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L'Irak élit des conseils provinciaux pour la première fois en dix ans


Lundi 18 decembre 2023 à 22h41

Bagdad, 18 déc 2023 (AFP) — Les Irakiens ont voté lundi pour choisir les membres de leurs conseils provinciaux, premier scrutin du genre en une décennie qui servira à consolider les partis chiites pro-Iran au pouvoir, malgré un taux de participation à 41%.

Passé dans l'opposition, l'influent leader religieux chiite Moqtada Sadr boycotte ces élections organisées dans 15 provinces. Dans un pays de 43 millions d'habitants, riche en hydrocarbures mais miné par une corruption endémique, la désillusion domine.

Le taux de participation s'est élevé à 41%, soit près de 6,6 millions de votants sur plus de 16,1 millions d'inscrits, selon la commission électorale.

Jusqu'à la fermeture des urnes, des journalistes de l'AFP ont en effet constaté une faible affluence dans trois bureaux de vote de Bagdad, mais aussi dans le sud, dans la ville de Nassiriya, les électeurs arrivant au compte-gouttes.

Lamiaa Mahmoud, fonctionnaire de 59 ans, a elle voté pour "construire le pays". "Nous voulons développer le pays, nous ne voulons pas rester en arrière", martèle-t-elle.

Le scrutin est un test pour le gouvernement de Mohamed Chia al-Soudani. Nommé par une coalition de partis pro-Iran, il fait valoir sa politique de développement des services publics et des infrastructures, ravagés par des décennies de conflits.

- "Base sociale" -

Dans un pays traumatisé par des attentats jihadistes dévastateurs et meurtriers, la journée s'est déroulée sans incidents sécuritaires majeurs, selon les autorités.

Instaurés après l'invasion américaine et la chute de Saddam Hussein en 2003, les conseils municipaux jouissent d'importantes prérogatives: élection du gouverneur de la province et allocations des budgets de la santé, des transports ou de l'éducation.

Leurs détracteurs voient dans ces conseils des nids à corruption favorisant le clientélisme.

Le chiffe de la participation est en baisse par rapport au dernier vote pour les conseils provinciaux organisé en 2013 (51%). Aux législatives de 2021, le taux de participation s'élevait à 44%.

A Bagdad, le taux se situait entre 21% pour Roussafa, le district situé sur la rive orientale du Tigre, et 32% pour Karkh, sur la rive occidentale du fleuve.

La participation la plus élevée a été enregistrée à Kirkouk (65%), province du nord que se disputent les grands partis des communautés arabe, kurde et turcomane.

Au total, 6.000 candidats se disputaient 285 sièges dans les provinces concernées. Des résultats "préliminaires" sont attendus mardi, 24 heures après la fin du vote, selon la commission électorale.

Dans le pays majoritairement chiite, le scrutin devrait consolider des factions du Cadre de coordination, coalition pro-Iran représentant partis chiites et anciens paramilitaires du Hachd al-Chaabi, intégrés aux forces régulières.

Pour certains poids lourds de cette alliance dominant le Parlement, les élections sont une "opportunité" pour "prouver qu'ils ont une base sociale et qu'ils sont populaires", souligne M. Mansour.

Car déjà des législatives se profilent à l'horizon 2025.

Quant à Moqtada Sadr, grand acteur de la scène chiite, il avait annoncé son retrait de la vie politique, après un bras de fer avec ses adversaires marqué par des affrontements meurtriers à l'été 2022.

- "A quoi ça sert?" -

Lors d'une révolte antipouvoir à l'automne 2019, les conseils provinciaux avaient été dissous par le Parlement, mais le gouvernement de M. Soudani a validé leur rétablissement.

Les trois provinces de la région autonome du Kurdistan (nord) en sont exclues.

"A quoi vont nous servir ces élections", lâche Abou Ali, chauffeur de taxi de 45 ans. "Les années passent, les élections se répètent, (...) et notre situation reste la même", confie-t-il à Bagdad.

Dans un Irak multiconfessionnel et multiethnique, dix sièges iront aux minorités -- chrétienne, yazidie ou sabéenne. Parmi les candidats figurent 1.600 femmes, un quota de 25% leur étant réservé.

Si le conseil provincial de Bagdad compte 49 élus, celui de Bassora (sud) en a 22.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.