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Irak/pétrole: nouvelle passe d'armes entre Bagdad et le Kurdistan


Jeudi 15 mars 2012 à 17h31

ERBIL (Irak), 15 mars 2012 (AFP) — Le conflit opposant de longue date le gouvernement irakien à la région autonome du Kurdistan a rebondi jeudi lorsque les dirigeants kurdes ont accusé Bagdad de minimiser les exportations de la région et de freiner volontairement son développement.

Le Kurdistan exporte 90.000 à 100.000 barils de pétrole par jour depuis le début de l'année, mais Bagdad affirme que les exportations n'atteignent que 65.000 bj et que cela lui occasionne "des pertes financières quotidiennes", déplore le gouvernement régional kurde dans un communiqué sur son site.

"Si les affirmations du ministère du Pétrole sont correctes, cela signifie que 25.000 à 35.000 bj sont perdus dans le processus de mise sur le marché (...) Le Kurdistan estime que cette divergence doit faire immédiatement l'objet d'une enquête, au cas où quelqu'un s'attribuerait la différence", souligne le communiqué.

Le Kurdistan accuse en outre le gouvernement central de bloquer depuis mai 2011 les paiements aux entreprises concernées, et de lui devoir plus d'un milliard de dollars de chiffre d'affaires pour 2011. "De plus, pas le moindre dollar n'a été versé pour les exportations en 2012", affirme-t-il.

Le Kurdistan prévient que ses exportations pourraient être menacées à terme si le gouvernement n'honore pas ces arriérés. Dans le cas contraire, la région pourrait les faire passer à 175.000 bj "ou même 250.000 bj".

Le Kurdistan irakien a signé dans le passé une quarantaine de contrats avec des compagnies étrangères. Or, le gouvernement irakien ne reconnaît que les accords signés avec le ministère du Pétrole, et a jusqu'à présent interdit à toute compagnie pétrolière ayant un contrat avec le Kurdistan de participer à des appels d'offres dans le reste du pays.

Le Kurdistan et Bagdad s'opposent notamment depuis des mois sur le cas de la major pétrolière américaine ExxonMobil, qui a signé un contrat d'exploration avec le Kurdistan.

Le groupe s'est vu sommer par Bagdad de choisir entre ce contrat et celui qu'il a dans le champ pétrolier de Qurna-Ouest (sud), où il produit avec la compagnie anglo-néerlandaise Shell environ 370.000 bj. Il s'agit d'un contrat de service avec le gouvernement irakien, pour lequel le cartel ne touche que 0,92 dollar par baril extrait.

"Les responsables au gouvernement central qui refusent d'accepter ces contrats sont des ratés qui n'arrivent pas à donner à l'Irak ce que nous donnons au Kurdistan", s'est insurgé le dirigeant kurde Massoud Barzani lors d'un discours jeudi à Erbil, la capitale régionale.

"Ils veulent que nous soyons comme eux", a-t-il ajouté.

"Le problème n'est pas que ces contrats violent ou non la Constitution, mais qu'ils ne veulent pas que la région se développe", a-t-il accusé.

L'Irak échoue depuis 2007 à adopter une loi régissant l'exploitation de ses ressources en hydrocarbures, vitales pour sa reconstruction, ce qui pèse lourdement sur le climat d'investissement.

Le pays a toutefois augmenté sa production ces derniers mois et pompe actuellement environ 3 millions de barils par jour, son plus haut niveau depuis 1979, ont indiqué de hauts responsables début mars.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.