirkouk de combattants du PKK, considéré comme "terroriste" par Ankara et Washington.

Le Conseil de la sécurité nationale, la plus haute instance de la Défense en Irak présidée par le Premier ministre Haider al-Abadi, avait dit dans un communiqué y voir "une déclaration de guerre".

Face à cette "escalade dangereuse", il est "impossible de rester silencieux", et "le gouvernement central et les forces régulières vont accomplir leur devoir de défendre les citoyens (...) et la souveraineté de l'Irak", poursuivait le texte.

Le Conseil pointait notamment la présence "de combattants n'appartenant pas aux forces de sécurité régulières à Kirkouk", citant le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), mouvement kurde de Turquie.

Des responsables kurdes ont démenti une présence du PKK, mais l'un d'eux a reconnu qu'il y avait des "sympathisants" de cette formation à Kirkouk, des "volontaires" qui combattaient le groupe Etat islamique (EI).

- Pas de pré-conditions au dialogue -

La déclaration du Conseil de sécurité irakien intervient juste après une réunion des dirigeants kurdes ont refusé d'annuler le référendum d'indépendance comme condition à des négociations comme le réclame Bagdad.

A l'issue de quatre heures de négociations, avec le président irakien, le Kurde Fouad Massoum, ils n'ont fait dans leur communiqué final aucune mention d'un retrait des milliers de peshmergas qu'Erbil dit avoir mis en état d'alerte dans la province de Kirkouk depuis plusieurs jours.

Dans la soirée, un responsable kurde a indiqué, sous le couvert de l'anonymat, qu'une dizaine d'habitations de familles kurdes avaient été incendiées à Toz Khormatou, accusant des unités turkmènes, une importante communauté de la ville à 75 km au sud de Kirkouk, du Hachd. Des affrontements armés entre le Hachd et les peshmergas secouent cette ville depuis vendredi.

Bagdad, en crise ouverte avec Erbil depuis la tenue le 25 septembre du référendum d'indépendance y compris dans des zones disputées comme Kirkouk, a multiplié les mesures économiques et judiciaires pour faire plier le Kurdistan.

Selon Erbil, l'Iran a en outre fermé sa frontière avec le Kurdistan, ce que Téhéran a démenti.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.