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Le Comité antitorture demande la fin de l'isolement total d'Öcalan


Jeudi 6 mars 2008 à 14h48

STRASBOURG (Conseil Europe), 6 mars 2008 (AFP) — Le Comité antitorture (CPT) du Conseil de l'Europe demande au gouvernement turc de mettre fin à l'isolement total de l'ex-chef du PKK Abdullah Öcalan, préjudiciable à sa santé mentale, mais la Turquie refuse, selon un rapport publié jeudi à Strasbourg.

Lors d'une visite en mai 2007 dans l'île Imrali, le CPT a examiné les conditions de détention et la santé d'Öcalan, seul détenu dans cette prison de haute sécurité depuis le 16 février 1999.

Les experts du CPT ont effectué des prélèvements de cheveux et de poils thoraciques pour des analyses toxicologiques qui ont été effectuées à Genève, afin de vérifier les allégations d'empoisonnement de ses amis et partisans.

Alors que des milliers de Kurdes manifestent régulièrement à Strasbourg et ailleurs en Europe pour réclamer la libération de leur ancien chef et protester contre son "empoisonnement", les experts du CPT sont formels.

Les concentrations de métaux lourds (strontium, magnésium, baryum) trouvés dans l'organisme du prisonnier ne sont pas "dangereuses pour la santé de l'intéressé", âgé de 59 ans.

Les valeurs de ces produits sont certes élevées, "mais elles sont probablement liées aux conditions environnementales de l'intéressé", qui vit près de la mer, et à ses habitudes alimentaires, selon les toxicologues genevois mandatés par le CPT.

En revanche, le CPT s'alarme de la notable dégradation de l'état mental du chef kurde, depuis ses précédentes visites en 2001 et 2003.

Les experts évoquent les conséquences sévères d'un "stress chronique et un isolement social et émotionnel prolongé", liées "à un sentiment d'abandon et de déception" et jamais constatées auparavant.

Avec une grande fermeté, le CPT enjoint les autorités turques de "réviser complètement la situation d'Abdullah Öcalan avec l'objectif de l'intégrer dans un endroit lui permettant d'avoir des contacts avec d'autres prisonniers et une plus large série d'activités".

Il demande pour le prisonnier le droit d'avoir la télévision, de téléphoner régulièrement à ses proches, de voir ses avocats sans la présence d'un membre de l'administration, d'avoir des visites plus fréquentes et de partager sa prison avec d'autres détenus.

Mais dans leur réponse adjointe au rapport, -- publié avec leur feu vert, selon la procédure en vigueur au CPT --, les autorités turques opposent une fin de non-recevoir à ces demandes: "chef d'une organisation terroriste qui a mené des actes de violence brutaux entraînant la mort de 25.000 personnes", Öcalan "n'a pas abandonné ses tentatives pour continuer à diriger le mouvement", se justifie le gouvernement.

"Il essaye d'arriver à ses fins en utilisant ses rencontres avec ses avocats et ses proches", selon Ankara qui argue aussi d'importants risques pour la population, pour la sécurité du prisonnier et pour d'éventuels codétenus, sans compter le risque d'évasion.

Le gouvernement turc précise aussi qu'Öcalan a reçu 126 visites de ses frères et soeurs depuis son admission à Imrali jusqu'en septembre 2007 et 675 consultations avec ses avocats, mais qu'on ne pouvait l'autoriser à utiliser le téléphone en raison de sa dangerosité.

Né le 4 avril 1949, Öcalan, fondateur et ex-chef du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), a été arrêté le 15 février 1999 au Kenya par des agents turcs avec l'aide des services de renseignement américains.

Transféré en Turquie, il a été condamné à mort pour "séparatisme" en juin 1999, peine commuée en 2002 en prison à vie après l'abolition de la peine capitale.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.