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Las des combats, les Kurdes de Turquie veulent une vie "normale"


Samedi 23 février 2008 à 17h52

CIZRE (Turquie), 23 fév 2008 (AFP) — "Nous voulons pouvoir vivre une vie normale et ne pas craindre l'avenir", explique Mehmet Demir, un Kurde de Cizre, une petite ville du sud-est de la Turquie, tandis que des combats opposent l'armée turque aux rebelles kurdes en Irak, de l'autre côté de la frontière toute proche.

"J'espère personnellement que l'armée en finira cette fois avec le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), ce sera pour le bien de tous, Kurdes et Turcs", s'exclame cet homme.

Dans les années 1990, époque des heurts des plus sanglants entre les forces d'Ankara et les rebelles séparatistes, "tout le monde fermait boutique à trois heures de l'après-midi à cause des violences et personne ne pouvait garantir votre sécurité", raconte ce restaurateur âgé de 26 ans.

"Mais maintenant", précise Mehmet, "c'est tout différent", car le PKK a été mis hors d'état de nuire dans la zone et ses militants se sont enfuis dans la montagne irakienne où des milliers de soldats turcs sont entrés jeudi soir pour les pourchasser.

Ses cousins se sont d'ailleurs mis au service des journalistes qui ont afflué à Cizre, à 45 km de la frontière, afin de pouvoir suivre, même de loin, les affrontements dans le nord de l'Irak.

Située dans la province de Sirnak, cette cité de 80.000 habitants est au coeur du conflit qui oppose depuis 1984 l'armée turque au PKK et qui a fait plus de 37.000 morts.

L'armée turque a pour sa part déconseillé aux représentants de la presse de voyager dans la zone des combats et tente de les empêcher de se rendre dans le Kurdistan irakien.

"Nous voulons des investissements, c'est ce dont nous avons besoin en premier ici", dit de son côté Necati Cireli, 32 ans, qui gagne son pain quotidien par de menues besognes.

Accroupi sur un tabouret dans un café, cigarette au bec, il discute avec des amis.

"Si le PKK est complètement anéanti, les hommes d'affaires de cette région qui ont construit des usines dans l'ouest, pourront retourner dans leur pays natal", espère Necati.

A Cizre, il n'y a aucun signe de mobilisation militaire si ce n'est le passage d'un petit convoi de l'armée qui a traversé la ville pour se rendre dans une zone frontalière.

La vie se poursuit tout à fait normalement et les gens viennent faire leurs courses sur le marché.

Mais certains habitants craignent que l'opération militaire turque, limitée au massif montagneux du nord de l'Irak, ne suffise pas à porter un coup fatal au PKK.

"C'est la pauvreté qui attire les gens au PKK, si vous ne supprimez pas la pauvreté, le PKK continuera d'engager des jeunes d'ici dans ses rangs", souligne un vieillard, qui refuse de décliner son nom, sur le seuil d'un magasins de vêtements.

Le taux de chômage, comme dans toutes les autres villes du sud-est de la Turquie, région peuplée majoritairement de Kurdes, est presque deux fois plus élevé ici que dans les agglomérations de l'ouest industrialisé, et largement au-dessus de la moyenne officielle qui est de 10%.

"Il faut trouver du boulot aux jeunes, faire en sorte qu'ils travaillent et ne pensent pas à faire des bêtises", comme d'aller rejoindre les camps du PKK dans la montagne irakienne, ajoute le septuagénaire.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.