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La Turquie poursuit son offensive contre une enclave kurde en Syrie


Dimanche 21 janvier 2018 à 09h55

Hassa (Turquie), 21 jan 2018 (AFP) — Ankara continuait de bombarder dimanche une enclave kurde dans le nord de la Syrie au deuxième jour d'une vaste offensive marquée par des tirs de roquettes contre une ville frontalière turque dans une apparente riposte.

Des rebelles syriens appuyés par Ankara ont commencé à avancer en direction d'Afrine, une enclave kurde contrôlée par les Unités de protections du peuple (YPG) que l'artillerie turque continuait de pilonner dimanche, selon l'agence de presse étatique turque Anadolu.

Dans la nuit de samedi à dimanche, quatre roquettes tirées depuis des zones contrôlées par les YPG ont frappé la ville frontalière turque de Kilis, faisant un blessé léger, d'après l'agence de presse Dogan, ajoutant que des batteries turques avaient immédiatement riposté.

L'offensive turque, baptisée opération "Rameau d'olivier", risque de tendre davantage les rapports entre Ankara et Washington: les Etats-Unis soutiennent en effet une coalition arabo-kurde, dont font partie les YPG, pour combattre le groupe Etat islamique.

Cette opération a débuté samedi à 14H00 GMT, avec un bombardement aérien d'envergure mené par 72 appareils qui ont frappé plus de 100 cibles, dont l'aéroport militaire de Minnigh, selon l'armée turque.

Un porte-parole des YPG a affirmé que dix personnes, pour la plupart des civils, avaient été tuées dans ces frappes. L'armée turque affirme pour sa part n'avoir touché que des "terroristes", expression par laquelle elle désigne les combattants kurdes.

Un correspondant de l'AFP a vu quatre pièces d'artillerie turque faire feu dimanche matin en direction de villages de la région d'Afrine. Un autre correspondant de l'AFP à Afrine a vu un avion bombarder la partie occidentale de l'enclave dimanche.

- 'L'heure du triomphe' -

Ankara accuse les YPG d'être la branche syrienne du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui mène une rébellion dans le sud-est de la Turquie depuis plus de trente ans et est considéré par Ankara et ses alliés occidentaux comme une organisation terroriste.

Mais les YPG ont aussi été un allié incontournable des Etats-Unis, partenaires de la Turquie au sein de l'Otan, dans la guerre contre le groupe Etat islamique.

La presse turque exprimait dimanche un soutien unanime à l'offensive: "L'heure du triomphe est arrivée", "Un coup de poing pour les terroristes, un rameau d'olivier pour le peuple", titraient ainsi les quotidiens progouvernementaux Yeni Safak et Star.

Il s'agit de la deuxième offensive turque dans le nord de la Syrie, après celle lancée en août 2016 pour repousser l'EI vers le sud, mais aussi enrayer l'expansion territoriale des milices kurdes.

A la faveur du conflit syrien qui a fait plus de 320.000 morts depuis 2011, les Kurdes syriens, longtemps marginalisés, ont installé en 2012 une administration autonome à Afrine, un territoire isolé des autres zones contrôlées par les YPG plus à l'est.

Mardi, M. Erdogan avait promis d'en finir avec les "nids de terroristes" dans les régions du nord de la Syrie contrôlées par les groupes kurdes.

Si ces menaces s'étaient multipliés ces derniers mois, leur mise à exécution est survenue dans la foulée de l'annonce, par la coalition internationale anti-jihadistes emmenée par Washington, de la création d'une "force frontalière" composée notamment de guerriers kurdes.

La Turquie a réagi avec colère, qualifiant cette force, qui doit compter à terme 30.000 hommes, d'"armée terroriste".

- Pays voisins informés -

Les menaces d'intervention turque avaient suscité l'inquiétude à Washington : "Nous ne pensons pas qu'une opération militaire (...) aille dans le sens de la stabilité régionale", avait averti vendredi le département d'Etat.

Face à cette offensive turque, la Russie a appelé à la "retenue", alors que la Syrie avait affirmé jeudi qu'elle abattrait tout appareil militaire turc s'aventurant dans son espace aérien.

Mais les analystes estiment qu'aucune offensive majeure ne peut être lancée en Syrie sans l'aval de la Russie, présente militairement dans la région et qui entretient de bonnes relations avec les YPG.

Le ministère russe de la Défense a annoncé samedi que les militaires russes déployés dans la zone d'Afrine avaient quitté leurs positions.

Le chef de l'armée turque, le général Hulusi Akar, et celui des services de renseignement, Hakan Fridan, se sont rendus à Moscou jeudi pour des entretiens.

La Turquie a affirmé samedi que son pays tenait le président syrien Bachar al-Assad informé "par écrit" de son offensive, ce que le régime syrien a nié, dénonçant une "brutale agression de la Turquie sur Afrine".

pho-gkg-burs/roc

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.