Vendredi 21 novembre 2008 à 09h59
ERBIL (Irak ), 21 nov 2008 (AFP) — Le Parlement régional du Kurdistan irakien s'apprête à interdire l'excision, une pratique très répandue dans cette région du nord de l'Irak, affirmé une députée qui bataille contre cette mutilation féminine.
"Un projet de loi prohibant l'excision sera présenté dans les prochains jours au Parlement et les contrevenants risqueront désormais des peines de prison et des amendes", a indiqué à l'AFP Hala Souheil, médecin et députée.
"Au Kurdistan, 60% des fillettes de 4 à 14 sont excisées en dépit des mises en garde de plusieurs de nos ministères contre cette pratique douloureuse commise au nom de la religion et de l'hygiène", a souligné M. Zariane Abdelrahman, le ministre de la Santé de la région autonome.
Il participait à une conférence de trois jours contre la violence à l'égard des femmes, organisée par son ministère, à Erbil, à 350 km au nord de Bagdad.
Selon une étude réalisée en septembre par l'ONG allemande Wadi dans 201 villages des trois provinces autonomes et dans la région de Kirkouk où les Kurdes sont prédominants, 3.502 sur 5.628 femmes et filles, soit 62,2% étaient mutilées.
Cette pratique ante-islamique, encouragée aujourd'hui par certains religieux de cette région, ne semble pas exister dans le reste de l'Irak.
"Le ministère des Affaires religieuses devrait demander aux imams d'intervenir lors de leur sermon du vendredi pour que (les fidèles) s'écartent de cette pratique et le ministère de l'Education devrait mettre en place dans les écoles de filles des programmes pour les encourager de ne pas se soumettre aux ordres de leurs parents sur cette question", a souligné M. Abdelrahman.
Répandue en Afrique, personne ne sait au Kurdistan comment l'excision a atteint le nord de l'Irak.
"Nous ignorons d'où vient cette pratique transmise au cours des âges mais les anciens la justifient par la nécessité de préserver la chasteté des filles", a assure Dr Souheil.
Selon elle, "ce sont de vieilles femmes qui pratiquent cette mutilation sur les fillettes en utilisant des rasoirs de barbier ou parfois des morceaux de verre et cela entraîne souvent de graves hémorragies et parfois la mort", même s'il n'existe pas de statistiques précises.
En tout cas plusieurs personnalités religieuses sont totalement opposés à ce type de pratiques. Pour cheikh Sayyed Ahmad Abdelwahab al Panjaouini, imam de la mosquée Hajj Jamal à Erbil, "il s'agit de vieilles coutumes et l'islam n'a rien à voir avec elles".
"Il n'y a aucun texte religieux qui se réfère à cette habitude. C'est une coutume que certains ont fait entrer dans la pensée musulmane", a-t-il ajouté.
Récemment, la secrétaire générale de l'Union islamique des femmes, Mme Bekhal Abou Bakr, a publié un article dans le quotidien kurde Hawlati, soulignant que "la mutilation génitale des femmes n'est pas une pratique musulmane".
"Beaucoup de problèmes rencontrés par les femmes sont le résultat de traditions erronées et la religion n'est pas responsable. La charia est éloignée de ces pratiques et l'excision existe car certains interprètent d'une manière fausse le Coran", écrit-elle, faisant référence à la confusion entre la circoncision obligatoire des hommes et l'excision des femmes.
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.