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Irak: neuf civils tués dans des tirs d'artillerie, Bagdad accuse la Turquie


Mercredi 20 juillet 2022 à 21h12

Zakho (Irak), 20 juil 2022 (AFP) — Dans des jardins récréatifs du Kurdistan d'Irak, neuf civils, dont des enfants, ont été tués et 23 blessés mercredi par des tirs d'artillerie que Bagdad a imputés à la Turquie, engagée dans une opération militaire contre le PKK, classé organisation terroriste par la Turquie.

Le Premier ministre irakien Moustafa al-Kazimi a adopté un ton inhabituellement ferme vis-à-vis de son voisin turc, condamnant une "violation flagrante de sa souveraineté", et a dépêché sur les lieux son ministre des Affaires étrangères Fouad Hussein ainsi que plusieurs hauts responsables sécuritaires.

Le président irakien Barham Saleh a également condamné le "bombardement turc", fustigeant "une menace à la sécurité nationale".

Les victimes des tirs étaient pour la plupart des "touristes arabes irakiens, en majorité du centre et du sud de l'Irak", a indiqué à l'AFP Mouchir Bachir, chef du district de Zakho, frontalier de la Turquie.

Cette région montagneuse de la région autonome du Kurdistan d'Irak, située près de la frontière turque, est très populaire auprès des Irakiens du centre et du sud du pays fuyant les températures caniculaires de l'été.

"La Turquie a frappé à deux reprises aujourd'hui", a assuré M. Bachir.

Une source au sein du ministère turc de la Défense a toutefois assuré à l'AFP ne disposer "d'aucune information faisant état ou confirmant des tirs d'artillerie dans cette zone".

Ankara, qui a de facto installé plusieurs dizaines de bases militaires depuis 25 ans au Kurdistan irakien, a lancé à la mi-avril une nouvelle opération militaire contre les combattants kurdes turcs du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans le nord de l'Irak.

Un porte-parole des autorités médicales de Zakho, Amir Ali, a indiqué à l'AFP que les tirs de mercredi avaient fait neuf morts et 23 blessés. Parmi les personnes décédées figurent aux moins trois femmes, deux enfants, et trois hommes, avait-il auparavant indiqué.

- "Nos enfants sont morts" -

Devant un hôpital de Zakho, Hassan Tahsin Ali, le crâne bandé, raconte à l'AFP avoir miraculeusement survécu au déluge de feu qui s'est abattu sur le parc et ses étendues d'eau, où les visiteurs profitaient d'un moment de détente.

"Nous venons de la province de Babylone (centre)", raconte le jeune homme d'une voix atone. "Il y a eu des frappes à l'aveugle sur nous, il y avait des corps sur l'eau", ajoute-t-il. "Nos jeunes sont morts, nos enfants sont morts, à qui devons-nous nous adresser? Nous n'avons que Dieu".

"Plus de vingt autocars sont entrés dans le parc et 15 minutes plus tard il y a eu de violents bombardements, pas moins de cinq roquettes", raconte un autre rescapé interrogé par l'agence de presse irakienne INA.

Les opérations militaires turques compliquent les relations entre le gouvernement central irakien et Ankara, l'un des premiers partenaires commerciaux de l'Irak.

Elles valent à l'ambassadeur turc en poste à Bagdad d'être régulièrement convoqué au ministère irakien des Affaires étrangères. Mais les remontrances irakiennes sont généralement sans lendemain.

En soirée, malgré un important dispositif policier, quelques dizaines de personnes ont manifesté devant un centre de délivrance de visas turcs à Kerbala (centre), brûlant un drapeau turc, a constaté un photographe de l'AFP. Un rassemblement similaire s'est tenu à Nassiriya (sud).

- "Danger permanent" -

Erbil, capitale du Kurdistan d'Irak, entretient des relations compliquées avec le PKK car sa présence dans la région entrave ses relations commerciales vitales avec la Turquie voisine.

"Les affrontements entre les forces turques et le PKK dans les zones frontalières sont devenus une menace et un danger permanent pour la vie des citoyens", a dénoncé mercredi le gouvernement régional du Kurdistan dans un communiqué.

Le 17 juillet, un drone armé --turc selon les responsables locaux irakiens-- a visé une voiture à l'ouest de la ville de Mossoul (nord), chef-lieu de la province septentrionale de Ninive, frontalière du Kurdistan.

L'attaque a tué le chauffeur ainsi que ses quatre passagers, dont une femme, identifiés par les services de sécurité du Kurdistan comme étant des combattants du PKK.

Un mois plus tôt déjà, quatre "combattants" du PKK ont été tués au Kurdistan irakien dans une attaque menée par des "drones de l'armée turque", selon les autorités de cette région autonome.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.