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Les étrangers quittent le Kurdistan irakien par peur d'y être coincés


Jeudi 28 septembre 2017 à 16h18

Erbil (Irak), 28 sept 2017 (AFP) — Sac au dos, tirant sa valise à roulettes, Khider Ahmad, coordinateur sud-soudanais d'une organisation humanitaire internationale a passé jeudi le contrôle à l'aéroport d'Erbil et attend un vol pour renter dans son pays.

"Ma mission est terminée, je devais quitter la semaine prochaine mais j'ai avancé mes dates parce que, comme tout le monde s'y attendait, tous les vols seront annulés", dit ce quadragénaire.

"Je voulais éviter de rester coincé ici", ajoute cet homme grand à la barbe rousse, qui a passé deux ans au Kurdistan irakien.

Comme lui, un grand nombre d'étrangers quittaient jeudi la capitale du Kurdistan après la décision du gouvernement central de Bagdad de suspendre dès vendredi tous les vols internationaux à partir et vers les deux aéroports internationaux de cette région autonome.

Il s'agit en effet d'une mesure de rétorsion en réaction au référendum d'indépendance organisé lundi par le chef kurde Massoud Barzani et que Bagdad juge illégal.

"Je ne pense pas que cela durera longtemps. Nous avons (au Kurdistan) une importante communauté internationale et cette fermeture n'est pas seulement contre les Kurdes", ose espérer la directrice de l'aéroport d'Erbil, Talar Faiq Saleh.

Dans cet aéroport, orné d'une multitude de drapeaux kurdes et où figure une affiche appelant à l'indépendance du Kurdistan, de nombreux étrangers mais aussi des Kurdes s'enregistraient aux comptoirs des compagnies étrangères avec leurs valises car ils ignorent combien de temps durera la crise.

- 'Revenir quand ce sera calme' -

"Nous partons à cause du référendum, enfin, je veux dire à cause de la fermeture de l'aéroport et tout le reste", explique Zenat Drown, une américaine originaire d'Afghanistan qu'elle a fui à l'âge de cinq ans à cause des talibans.

"Je retourne aux États-unis car ça devient tendu ici et j'ai deux enfants", explique cette femme d'une quarantaine d'années.

"Je reviendrai quand ce sera calme", ajoute-t-elle, tenant à à la main son billet et son passeport ainsi que ceux de ses jeunes enfants. Elle s'occupait depuis trois des femmes victimes des exactions des jihadistes du groupe État islamique (EI).

Bien qu'aucune mesure n'ait été prise et que l'on n'entend pas pour le moment le bruit de bottes, les députés irakien ont réitéré mercredi leur exigence auprès du Premier ministre Haider al-Abdadi d'envoyer l'armée dans les zones disputées avec les Kurdes.

Mais c'est la crainte de ne plus pouvoir quitter la région kurde qui effraie beaucoup d'étrangers. Le gouvernement régional kurde délivre un visa à des citoyens de nombreuses nationalités mais il n'est pas reconnu par Bagdad et les étrangers ne peuvent donc pas se rendre ailleurs en Irak.

Sans vols internationaux depuis Erbil ou Souleimaniyeh, certains chercheurs, humanitaires, journalistes et ouvriers du bâtiments, dépourvus du visa fédéral, ont donc préféré partir plutôt que de rester bloqués.

Le consulat de France a aussi invité ses ressortissants "non munis de visa irakien à quitter le territoire avant vendredi".

"Nous avons ici des consulats, des compagnies et du personnel international, cela va affecter tout le monde. Ce n'est pas une bonne décision", a souligné Mme Saleh.

Plus loin, un groupe de jeunes travailleurs indiens sont assis près de leurs valises.

"Ma société m'a dit hier que je devais rentrer chez moi parce qu'on ne sait pas ce qui va se passer et que je pourrais rester coincé", explique un électricien de 32 ans.

"Ca fait un an que je ne suis pas pas retourné en Inde, je suis donc plutôt content", dit-il en souriant.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.