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Le Parlement turc vote une loi protégeant les enfants kurdes de la prison


Jeudi 22 juillet 2010 à 15h28

ANKARA, 22 juil 2010 (AFP) — Le Parlement turc a voté jeudi une loi limitant l'emprisonnement des enfants qui jettent des pierres sur les forces de l'ordre dans les manifestations, une initiative prudemment saluée par un député issu de la minorité kurde, principale concernée par la nouvelle loi.

Le parti au pouvoir AKP avait présenté ce texte pour remédier à la législation actuelle, qui a entraîné des centaines de condamnations à la prison de jeunes, certains âgés de 12 ans, provoquant depuis des années les protestations d'organisations de défense des droits de l'homme, dont Amnesty International.

La nouvelle loi prévoit une amnistie pour les mineurs emprisonnés et rend plus difficiles les condamnations à la prison de mineurs arrêtés dans les manifestations, a expliqué le député d'origine kurde Bengi Yildiz.

"Environ 190 mineurs actuellement en prison devraient sortir... Et des milliers d'autres actuellement jugés devraient bénéficier de cette loi", a-t-il déclaré à l'AFP.

Les jeunes lançant des pierres sont des scènes fréquentes dans les manifestations kurdes, souvent organisées dans le sud-est du pays pour soutenir le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), mouvement armé considéré comme terroriste par la Turquie et de nombreux autres pays.

Des centaines de mineurs ont ainsi été poursuivis en application de la loi antiterroriste, qui assimile les manifestations en faveur du PKK à de la propagande terroriste.

Entre 2006 et 2008, environ 2.500 mineurs âgés de 12 à 18 ans ont été présentés à des tribunaux pour enfants ou pour adultes, en vertu de la loi antiterroriste, selon le ministère de la justice.

Les organisations de défense des droits de l'homme reprochent à la police d'arrêter les mineurs sans motif particulier pendant des manifestations, et, souvent, de les battre.

Le père d'un adolescent de 16 ans, F.G., a raconté à l'AFP, en avril à Diyarbakir (sud-est), que son fils s'était vu infliger en 2008 une peine de sept ans et demi de prison pour jets de pierres au cours de manifestations, dont l'une avait spontanément eu lieu parce que la rumeur courait que l'on avait "rasé la tête" d'Abdullah Öcalan, le chef toujours incontesté du PPK, emprisonné à vie.

La nouvelle loi précise que les mineurs reconnus coupables de participation à une manifestation interdite ou de faits relevant de la loi antiterroriste seront pris en charge dans des programmes de redressement, et n'iront plus en prison.

Mais les récidivistes et ceux arrêtés avec des armes seront passibles de la prison.

M. Bengi a précisé que les peines de prison applicables aux mineurs seraient réduites, avec un maximum de six ans. Enfin, la nouvelle loi abolit les articles de la précédente loi autorisant les tribunaux pour adultes à juger des mineurs.

M. Bengi a salué ces dispositions comme étant des mesures encourageantes.

"Mais ce n'est qu'un palliatif", a-t-il ajouté. "Les problèmes continueront, tant que le système de la loi antiterroriste restera inchangé."

Pour faire avancer sa candidature à l'Union européenne, la Turquie a pris des mesures en faveur des droits de l'homme, mais elle reste critiquée, notamment concernant le comportement des forces de sécurité.

Le gouvernement s'est par ailleurs efforcé d'octroyer plus de droits aux 12 à 15 millions de Kurdes, sur une population totale de 73 millions d'habitants, en dépit d'une recrudescence ces derniers mois des attaques meurtrières déclenchées par le PKK.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.