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Iran: exécution publique d'un deuxième homme en lien avec les manifestations


Lundi 12 decembre 2022 à 09h06

Paris, 12 déc 2022 (AFP) — L'Iran a exécuté lundi en public un deuxième homme condamné en lien avec les manifestations qui secouent le pays depuis près de trois mois, malgré le tollé suscité par son recours à la peine capitale contre des personnes impliquées dans ce mouvement de contestation.

Majidreza Rahnavard a été condamné à mort par un tribunal de la ville de Machhad (nord-est) pour avoir tué deux membres des forces de sécurité. Il a été pendu en public plutôt qu'à l'intérieur de la prison, a rapporté Mizan online, l'organe de l'autorité judiciaire.

Il s'agit de la deuxième exécution liée à la contestation, après la pendaison jeudi de Mohsen Shekari, un homme de 23 ans reconnu coupable d'avoir attaqué et blessé un paramilitaire, qui avait suscité l'indignation de pays occidentaux.

Mais c'est la première exécution en public dans le contexte des manifestations déclenchées par la mort le 16 septembre de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans décédée après son arrestation par la police des moeurs pour infraction au code vestimentaire strict de la République islamique.

Depuis ses débuts en 1979, la République islamique d'Iran a été régulièrement secouée par des poussées de fièvre. Mais cette crise est inédite par sa durée, sa dispersion à travers les provinces, la participation de différents groupes ethniques et classes sociales et les appels directs à la fin du régime.

La justice iranienne affirme avoir prononcé jusqu'à présent des condamnations à mort contre 11 personnes en lien avec les manifestations, qualifiées d'"émeutes" par les autorités, mais les militants assurent qu'une douzaine d'autres personnes font face à des accusations passibles de la peine de mort.

"Pas de procédure régulière. Des procès fictifs. C'est comme ça qu'ils veulent arrêter les manifestations à l'échelle nationale", souligne Omid Memarian, analyste de l'Iran au Democracy for the Arab World Now (DAWN).

Rahnavard a été arrêté le 19 novembre alors qu'il tentait de fuir le pays, selon Mizan. Selon des informations non confirmés il était âgé de 23 ans.

- "Rappelez vos ambassadeurs" -

Des groupes de défense des droits humains avaient déjà averti ce week-end que plusieurs autres personnes arrêtées au cours des manifestations étaient sur le point d'être exécutées.

Selon Amnesty International, Mahan Sadrat, 22 ans, condamné à mort à l'issue d'un procès expéditif et "inéquitable" le 3 novembre, a été transféré samedi à la prison de Rajai Shahr de Karaj, près de Téhéran, "faisant craindre une exécution imminente".

Il a été reconnu coupable d'avoir dégainé un couteau lors des manifestations, ce qu'il a fermement nié au tribunal.

Amnesty a également averti que la vie d'un autre jeune homme, Sahand Nourmohammadzadeh, était en danger après sa condamnation à mort le 6 novembre pour avoir "démoli des balustrades d'autoroute et incendié des poubelles et des pneus", a indiqué le groupe.

Entre autres condamnés à la même peine, le rappeur Saman Seyedi, 24 ans, de la minorité kurde d'Iran. Sur les réseaux sociaux, sa mère a plaidé pour qu'il ait la vie sauve, clamant dans une vidéo: "mon fils est un artiste, pas un émeutier".

Un autre rappeur, Toomaj Salehi, qui a exprimé son soutien aux manifestations anti-régime, est accusé de "corruption sur terre" et pourrait être condamné à mort, ont confirmé les autorités judiciaires iraniennes le mois dernier.

La semaine dernière, les Etats-Unis, les membres de l'Union européenne et le Royaume-Uni ont fermement condamné l'exécution de Shekari, la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, dénonçant un "mépris sans bornes pour la vie humaine".

Mais des militants des droits humains et des ONG ont souhaité une réaction plus forte, allant jusqu'à la rupture des relations diplomatiques avec l'Iran et l'expulsion des ambassadeurs dans les capitales européennes.

"Le crime de Majidreza Rahnavard a été de protester contre le meurtre de Mahsa Amini. La méthode du régime pour gérer les manifestations est l'exécution. UE (Union européenne) rappelez vos ambassadeurs", a appelé la dissidente basée au Etats-Unis Masih Alinejad.

L'Iran exécute davantage de condamnés que n'importe quel autre pays, excepté la Chine, selon Amnesty International. Plus de 500 personnes y ont été exécutées en 2022, daprès le groupe de défense des droits humains Iran Human Rights (IHR), basé à Oslo.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.