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La Turquie pleure ses soldats tués, Erdogan rejette la "spirale de violence"


Dimanche 20 juin 2010 à 12h17

ANKARA, 20 juin 2010 (AFP) — La Turquie a rendu un dernier hommage dimanche aux onze soldats tués la veille par des rebelles kurdes, tandis que le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, sous le feu des critiques, a promis de ne pas laisser entraîner son pays dans une "spirale de violence".

Des rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) ont attaqué un avant-poste militaire samedi matin près de la frontière irakienne, déclenchant des affrontements qui ont coûté la vie à au moins neuf soldats et 12 rebelles, selon l'armée.

Treize autres soldats ont été blessés.

Par ailleurs, deux soldats ont été tués dans l'explosion d'une mine alors qu'ils étaient à la poursuite des rebelles, portant le bilan des violences de samedi à 23 morts.

L'armée a envoyé des forces spéciales dans la région. L'aviation turque a riposté en pilonnant des positions rebelles dans le nord de l'Irak, selon l'armée.

Dans la nuit, les rebelles ont attaqué une caserne près de Palu (est), tuant un soldat, ce qui porte à 12 le bilan des soldats tués en deux jours, le plus lourd tribu payé par l'armée turque depuis deux ans.

Selon un responsable irakien des services de sécurité, l'armée turque a aussi pénétré de 10 km en territoire irakien dans la nuit de samedi à dimanche.

Trois personnes ont été tuées lors de cette incursion dans les monts Qandil où se trouvent les bases du PKK, a indiqué ce responsable sans préciser si les victimes sont des civils ou des rebelles.

C'est la seconde fois en cinq jours que des soldats turcs franchissent la frontière avec l'Irak.

Mercredi, l'armée turque était entrée dans la province irakienne de Dohouk, pour leur première opération terrestre dans la région en deux ans.

Le porte-parole du PKK Ahmed Denis a menacé samedi de lancer des "attaques dans toutes les villes de Turquie si l'armée devait poursuivre sa politique d'affrontement militaire".

Une cérémonie a été organisée dimanche à Van, ville de l'est de la Turquie d'où sont partis les militaires tués dans l'attaque contre leur poste situé 150 km plus au sud.

M. Erdogan, des ministres et des responsables militaires sont arrivés dans la ville pour ce dernier hommage aux soldats.

Leurs cercueils étaient placés l'un à côté de l'autre sur le tarmac de l'aéroport et recouverts du drapeau rouge et blanc turc, selon des images de la télévision.

"Nous ne sombrerons pas dans une spirale de violence", a déclaré M. Erdogan. "Nous ne tomberons pas dans le défaitisme (...) Nous lutterons jusqu'au bout" contre le PKK, a-t-il prévenu.

Dans une allusion à l'"ouverture kurde", projet gouvernemental visant à octroyer plus de droits à cette minorité, il a promis de "consolider la fraternité et l'unité" nationale.

Des ambassadeurs de l'Union européenne --à laquelle souhaite adhérer la Turquie-- figuraient parmi les invités.

Le gouvernement Erdogan est critiqué pour l'escalade de la violence. L'opposition l'accuse de menacer l'unité nationale en envisageant des réformes en faveur des 12 à 15 millions de Kurdes de Turquie.

Devlet Bahceli, chef de file des nationalistes, a réclamé le rétablissement de l'état d'urgence dans le sud-est, auquel le parti de M. Erdogan a mis fin en 2002.

L'"ouverture kurde", annoncée l'an dernier, a connu des revers avec la dissolution du principal parti pro-kurde, des arrestations massives de militants kurdes et une forte opposition des milieux nationalistes.

Avec la fin de l'hiver, les rebelles du PKK ont multiplié les opérations d'infiltration à partir des régions montagneuses d'Irak où deux milliers d'entre eux sont retranchés.

Le conflit a fait plus de 45.000 morts depuis 1984.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.